Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Paris, de moi à toi
Paris, de moi à toi
Publicité
Archives
9 janvier 2013

Ère conditionnée : CHAPITRE 17

CHAPITRE 17

À Monsieur Oussama Ben Laden


Après des saisons de traque et d'angoisse, nous profitons parfois d'un court temps de répit durant lequel nous savourons un peu de paix. Enfin, nous pouvons vivre comme les autres sans avoir peur d'être contrôlés par les policiers. Un semblant de paix, qui me fait même oublier la menace qui pèse sur notre race. Il m'arrive même de cesser d'écrire et de sortir dehors et faire du shopping. Mais il suffit d'un petit événement pour que nos anciennes peurs nous paralysent. Comme par exemple le dernier attentat au Printemps-Haussmann à Paris (IXème arrondissement) m'a obligé à changer mes habitudes et à être plus vigilant. J'étais à nouveau hanté par mes anciennes angoisses et la peur d'être expulsé. Je sentais encore le besoin urgent de finir mon livre. Je n'écrivais pas par pur plaisir, mais par obligation. En réalité, je n'étais pas animé par l'envie d'écrire à vous, Monsieur Ben Laden et aux autres présidents.

J'ai mis un temps fou avant de me décider à vous écrire. J’hésitais à entrer en contact avec un terroriste international par peur, par prudence et par crainte d'attirer les foudres de vos anciens ennemis. Seulement, ma volonté l'a emporté sur ma lâcheté en étant témoin de l'injustice et conscient de l’existence du danger qui menace mon peuple.

Sache, l’Afghan, que je ne réagis ni par héroïsme, ni par bravoure. Je suis juste un bénévole, qui en a ras-le-bol et qui désire modestement améliorer la situation des êtres humains. Je suis l'exception, l'archange déchu et le témoin qui s'est désigné de lui-même afin de défendre la cause de son peuple ciblé par la destruction massive. Je m'expose à la lumière, je sors de l'ombre de ma clandestinité et je risque ma petite tête d’Arabe pour tenter de combattre l'injustice des hommes. Je m'apprête, l’Afghan, à vous écrire sans la moindre immunité et sans la moindre protection.

Comme la plupart des Algériens, j'étais abattu et meurtri par la propagation de la violence sanguinaire qui visait mon peuple. Je ne défends pas notre passé déjà écrit ; j’essaye de sauver l'avenir d’une jeunesse désorientée. Je suis contre la violence dans le monde et dans mon pays. En tant qu'Algérien, je ne supporte pas de voir mon peuple innocent ciblé par vos attentas. Pourquoi certains pays sont plus visés que d'autres ? Et pourquoi l'Algérie est devenue la proie de El Quaïda ? Non ! Je ne vous invite pas à répandre la destruction. Vérifiez vous-mêmes ! Mon Orient est ruiné et épuisé par les guerres. Notre terre berceau est devenue le théâtre des mortels combats et vous êtes l'un des participants de son anéantissement. Les musulmans accusent toujours la puissance destructrice des Américains et des juifs, sans qu’ils puissent mettre en cause leur faiblesse et leur mauvaise foi. Vous croyez-vous puissant avec votre fagot de talibans, alors que votre arsenal d’armes n'égale en rien la force de vos soi-disant opposants ? Croyez-vous aider à l’épanouissement de l'Islam ? Croyez-vous nous aidez avec vos guerres de banditisme ? Détrompez-vous Monsieur ! Vous êtes en train de tuer l'Islam avec votre folie meurtrière. L'Islam a besoin de ses hommes et de ses vicaires vivants. Nous sommes les auteurs et les acteurs dans cette grande histoire. Et vous nous affaiblissez en visant les innocents musulmans. Après chaque attentat vous laissez derrière vous des handicapés, des veuves, des orphelins et surtout vous tuez injustement des civils. Vos joujoux, vos armes ! Qui vous les fournit ? Eux sûrement, vos soi-disant ennemis et qui vous offrent l'excuse de détruire notre terre sainte.

Vos attentats nous affaiblissent et nous épuisent. Il suffit d'une «fatwa» pour que vous sanctifiiez la destruction en l'attribuant à Dieu. Certes notre Prophète (PSL) a livré des guerres aux mécréants. Mais au moins lui, il a été élu par le Très-Haut. Les musulmans ont prêté un serment d'allégeance au dernier des prophètes et ainsi l’a fait l'Émir Abdelkader. Personne ne se désigne de lui-même, autant qu'émir des musulmans. Vous vous donnez le droit d'être le défenseur des musulmans en délivrant des guerres au nom de Dieu et contre qui ? Contre nous, des musulmans ! Je peux expliquer pourquoi vous vous êtes octroyé le droit de vous élire comme le sauveur de l'Islam. L’Orient est dévasté par des guerres interminables et la plupart des régimes orientaux sont les alliés des Occidentaux. À vos yeux, l'Islam est menacé par les juifs et les Américains. Mais pourquoi Dieu facilite la tache aux juifs, ses prétendus ennemis ? Et nous les musulmans, ses fidèles serviteurs ! Il nous inflige les pires souffrances. Il les rend fort et nous affaiblit. Je sais qu'il est interdit de prétendre qu'Allah soutient les mécréants. Parce que Dieu est toujours du côté des bons. Seulement, le quotidien actuel ne reflète que la réalité des juifs qui deviennent de plus en plus puissants. Dieu gère l'univers et guide nos pas, comme il guide le chevauchement des juifs.

Dieu aide-il les juifs ? Où c'est vous qui les aidez ? Je ne vous incite pas à combattre les juifs. Pourquoi les fervents croyants innocentent toujours Dieu et le lavent de tous les soupçons. Les fidèles de toutes religions confondues contribuent toujours le mal à l'homme. C'est toujours l'homme qui est le seul responsable du gâchis. Curieusement, selon le saint raisonnement des Français, je suis le seul coupable. Je suis le clandestin, le renégat, l'ange déchu et l'origine du mal. Les Français crient tellement, qu'ils m'écoutent plus. Je ne suis pas le seul responsable de ma situation irrégulière et de ce monde chaotique. Ma mission est de sauver mon peuple, les miens et les innocents. Je suis un Algérien et j'ai vu comment ces dernières guerres nous ont affaiblis.

Vous désirez nous impliquer dans votre engagement envers Dieu. Vous voudriez nous bousculer et faire de nous des kamikazes. Mais, cher complice, suivez-vous une stratégie de guerre ? Parce qu'il y a mille façon de combattre le mal. Gandhi en a fait la preuve. Sans violence, il a triomphé d'un grand empire. L'histoire notera que Gandhi a gagné et que les Indiens ont perdu. Les libres héritiers n'ont pas su préserver l'héritage d'un grand homme, qui a lutté en jeûnant. Pouvons-nous blâmer les jeunes Indiens ? Non ! Il ne faut jamais réprimander les nouvelles générations. Il faut surtout blâmer les amis de Gandhi, qui n'ont pas honoré leur engagement envers un homme extraordinaire. Vous voulez mêler les Algériens à votre guerre sanctifiée, sans prendre la peine de les comprendre. Qui sont-ils ? Les Algériens sont des hommes libres. Ils sont ni des gladiateurs ni des kamikazes. Leur défaut est qu’ils sont excessivement opiniâtres et fiers. Ils sont les nouveaux successeurs conscients du grand sacrifice de leurs aînés. Libérés, ils refusent toute forme de soumission aveugle.

Apatride, je ne crois plus à la patrie, à l'hymne et au drapeau. Je crois surtout à l’homme, à sa sauvegarde et à la paix. J’ai décidé de rester à Paris, parce qu’elle foisonne d’hommes de toutes races. Ils sont tous ici. Malheureusement, mon peuple est obnubilé par une fausse vérité. La vérité que les martyrs algériens sont morts pour voir brandir librement notre drapeau multicolore dans le ciel, alors que Émir Abdelkader, Fatma Ensoumer et les autres martyrs avaient combattu l’ennemi pour libérer les jeunes Algériens et pour me libérer. Et aussi têtu que mes frères, je refuse d'avoir un maître mortel au-dessus de ma tête.

Les anciens moudjahidin souhaitaient libérer les Algériens de l’occupation française. Ils combattaient leur ennemi. Et que faites-vous ? Vous faites l’inverse. Vous ciblez nos jeunes. Savez-vous pourquoi les amis de Gandhi ont trahi leur chef spirituel ? Parce que, l'homme est doté d'une mémoire très courte. Le plus dur est de survivre après l’indépendance. Il ne faut pas se tuer et se sacrifier, sans penser à la suite et à l'avenir. Nos parents étaient très dupes de croire que l'année 62 était l’année de leur indépendance. Les enfants de Juillet 62 étaient libérés seulement de la tyrannie française. Comme eux, je croyais naïvement que la guerre était finie. Hélas les moudjahidin, les amis d'hier sont devenus des adversaires. Ils se sont divisés au moment du partage des gains. Chacun d'eux désire s’asseoir sur le trône de l'Algérie libre. En 1965, Ahmed Ben Bella, Président de la République algérienne, fut renversé par Boumediene. Quel était l’intérêt de ce coup d’État ? L'histoire de l'Algérie est aussi inconnue pour nous que notre avenir incertain. Aujourd'hui, mon ennemi ce n'est plus le mécréant blanc, mais le croyant brun. Mes aînés, les frères de sang d'hier ont trahi leur serment oublié et ils m'ont oublié. Ils se souviennent du Français et pas de moi. Comme beaucoup de jeunes Algériens, j’avais l’impression d’être abandonné. Ils me promettaient à l’école que libre, je marcherais la tête haute. Depuis, énormément de têtes sont tombées. Et aujourd’hui, je dois marcher en baissant le regard. Comme s’il n’y avait pas d’espoir à l’horizon.

Sais-tu, l'Afghan, qu'à Paris, j'étais très occupé à surveiller les étrangers ? Les Algériens me disaient tellement de mal des juifs, des Français, des Tunisiens, des Marocains et des Africains, que j'avais peur d'eux. Les miens m'ont tellement mis en garde contre la mauvaise foi des Français que je me méfiais d’eux. Et paradoxalement, j’étais poignardé et trahi par les Algériens. Vous ai-je parlé de leur hypocrisie ? Et de leur extrême jalousie ? À Paris, j'ai croisé des Blédards algériens qui étaient pire que des juifs. Cette fois, je n’étais pas trahi à cause de ma naïveté mais à cause de l’oubli. Paris m’a permis d’oublier ce que les Blédards m’ont fait subir au passé. Jusqu’à oublier la trahison de mon meilleur ami. J’étais à nouveau blessé. Je comprends à présent l’intérêt de toutes ces plaques commémoratives. Les juifs refusent d’oublier pour ne pas se faire pas terroriser de nouveau. J’étais trahi parce que mes frères de sang m'ont tellement dit du mal des autres, que je me croyais en sûreté avec eux. Je ne doutais pas que les fiers et les dignes Algériens pouvaient être cruels. Je me suis confié aux miens, parce que je croyais qu’ils changeraient en venant en France. Faux, l’Afghan ! Ils sont restés aussi avides, perfides et hypocrites qu’avant. En me blessant, ils ont éveillé chez moi, mon désir de vengeance. Personnellement, je règlerai mes comptes avec les Algériens et les Arabes avant de les régler avec les autres. Comme vous, j’ai envie de mener ma propre guerre.

Pacifiste dans l’âme, j’ignore tout sur l’univers de la guerre. Dis-moi, l’Afghan, comment fait-on une guerre ? En premier, il faut la déclarer. Je pence que toutes les excuses sont bonnes ! La guerre se résume-t-elle à des explosions de bombes artisanales ? Non, une guerre se prépare sur plusieurs fronts ! C’est tout un art. Je crois qu’une armée se compose de plusieurs fronts et d’ailes. Et vous voulez que nous soyons tous sur la première ligne. Qui protégera nos arrières ? Vous voulez que nous devenions tous des kamikazes, des talibans et des martyrs. En réalité, vous espérez nous pousser à bout. Vous voulez semer la zizanie, le désordre et l’insécurité afin de pousser les peuples à la révolte. Cette même insécurité aidera les dirigeants à imposer un pouvoir militaire. En réalité, vous aidez vos présumés ennemis. À vos yeux les innocents algériens qui meurent victimes de vos explosions destructives sont des lâches soumis et complices du régime. Mais, l'Afghan, qui vous donne le droit de juger et de terroriser ces hommes et ces femmes ? Même s’ils m’ont trahi ?

Vous ne pourriez, l’Afghan, jamais savoir combien vos attentats m’ont terrorisé. Lorsque j’étais qu’un jeune casanier, vos kamikazes trop égoïstes ne pensaient pas aux autres et à moi. Leur seul souci était de voir leurs âmes s'envoler vers le septième ciel. Sans penser aux conséquences de leur acte, aux malheureuses victimes et à moi. À cette époque, la France à mes yeux était un paradis terrestre plus proche que l’Eden, alors qu’en réalité, il était très difficile d’obtenir un visa d’entrée vers le territoire français. Chaque fois que vous faisiez un attentat en France, je retenais mon cœur de battre. La seule réponse des Français face à vos attaques était de fermer les frontières aux étrangers et aux Algériens. Assoiffé de liberté, j’avais vraiment peur d’être retenu en Algérie. Vous devez comprendre, l’Afghan, que vous n’êtes pas tout seul sur terre. Des milliers de jeunes Algériens rêvent de fuir le chaos algérien. Des jeunes Maghrébins qui défient les lois des hommes et de la nature et n’hésitent pas s’embarquer dans des bateaux de fortune pour atteindre les côtes françaises. La plupart des clandestins arrivent à Paris traumatisés d’avoir vu l’ange de la mort. 

Contrairement aux déclarations de Salman Rushdie, qui prétendait que l’Islam est moins aimé en Algérie et en Afghanistan, j’ai vécu toute ma vie en Algérie et j’ai constaté que les Algériens adorent leur religion. Si j’étais trahi par les Algériens, j’étais surtout trahi par leur nature humaine. Le problème est en premier un problème de relation humaine. Sans oublier que Dieu ne nous a pas facilité la tâche. Je sais que les terroristes algériens et afghans ont mal digéré la défaite imposée en 1990. Vous reprochez au pouvoir algérien de l’époque d’avoir volé le droit du FIS à accéder au pouvoir. Et par conséquence, vous rendez mon peuple complice par son silence et sa soumission à l’ ancien régime. Ne soyez pas surpris, l’Afghan, de me voir en France. Je me suis échappé de l'Algérie pour plusieurs raisons. Une d’entre elles était mon refus du bas rang que m'attribuaient nos anciens moudjahidin. Je refusais de rentrer dans le rang des badernes et de suivre la caravane des plébéiens. J'ai fui l'évolution et la vacuité morale des miens pour redevenir la proie d’un roi, un clandestin, alors que je suis conçu pour marcher sans incliner l’échine. Aujourd’hui, j'ai l'impression d'être un orphelin, un apatride et un hors-la-loi. Drôle de situation et drôle de destin.

Malheureusement, mon pays n'était pas prêt pour moi et à la hauteur de mes ambitions. Comme le kamikaze afghan, j'ai réagi par égoïsme. J'ai renié sans prendre le temps de comprendre qui était vraiment mon peuple ? Et qui était mon père ? Les Algériens sont composé spécialement de parents illettrés et d'enfants lettrés. Et je faisais partie des enfants de l'après-guerre, qui avaient le droit d'aller à l'école. Même si l’école ne nous enseignait pas tout et si parfois nous étions des cobayes aux yeux des ministres de l'éducation, elle m'a permis de m'instruire, d'évoluer et d’évoluer ma vision sur le monde.

Ces années-là, les Algériens manquaient d'expériences et nos aînés étaient des illettrés naïfs. La plupart des élections municipales et présidentielles, nous les faisions sans vraiment savoir l'intérêt d'aller voter. Nous allions voter par peur et par curiosité. Les politiciens prétendaient qu'en cas d'abstention, nous serions privés de nos droits civiques. Par exemple, nous ne pourrions pas retirer un extrait de naissance à la marie. Les politiciens rusés et futiles connaissaient la naïveté des Algériens. Politiquement, nous étions une nation ignorante. Si des étudiants français descendent à la rue et poussent un ministre à démissionner, c'est parce que derrière ces jeunes, il y a des parents qui sont conscients de l’intérêt de gérer l'avenir de leurs enfants. Les Français lisent beaucoup, donc ils sont bien informés sur leurs droits. Que connaissent les Algériens de leurs droits ? Rien, à part qu'ils ont des devoirs envers leur élu. Je refuse de tuer à nouveau mon défunt père, ou le juger comme allié de l’État. Parce que mon père, je l'ai sacrifié gratuitement. J'ai renié mon père, parce qu'il n'était pas un bon croyant. La vie est un choix et j'ai choisi Dieu au lieu du pauvre mortel. J'ai fait de sa vie un enfer et de la mienne un enfer après sa mort. L'amour de Dieu ne m'a pas suffi pour oublier le mal que je lui fais. Mon père était la victime de la France coloniale qui le privait de l’éducation. À ce père ignorant, je dois la lumière qui illumine mon cerveau. Victime de ma propre victime, je suis prêt à éliminer nos vieux démons.

J'ai tué mon père sans lui donner le temps de s'expliquer. Muselé par l'ignorance, mon défunt père ignorait l'art de communiquer et de s'exprimer. Dites moi, l'émir des Afghans, vous qui avez réponse à tout : pourquoi en tuant l'imperfection du défunt, suis-je moins séduit par la perfection du divin ? Pourquoi en dissociant le mal du bien, ai-je toujours du mal à évoquer mon histoire ? Vous me conterez l'histoire d'Ibrahim et de son fils Ismail. Mais je ne suis pas un prophète ! Et les Algériens ne sont pas les Français. Au lieu de terroriser les Algériens et les brusquer, donnez-leur le temps d'évoluer et de s'épanouir intellectuellement et religieusement. Si mon cas est désespéré et que je ne crois plus à la miséricorde, je crois au peuple algérien, un peuple croyant. Ne le culpabilisez pas et ne le terrorisez pas. Nos parents naïfs croyaient que la fin de la fournaise en Algérie, annoncerait le retour du redoux. Ni eux, ni nous n’imaginions qu'après la boucherie le sang brun coulerait à nouveau. Non, l’Afghan ! Ne culpabilise pas mon peuple. Comme mon défunt père, les Algériens ont commis l'erreur de faire confiance à leurs libérateurs. Les héros de la guerre d’Algérie nous ont trahis.

Vous vous êtes demandé avec qui vous vouliez combattre, si vous connaissez très bien vos ennemis. Essayez de connaître vos alliés, avant de les emmener tout droit vers l’extermination. Comme s’il n’y avait pas assez de désastres ! La plupart des pays arabes sont détruits et épuisés par les guerres. Le 25 Mai 2007, j'ai croisé un groupe de jeunes Palestiniens qui faisaient une collecte pour soutenir leur Révolution. À cause de mon teint, une fille du groupe a deviné que j'étais un Arabe. Elle avança vers moi en espérant que je lui offre une pièce pour aider leur mouvement. Je n’ai rien donné ! Je ne donnerai plus un rond. Je ne reste pas indifférent devant le malheur de mes sœurs et de mes frères palestiniens. Je philosophe ! Alors qu'ils sont terrorisés par les Israéliens. Nous nous sentions sages, lorsque nous sommes hors du cercle vicieux de la destruction. Celui qui marche sur le tapis rouge, ignore la souffrance de celui qui marche sur les braises. J'ignore tout des affres d’une guerre armée, mais je connais l’enfer de la guerre froide que mène contre nous le système français. Je vais psychologiquement et moralement le calvaire et mes bourreaux derrière leurs bureaux se moquent de mes souffrances. Certains, avec un sang froid remarquable, me demandent d'entrer chez moi. Les Français se sentent très intelligents assis confortablement devant un tas de paperasses. Alors, qu'otage de l'engrenage, je souffre le martyre. Comme le peuple palestinien, qui depuis des années se bat contre l'envahisseur israélien et l'indifférence générale. Ignorant des arts de la guerre et moins informé sur l'Intifada palestinienne, je cherchais leur intérêt de se battre avec des cailloux et de chanter la bravoure des combattants. Les Palestiniens ne sont-ils pas trompés d'arme, alors que leur ennemi est mieux équipé et en pleine expansion ? Pourtant, Gandhi s'est battu avec le ventre vide et les Français de Mai 68 avec les pavés. Ne faut-il pas battre le feu par le feu ? Et frapper le fer, lorsqu'il est chaud. Non, je ne t'invite pas à allumer le feu. Je suis contre toute forme de violence.

Récemment, j’ai pris conscience de l'importance du leader. Sincèrement, je n'arrive pas à comprendre la raison de l'euphorie des Noirs à Paris lorsque Obama a été élu Président des USA, certains africains ont invité des Arabes à partager leur joie, mais ces derniers ne se sentirent pas concernés par l'élection de l'homme noir. Je n'imaginais pas que des millions d'hommes et de femmes noirs attendaient l'arrivée d'un homme pour les libérer. Suis-je au vingt et unième siècle ? Où j’hallucine, alors que je misais sur la force de l'union. Je découvre que la masse à toujours besoin de son Messie et de son meneur. Les Palestiniens n'ont pas besoin de mes sous, mais d'un Obama arabe. Un homme qui donnera confiance à ce peuple désemparé, opprimé et désorienté par ses conflits intérieurs. Quarante ans après Martin Luther King, les Afro-Américains se réjouissent de voir un nouveau libérateur. La joie des Africains noirs était un événement hallucinant et incompréhensible. Je n'imaginais pas que les Africains étaient si marqués et traumatisés par l'esclavage.

Je suis un pacifiste et j’aimerais que la paix règne sur l’Orient. Certains Algériens interprètent mal mes gestes et mes pensées. Mon refus de donner des sous aux jeunes Palestiniens ne signifie pas mon indifférence à leur cause. Mais à force d'observer les Arabes, j'ai compris qu'ils ne réussiront aucun projet. Je ne donne pas aux perdants ! À Mostaganem et à Paris, j'ai vu de quelle façon les Arabes travaillent. La vraie guerre, il faut la mener contre nous. Il faut nous rassembler et souder nos rangs. Je vais vous raconter une histoire. Lorsque j'étais en Algérie, j'ai voulu apprendre le Saint Coran. J'étais jaloux de ceux qui citaient par cœur les versets célestes. Malheureusement à cette époque mes pauvres parents n'étaient pas des musulmans pratiquants. J'étais parti du bon pied à la petite école de la mosquée de notre quartier. À l'intérieur de la mosquée, j'ai trouvé plusieurs groupes d'étudiants. Et parmi eux deux troupes musulmanes qui ne se supportaient pas. J'étais étonné de découvrir que mon groupe composé d'hommes adultes se chamaillait avec un autre groupe dans la maison de Dieu. Je cherchais l'intérêt d'apprendre le Coran, s'il ne peut dissiper le désaccord entre les musulmans.

Ces musulmans algériens étaient du même quartier, de la même ville et parlaient la même langue.

– Pourquoi des hommes unis au nom de Dieu se disputaient-ils entre eux ?

L'erreur était-elle dans le Coran ? Non, l'erreur était parmi les vicaires. L'Afghan, vous savez qu'il ne suffit pas d'être un musulman et de citer des versets. Le Coran est une lumière, qui illumine ses détenteurs. Un remède, s'il ne guérit pas, empoisonne. Et voilà notre grande faiblesse. Le Coran est souvent entre les mains d'hommes incompétents. La sainte parole du Très-Haut est interprétée par de simples mortels. Des hommes ordinaires ! Leur zèle et leur volonté de se perfectionner ne suffisent pas à faire d’eux des dévots. La plupart de mes frères religieux étaient des adultes dotés d'un esprit très restreint. Ils étaient tous les enfants de l'après-guerre. Ils réagissaient avec un élan de cœur, alors que leur acquis culturel et scientifique était limité. Ces fidèles connaissaient mieux que moi les versets coraniques et pourtant, ils se comportaient comme des gamins. L’Afghan ! Je ne me vante pas et je ne les critique pas gratuitement. Je désire simplement vous expliquer que les récents Arabes possèdent des défauts qu’ils refusent d’admettre. Nous sommes dans une époque où il faut réagir avec intelligence et sagesse. La droite en France a triomphé de la gauche, car les socialistes sont trop humanistes et trop sentimentaux. Le cœur a ses faiblesses et ses limites. La France doit rapidement régler le fléau de l'immigration clandestine de sa racine et le problème de la crise de sa source. Je ne soutiens pas les partis de droite, qui menacent la survie des clandestins, puisque Monsieur Brice Hortefeux a expulsé des milliers hommes vers leur propre enfer. Si je tombe dans leurs filets, je ne serai pas épargné.

Le problème des sans-papiers doit se régler depuis les pays du Tiers-Monde. Toute l’Afrique est dévastée par les guerres et les conflits ethniques. Dans l’absence d’une paix, les Africains noirs et bruns sont obligés de quitter leur continent pour devenir la proie de l’extrême droite. Et la France toute seule ne pourra jamais faire face au grand flux des immigrés. Il faut que nos dirigeants prennent leurs responsabilités et fassent bouger les choses aux Bleds. Pour que nous réussissions notre ascension, nous avons besoin de la paix. Parfois, il faut savoir poser la hache de guerre et oublier nos vieilles rancunes. Il faut remédier à des changements radicaux dans nos rangs et nos façons de penser. Comment voulez-vous que je m'engage dans vos rangs, alors que les musulmans sont divisés. Le Fateh contre le Hamas. Comment voulez-vous que je combatte les juifs et les Américains, alors que les Algériens m'ont fait énormément souffrir. Peut-être je suis malchanceux ? Je suis tombé sur des mauvaises graines. Autant mes frères m'ont blessé, autant je veux les sauver. En réalité, ! Je veux sauver les nouvelles générations d’algériens, les nouveaux venus que j'avais l'honneur d’instruire.

J'étais venu en France pour rencontrer ces hommes modernes. Comme César, j’étais venu, j'ai vu avec l’attention de les vaincre. Mais aujourd’hui, je n’ai plus l’envie d’évincer les Français, surtout après avoir compris qu’ils n’étaient que des êtres humains ordinaires. Et à force d'observer, j'ai compris le secret de leur réussite. Les égaler n'est pas un exploit impossible ou irréalisable. Leur pouvoir ne réside pas dans une potion gauloise magique. La clef de leur réussite existe dans leur éducation et dans leur mental, bien que la société française semble fracturée et les Français soient départagés entre la droite, le centre et la gauche. Même si les socialistes ont du mal à s'unir, alors que d'autres partis ont vu le jour. Les Français savent créer la différence et s'unir contre toute menace extérieure. Ni la crise, ni la précarité ne peut les diviser. Ce qui est remarquable chez les Français est qu'ils se comportent tous comme un seul homme. Même les Parisiens fonctionnent de la même manière. À notre tour d’éduquer nos enfants pour qu’ils deviennent de vrais citoyens, au lieu de faire d’eux des matons qui ne savent qu’imposer la religion en forçant la femme à porter un voile, des hommes aveuglés par l'amour excessif pour Dieu. Au lieu de me séduire, ils me menacent. Ces dernières années, j'ai observé les prémices d'une nouvelle Ère. Mes sœurs algériennes portaient le voile, par conviction et non par obligation, par amour et non par peur. Durant ma misérable vie, j'ai vu des filles se couvrir le corps et se dévoiler sans aucune explication. Et des jeunes hommes qui, après la repentance, revenaient vers la débauche. Une foi vacillante et fragile a besoin de temps pour se forger et s’ancrer dans le cœur.

L'Afghan, laisse le temps aux algériens de changer de leur propre gré. L'être humain est faible et sa courte vie est truffée de tentations. Les prophètes eux-mêmes demandaient l'appui de Dieu. Comment pouvons-nous juger les femmes d'être des pécheresses ? Il faut un temps à chacun de nous afin de peaufiner sa foi. Si notre Prophète (PSL) a reçu sa prophétie à 40 ans, comment pouvons-nous reprocher à une jeune adolescente de ne pas porter le voile ? Un grand nombre de frères et de sœurs sont tellement pressés de bousculer les autres de rentrer dans le rang de l’Islam. Les fidèles sont tellement obsédés par le désir de plaire à Dieu, qu'ils forcent leurs enfants à obéir sans se préoccuper de la nature humaine. Nous avons besoin de maturité et surtout de bonne compréhension de l'Islam. Certaines femmes se dévoilent parce qu'elles n’ont pas consenti à porter le voile. Des proches (père, frère, cousin… et mère) leur ont imposé cet habit de chasteté. Le voile est ôté aussitôt que disparaît un des facteurs menaçants. La religion se dicte par conviction, par compréhension et par amour. Hélas, nous avons besoin de temps pour découvrir ce qu’est notre corps, ses désirs et ses pulsions sexuelles. Si vous poursuivez votre acharnement, vous allez créer le chaos. Vous allez avec vos attentas nous emmener à la situation initiale, quand mon grand-père et mon père vivaient dans l'obscurité de l'ignorance. Les écoles seront détruites et nos enfants seront obligés d'errer dans les rues au lieu d'apprendre, de s’instruire et de s'ouvrir intellectuellement. Nous serons à la tête d'une génération d’enfants illettrés et repliés sur eux-mêmes. Avec votre politique nous allons perdre un temps précieux, face au progrès occidental. L'Islam avant de nous faire sauter la tronche, nous offre la chance de lire et d'écrire.

 

« 96.1. Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé ».

 

Dieu nous a envoyé ses prophètes pour nous libérer et non pour faire de nous des automates. Allah est avant tout une intelligence supérieure, alors soyons à la hauteur de son intelligence. Comment voulez-vous faire une guerre avec des hommes qui souffrent d'une vacuité intellectuelle ? Bien qu’ils connaissent par cœur le Coran. L'Islam est loin d'être une somme d’interdictions imposées à des sourds-muets. Le message de Dieu s'adresse à tous les êtres humains et peut être compris par tout le monde. À Paris, j’ai croisé ces musulmans venus de l'Égypte, du grand Maghreb, du Mali et des îles Comores. Qu'ils soient des clandestins ou des immigrés, ces musulmans sont indisciplinés. Ils courent tous pour ne pas rater la prière du vendredi et qu’ils lisent le Coran ; ces musulmans ne se sont pas solidaires entre eux et honnêtes envers Dieu. Je n'arrivais pas à comprendre comment ils peuvent mentir, tricher, voler et entrer à la mosquée. La différence ethnique l'emportait sur leur appartenance religieuse. Comment voulez-vous faire une guerre avec des Africains musulmans qui ne s'aiment plus ? Les musulmans contemporains souffrent des préjugés d'hier. Les musulmans ne savent plus contenir leur rage et leur angoisse.

En Algérie, je garde l'image de deux imams. Je préfère le jeune imam au vieux prêcheur. Le jeune imam était un homme contemporain diplômé. Ses sermons étaient expliqués scientifiquement et avec un langage moderne. Je l'ai croisé plusieurs fois au cybercafé. Comme les jeunes de mon âge, il faisait des recherches et se documentait. L'ouverture vers le Proche-Orient a aidé les Maghrébins à s'enrichir religieusement. À l'opposé était l'autre, le vieil imam, qui nous lisait inlassablement les messes des années passées. J’écoutais le vieux lire ses partitions chaque vendredi en bâillant. Cet imam algérien connaît mieux que moi l'Islam et ses préceptes. Mais ses connaissances n'ont pas suffi à nous rapprocher de lui. Aujourd'hui, le 26 mai, j'ai croisé un vieil homme qui lisait un livre islamique. Cet homme noir, portait tous les accessoires que devait porter un musulman : une barbe, une longue tunique et une calotte. Cet homme assis devant moi lisait son livre ouvert, où je pouvais lire le nom de notre Prophète. Mais ce musulman ne pouvait s'empêcher de regarder les femmes qui passaient à côté de lui et celles qui descendaient du tramway. Les versets coraniques n'ont pas pu l’empêcher de regarder les femmes avec désir et convoitise. La faille est-elle dans le Saint Livre ? Où est-ce la faute des femmes qui exhibent leurs charmes ? Les hommes n'hésitent pas à sortir le verset, qui les innocentent et condamnent les tentatrices. Les histoires des prophètes Adam et Josèphe ont une mauvaise répercussion sur la réputation des Ève actuelles. Combien de fois ai-je entendu les Algériens défendre leur faiblesse et condamner celle des femmes. Ils les accusent d'être l'objet de leur tentation. Toujours, l'homme se disculpe et s'innocente. Alors qu'il était tout le long de l'histoire son partenaire idéal et son complice. L'homme est trop égoïste pour reconnaître ses torts. Même en Mai 68, les femmes françaises insistaient à faire entendre qu'elles refusaient la présence d'un seul homme dans leurs rangs. Les Françaises voulaient manifester toutes seules. Vous savez pourquoi ce vieux religieux regardait les femmes ? Ce n'était pas parce que les femmes étaient des pécheresses et des diablesses. La vraie cause était que l'Islam était devenu un sujet monotone pour ces hommes. La femme reste une excuse et un bouc émissaire. Aux yeux des fidèles, l'Islam signifiait des interdits et un parcours de vie sans le moindre plaisir. Ces hommes sortent surtout des écoles coraniques traditionnelles. Ces fervents croyants s’asseyaient au premier rang derrière l'imam et ils étaient les premiers à marcher derrière le tombeau d'un mort. L'Afghan, vous savez très bien que Dieu les a évoqués dans son Saint Coran. Ces hommes ont un double visage. Mais qui blâmer ? Leur hypocrisie, leur vice, leur nature humaine ou peut-être ces hommes étaient-ils voués à l'échec ? Où est-ce l'incapacité du Coran de purifier leurs cœurs impurs ? Où faut-il voir notre méthode d'éducation ? Le défaut des écoles coraniques traditionnelles est que l'homme est isolé de la femme, qui reste une créature mystérieuse pour lui. Dès qu'il voit l'objet interdit, ses yeux s'instillent et son cœur bat la chamade. Je sais, l’Afghan, les Parisiens ne sont pas des moines et pourtant ? Ils ne résistent pas à l'envie de lécher des yeux n'importe quelle femme, quel que soit son âge. Les Algériens n’ont plus ne se privent pas de les regarder. Pourtant, ce même phénomène, je l'ai remarqué chez des filles paysannes. À la compagne, de fraîches nubiles me regardaient avec convoitise et me lorgnaient comme un bonbon qu'elles espéraient voir fondre sous la fournaise de leurs lèvres. C'était presque du harcèlement. Déshabillé par leur regard, je me sentais protégé par un fin rideau qui me séparait d'elles.

Quel châtiment méritaient-elles ? Avant tout jugement hâtif, essayons de comprendre la nature humaine. Ces campagnardes vivaient cloîtrées dans l'interdiction de mettre le nez dehors. L'isolement attisait leur curiosité et l'homme devenait un secret et un mystère. Dès qu'une fille se retrouvait devant un homme, elle était allumée par une seule envie de le connaître. Les filles étaient séparées des garçons. Elles ne devaient ni leur adresser la parole, ni lever le regard vers eux. Parfois, les parents n’expliquaient pas la raison de cette mise en garde. Chaque parent devenait un surveillant et un rempart entre elles et les doms Juans. La peur des interdits disparaît naturellement après l’absence d’une surveillance rapprochée. Les filles libres profitent de l'occasion pour explorer cet autre inconnu. Faut-il interdire la mixité des établissements scolaires et isoler les filles des garçons ? Jusqu’où pouvons-nous aller pour séparer la fille du garçon ? Comment protéger l’homme de la femme, alors qu’elle était conçue pour lui ? Ce problème de la relation homme femme est très compliqué. Il est le plus compliqué de tous.

Nos parents avaient-ils pris le temps de nous expliquer, pourquoi Dieu nous a interdit de fréquenter une autre personne du sexe opposé ? Non, je sais juste qu'il était inconvenant de parler avec une fille. De même, les filles étaient isolées des garçons sans une explication à cette réticence envers le mâle dominant. Enfants, nous ignorions tous et toutes la vraie raison de tout cet affolement. Pourquoi ? Parce que tout simplement nous étions trop innocents et incapables de voir le mal. Les garçons étaient obligés de surveiller leur verge et les filles de protéger leur virginité. Il est très facile de culpabiliser la muse et de la traiter de l'objet des tentations. L'homme est aussi un sexe faible.

Pourquoi combattons-nous ? Et nous combattons qui ? Croyez-vous que nous réussirons à sauver la race humaine ? Croyez-vous que si le bien triomphe, le mal disparaîtra ? Je doute que les fidèles puissent réussir à créer une civilisation islamique parfaite, puisque la perfection n'est pas de ce monde et Dieu a libéré Satan dans l’arène. L'histoire des grandes civilisations et de la civilisation musulmane le prouve. Aucun prophète n'a réussi à sauver l'homme de sa noirceur intérieure. En Occident, nous connaissons les inconvénients de la liberté sexuelle et la prolifération des réseaux pédophiles.

Malgré leur évolution, les Français tournent en rond. Je devais assister durant la nouvelle année 2008 aux rituels des années précédentes et de la suivante. Au fur et à mesure de moisir en France, les Français ne me surprennent plus. Le programme de cette nouvelle année ressemble aussi à celui des autres années. La journée Sidaction est l’occasion aux Français de se rappeler des ravages du Sida. À la sortie du métro Courneuve, je retrouve à nouveaux ces militants autours d'une table en train de distribuer des prospectus afin de sensibiliser les gens au danger du VIH. Une jeune fille, en me remettant un paquet de petits livrets, me remet aussi un préservatif ! Bien sûr, j'ai gardé les livres et je lui rendu la capote. La vraie prévention est d'avoir une bonne éducation sexuelle, en reconnaissant ses propres faiblesses de mortel. Les Occidentaux croient que les musulmans boudent le plaisir et les joies de vivre, alors que l'Islam nous apprend comment contrôler nos désirs sexuels. Comment pouvons-nous choquer les Occidentaux par notre assiduité et notre attachement à notre ligne de conduite disciplinée ? S'ils exigent d'eux de la rigueur et de la discipline. Les Français ne marchent pas avec le fouet, mais avec des amendes. La plupart respectent le code de conduite par peur d'être pénalisés. Aujourd'hui, nous connaissons la raison des interdits parentaux. L'épidémie du Sida a emporté des vies entières et ne cesse d’en détruire d'autres. Encore les journalistes se réjouissent-ils de faire des reportages sur des femmes et des enfants séropositifs, en Inde et en Afrique, sans qu'un seul d'entre eux ait le courage de s'attaquer à la source du mal. La France du Solidays et des sondages nous annonce encore, sous la tutelle de Jeanne Moreau et Madame Carla Sarkozy, les nouveaux chiffres des dernières victimes du fléau. À quoi servent ces chiffres, ces reportages et cette mobilisation massive ? À sensibiliser les jeunes et leurs dire que le VIH est encore là. La capote n'a pas suffi à amoindrir la force du monstre. Ou peut-être les Français sont-ils trop égoïstes pour régler d'une façon radicale ce fléau ? Il faut réfléchir à changer notre comportement. Parallèlement, si nous voulons sauver le monde, nous devons changer notre mode de consommation. Malheureusement, nous sommes devenus trop matérialistes pour pouvoir renoncer à notre petit luxe. Nous feignons le civisme et l'honnêteté.

Il faut mesurer ses mots au pays de la liberté. Les Français n'ont pas épargné le pape Benoît XVI durant sa visite en Afrique. Le sexe est-il un tabou ? Non, le tabou existe dans les têtes des Français. J'ai vécu en Algérie et les hommes ne pensaient qu'au sexe. Les Algériennes possèdent aussi leur langage cru lorsqu’elles abordent la sexualité. L'Islam nous apprend à prononcer nos sentiments et nos désirs avec plus de délicatesse et de réserve. L'interdit existe pour une raison et la punition est sa derrière solution. Il faut conditionner notre société pour protéger la femme victime de la courte mémoire des enfants d'Adam. L'homme oublie très souvent qu'il est le fruit d'une femme. D’ailleurs, certains musulmans se souviennent des versets élogieux concernant les charmes d'Ève.

L’honnêteté est la première règle à nos problèmes. Je ne suis pas contre les élèves des écoles coraniques. Mais contre les œillères qu'ils sont obligés de porter. Certes les Occidentaux nous ne laissent pas le choix de changer notre vision sur le monde. Comment pouvons-nous réduire un Haut Créateur à un petit rôle de maton ? Dieu est l'intelligence supérieure qui a créé l'univers, la Terre avec ses océans et sa faune. Nous devons évoluer pour être à la hauteur de l'intelligence divine, alors que la plupart des musulmans savent à peine écrire et lire. Ils sont isolés dans la vision unique d'un Dieu maton. Les taliban existent aussi en Algérie et partout dans le monde. Leur défaut est qu'ils possèdent une vision restreinte sur le monde comme notre imam du quartier. Il était un homme qui ne renouvelait pas ses connaissances et son monde à lui ne dépassait pas les frontières de notre cité. Ces gens sont-ils dangereux pour l'Islam ? Il est facile de condamner. L'Afghan, évitons d'imiter la politique française du tri et de l'exclusion. En France, il n’y a plus de place pour les retraités, les handicapés et les SDF. Les Français sont tellement obsédés par l'idée de redorer l'image de la France aux yeux du monde. Qu'ils sont pressés de trouver de nouveaux adeptes, de jeunes robustes et rentables. L'excès de leur prosélytisme m'effraie. Qu'ils n'hésitent pas à exclure n'importe quel être humain, jugé moins rentable. Les prisons françaises sont tellement surchargées, que certains détenus se donnent la mort. Au lieu d'exclure nos vieux imams et de les guillotiner, nous devons accepter la faiblesse de l'autre et déduire les raisons de chaque anomalie.

L'Islam se limite des gestes machinaux et à des prosternations, des inclinaisons gestuelles. Les pratiques religieuses restent sans aucun fond. Nous sommes devenus des comédiens. Les pratiques religieuses sont réalisées pour fuir les châtiments et non par compréhension et par respect à Dieu. Je me souviens encore de ce jeune homme algérien, qui refusait de reprendre ses études universitaires parce que, selon lui, les professeurs étaient des tyrans. J'ai fait mes études à l'université d'Oran et certains professeurs étaient des obsédés sexuels. Les cités universitaires des étudiantes étaient devenues un lupanar et un lieu de rendez-vous.

Que faire ? Devenons-nous fermer les universités ? Brûler les tyrans et lapider les putains ? Combien avons-nous punis de perfides et de putains à travers l'histoire ? Un nombre inestimable. Et pourtant, la situation n'a pas évolué depuis. Le mal parvient toujours à attirer de nouveaux adeptes. Rejeter l'autre créera un creux et un fossé entre les souches sociales. Comme les deux groupes de frères qui ne se supportaient pas. C'était intolérable et incompréhensible de voir une telle mésentente à l’intérieur d’une mosquée. Nous sommes tous devenus des têtes brûlées. Comme les Français qui ne veulent pas patienter et essayer de comprendre. Ils ne savent que condamner et allumer le bûcher. L'Afghan ! Regardez juste Monsieur Sarkozy qui court partout. Cet homme est tellement pressé de tout réussir durant son quinquennat. Il veut être sur tous les fronts à la fois et refaire le monde à sa vision. Comme si je n'existais pas. Ces hauts supérieurs réagissent parfois avec arrogance. Et sans le savoir, je me retrouve la proie de la clandestinité. La clandestinité est une mystérieuse situation. Je n'arrive toujours pas à croire qu'une telle situation inhumaine puisse exister au pays des droits de l'homme. Tout à coup, je me retrouve la cible d'une histoire qui me dépasse par sa complexité, sa longévité et son originalité. La différence entre toi et moi, c’est que je ne livre pas de vrais combats. La menace existe, sans que je puisse affronter mes adversaires et me défouler. Vous ! Vous pouvez extérioriser votre colère en vidant votre chargeur. Moi, mon ennemi me torture de loin. Je mène une guerre de nerfs, une guerre froide et ma colère et mes angoisses pèsent sur moi.

Après plus de trois ans de vie marginale, Messieurs Sarkozy et Eric Besson ne sont plus devenus mes ennemis. J'ai trouvé pire qu'eux : les clandestins ! Ils sont plus dangereux que tous mes autres soi-disant ennemis et pire que mes faux patrons. Sans les fameux papiers, j'ai le sentiment de ne plus exister. Même Paris, la vieille capitale a le blues. Amèrement et désarmé, je découvre que les Français m'ont menti et que les méchants sont les gentils dans l'histoire. À Paris, j’ai fait la connaissance des mutants, des Masaïs en costards et d’une nouvelle race d'Algériens. Une race qui cache sous ses faux-semblants de fierté un gisement de mauvaise foi.

Je refuse de nommer « ennemis » ceux qui ne partagent pas ma religion et ma vision du monde. La terre est ronde et peuplée par les mauvais et les bons. Comment voulez-vous que j'écoute les prières de notre imam qui critiquait et maudissait les juifs ? Avant de critiquer les défauts des autres, soyons honnêtes et soignons les nôtres. Et ne me demandez pas de porter un glaive et d'aller tuer le premier juif que je croiserai sur mon chemin. Si le juif est notre ennemi, il n’est guère le mien. Comment pourrais-je tuer un homme que je n'ai jamais vu ? Et pourquoi les hommes sont-ils tellement pressés de nous bousculer et de nous dresser les uns contre les autres ? Qu'ils me laissent au moins le temps de me connaître et de mieux connaître le judas. Mon vrai ennemi, je le connais très bien et il ne porte pas une kippa noire. Cautérisé, je porte toujours la marque de sa haute trahison. Durant mes trois ans de clandestinité à Paris, je n'ai connu que deux juifs. Pourtant, ils ne m’ont fait aucun mal. Mes chers ennemis étaient la plupart des Algériens, des Arabes musulmans et des Africains. Ma défunte grand-mère était exploitée par sa propre sœur, mon défunt père était exploité par son frère et j'étais trahi par mon meilleur ami. Les pires défauts se trouvent chez les Arabes : l'hypocrisie, l'égoïsme, l'avarice et la sorcellerie. Vous ai-je parlé de la maladie de la jalousie chez les Arabes ? Elle est dévastatrice et cruelle.

Je ne peux attaquer les autres et les rendre coupables de nos défauts et de nos faiblesses. Je ne peux pas attaquer des gens, sans essayer de comprendre l'histoire du début. Si l'histoire de l'humanité est si compliquée, l'histoire de chaque individu est similaire à tant d'autres. Et combien d'innocents ont été sacrifiés inutilement ? Comme le cas du jeune Halimi. Si nous voulons comprendre, nous avons besoin d’une paix et apprendre à aller au-delà de nos rancunes. Rejeter et renier l'autre le poussera à s’isoler. Au lieu d'investir dans notre réticence envers mon soi-disant ennemi, essayons d'étudier ses défauts et les différentes facettes de sa personnalité. Il s’agit d’un peuple et non, d’un seul individu. Dans le film le message de Moustapha Akkad, nous voyons notre Prophète (PSL) recommandait à un groupe de musulmans d'aller se réfugier en Éthiopie : « Allez en Éthiopie dont le roi ne commet jamais d'injustice. » Arrivés à destination le Négus répond à Djafar : « Ce que tu récites et ce que Jésus avait dit sortent certes de la même niche. Allez-y, je ne vous livrerai jamais à ‘Amr et vas-y ‘Amr, je ne te les livrerai jamais. » Nous voyons d'après cette immigration vers l'Éthiopie que la chrétienté a participé à l'expansion de l'Islam. Dans le film, le Négus traça avec sa croix une ligne dans le sable, qui signifiait selon lui la mince frontière qui séparait l'Islam de la chrétienté. Certes, il existe entre les hommes de ce bas monde des différences. Malheureusement, nous croisons ce trait de différence et nous faisons de cette ligne une tranchée, un fossé et un mur qui divise les mortels.

Sache, l’Afghan, que j’avais vu le jour en Algérie et dès ma réception, mes aînés ne s'attardèrent pas à m'initier aux rituels religieux. Ils me donnèrent mon paquetage et me mirent une œillère afin d’avoir une vision verticale d’un monde hiérarchisé. Au sommet de l’arête, Dieu trônait par sa sublime suprématie et à la fin les judas s'enfonçaient vers le bas attirés par le poids de leurs péchés. Avant l’initiation, j'avais une vision idyllique et infantile sur la vie. Musulman, je connaissais les juifs que d'après les anciens récits. À la moindre occasion et prétexte, mes aînés justifiaient nos échecs par la puissance de la ruse des juifs. Pourtant, Dieu était de notre côté et non du leur. Puis, je suis arrivé à Paris comme un âne chargé d'âneries et de visions restreintes sur le Français et les Occidentaux. Comme quoi l'athée était un animal parlant sans morale. Savez-vous quelle est la différence entre le Parisien et les immigrés ? Malgré ses défauts, Monsieur L était le seul homme qui avait du remords. J'ai jamais vu un immigré s'excuser pour une faute qu'il avait commise à mon égard. Savez-vous pourquoi ? Parce que personne ne leur a appris à reconnaître leurs torts. Les Algériens sont aussi trop fiers pour admettre leurs erreurs. Les Arabes accusent toujours Satan, les juifs et les colons français.

D’une autre part, l’Afghan, mes aînés n'ont pas tout à fait menti, puisque les Français, je les connaissais auparavant à travers l'Internet. En Algérie, j'étais choqué par leur violence et l'âpreté de leur langage. Dans l'anonymat et cachés sous des pseudonymes, les Français excellaient dans l'art de la vulgarité. Je les ai vus à l’œuvre. Je ne les ai pas vus bombarder et raser des villes. Mais comment avec une grande charge d'agressivité, ils ont réussi à détruire des sites virtuels. Ils cachent un fond d'hypocrisie inoxydable, derrière leur pâleur passive et leur sourire sournois. Qui connaît mieux les défauts des Arabes ? Un Arabe. Et qui peut mieux parler des Français ? Un Français. Et des Français honnêtes m'ont mis en garde contre d'autres Français et contre leur système.

Dans un RER, j'étais attiré par les slogans de deux affiches. Le premier slogan de la mutuelle familiale était « chez certains, il vaut mieux être jeune, riche et en bonne santé : à la mutuelle familiale en fonction de l'âge. » Et le deuxième du site priceminister.com était « Devenez radin ». Les deux slogans montrent bien que les Français connaissent très bien les défauts de la société française. Par contre, en Algérie, les Algériens nous parlent des défauts des Occidentaux sans évoquer les leurs. Les horreurs commises par les colons français contre les Algériens ont facilité à nos historiens de salir l’image des Français et à souiller leur mémoire. Les Français étaient décrits comme des hommes sanguinaires et sans morale. D’ailleurs, à Paris, j’ai rencontré ces bouchers blancs. Et je me suis demandé si mes aînés n’avaient pas exagéré dans leur description. J’ai vécu avec les Parisiens durant trois années et aucun d’eux ne m’a agressé. Curieusement, ils venaient se plaindre à moi de leurs mauvaises conditions de vie.

Certains de ces Parisiens sont des malades, des handicapés, des sans-abri, des vieux et des jeunes pacifistes. Je croyais que dans une société technologiquement et scientifiquement moderne, tous les citoyens étaient en bonne santé. Contrairement aux dieux des stades, les misérables Parisiens ne sont jamais montrés sur le papier glacé des magasines. Il faut cesser de croire que tous les Français sont des athlètes et des mannequins. Au fur et à mesure, je prends compte de la réalité des Français et des Parisiens. Durant ma première année, j'e suis parti à Carcassonne afin de rencontrer les écrivains et les poétesses français. J'étais très étonné de ma découverte. Je les ai entendus et observés durant cette courte soirée. Au lieu de rencontrer des dieux, j'étais face à des hommes, des femmes et des enfants. Les Français sont des êtres humains comme moi et vous, l’Afghan. Il y a qui possède un grand cœur, il y en a qui possèdent un cœur d'artichaut et d’autres un cœur de pierre.

À Paris, j'ai touché le fond du fond. Clandestin, j'étais obligé d'errer dans les dédales de la France d'en bas. Contrairement, à ce qu'ils veulent nous faire croire. J'étais choqué par le nombre des pauvres à Paris. Paris elle-même est une ville usée par le temps, taguée et défigurée par les rouilles et les plaques commémoratives. Malheureusement, l’Afghan, les Français nous ont menti depuis le début. Sans aucun scrupule, ils persistent à mentir et à exporter le mythe de la supériorité de la race blanche. Les Français jouent avec nous, le jeu de la dissuasion. À force de projeter une mauvaise idée sur nous, ils veulent nous convaincre de notre infériorité et nous décourager. Depuis, les années 90, les Occidentaux nous promettent d'aider les pays sous-développés, alors qu’en réalité, ils sont très malhonnêtes tout en prétendant sauver le monde. À présent, je découvre qu'en plus des Africains, les Français sont aussi pauvres. À cause de la crise mondiale ? Non l’Afghan, ! C’est avant même que la caisse de l’État ne soit vide. Les Français nous ont caché l'existence des pauvres, des handicapés et des misérables. Déchu de mon rang d'être humain, j'étais obligé de travailler au noir en plein jour. Et j'ai fait la connaissance de Jean-Marc, William et Serge. Sont-ils des soldats ? Ils sont de braves éboueurs. À chaque fin de travail, ils viennent pour nettoyer les marchés. Ces Français de la France d'en bas sont d’honnêtes citoyens, des hommes qui travaillent dur dans l'ombre des politiciens et dans des conditions insupportables. Ils nettoient sous la pluie et le froid. Jean-Marc, William et Serge me rappellent mon petit frère, mon grand frère et mon défunt père. En réalité, il n’y a pas une grande différence entre les Algériens et les Français. Les six hommes travaillent et se brisent l'échine pour gagner leurs vies honnêtement et pour nourrir leurs enfants. Malheureusement, les historiens ne retiendront jamais le nom de Serge ou d’Abdelkader. Parce qu'en Algérie et en France, selon eux l'histoire est faite par les grands hommes. Je ne suis pas étonné d’entendre retentir les mêmes noms : Bush, Sarkozy, Bouteflika, El Kadafi et récemment Obama. Même votre prénom Ousama revient après chaque attentat.

Je ne suis pas étonné de l'excès de l'égocentrisme chez la plupart des supérieurs hiérarchiques. Les privilèges d’un pouvoir ou d’un haut poste font oublier que le monde appartient aussi à ces petits hommes sans voix. Ces éboueurs frustrés de se retrouver en bas de l'échelle sociale sont tellement complexés, qu'ils me tournent le dos pour éviter mon regard. L'Afghan, comment pourrais-je tuer Serge ? Cet homme a l'âge de mon défunt père. C’est un Français et sûrement, il ne croit pas à l'existence de Dieu. J’aimerais tant le tuer ce païen pâle et l'effacer de ma vue, tellement je ne supporte plus son ingénuité, sa banalité et sa simplicité. Hélas ! Serge et une grande partie des Parisiens font partie de la France d'en bas et ils ne sont pas représentatifs du grand civisme et de la suprématie occidentale. J’aimerais tant tuer Serge pour vous faire plaisir l’Afghan ! Mais Serge me rappelle mon défunt pauvre père, que j'avais renié et exclu de mon cœur parce qu'il n'était pas un parfait musulman à l'image de la perfection divine. J'ai tué mon père, l'illettré avant même de le comprendre et d'écouter son histoire. J'ai tué le regretté orphelin. J'ai craché dans la main de celui qui m'a permis d'entrer à l'école et de m'instruire. Aujourd'hui, je refuse de perpétuer le gâchis. Le sacrifice de Serge l’éboueur ne m'apportera rien, puisque je n’ai rien gagné de la disparition de mon géniteur. Mon père, le mauvais croyant était aussi la victime de son époque. Nous culpabilisons les êtres humains et nous les tuons, sans tenter de comprendre les conditions de leur évolution.

J’aimerais tuer deux ou trois juifs pour faire plaisir à Dieu et à vous. Mais je ne peux pas tuer des hommes de sang-froid. Ils doivent me provoquer et me donner une raison de les massacrer. Pourtant, à Paris, aucun juif ne m'a agressé. Peut-être parce que j'étais tout le temps entouré par des Arabes et des Maghrébins. Bizarrement, chaque fois que je croisais un juif sur mon passage, je sentais une montée de dégoût qui m'éloignait de lui. Comme si nous étions porteurs de deux charges électriques opposée l'une à l'autre. Je n'arrive toujours pas à maîtriser mon aversion pour lui, alors qu’en réalité, je n'étais agressé et envié que par les Arabes. J’aimerais signer un pacte avec vous, l’Afghan. Vous pouvez combattre les juifs en me laissant le soin de les étudier. Enfin, ne les tuez pas tous ! Paraît-il, il existe douze tribus juives. Vous combattez six tribus et j'étudie les six restantes. J’aimerais tant connaître ces mystérieux juifs… !

Moi, je sais très bien avec qui je dois régler mes comptes. Savez-vous, l’Afghan, qu’au début, j’ai décidé d'écrire mon livre pour défendre les clandestins ? Les Français prétendent aller combattre l'injustice des taliban en Afghanistan, alors qu’en France les clandestins sont les premières victimes de l'injustice de l'homme blanc. Vous ne pouvez imaginer l'ampleur du drame et de la catastrophe humaine. Moi-même, le clandestin, je n'arrive pas à croire ce que je vois. Ici, il y a ni soldats ni bombes ni cadavres entassés sur les trottoirs. À Paris, la Kaboul européenne, nous sommes des cadavres ambulants. Les clandestins sont les proies de l'indifférence générale et des rafles policières. Comme les mendiants gitans, nous faisons partie du décor parisien. Vous ne pourriez imaginer la gravité de notre situation. À Pariboule, nous sommes devenus des maboules menacés par les expulsions massives. C’est une façon nouvelle de nous exécuter sans faire couler le sang. À Pariboule, il y a la peur des expulsions et des attentats. Vos attentats ? Oui, l’Afghan, après chaque attentat terroriste, le gouvernement français redouble de sa vigilance. En réalité, l’Afghan, vous n'êtes pas si différents de vos ennemis. Après chaque alerte à la bombe, je dois modifier mon planning et mon parcours habituel. Je dois éviter les policiers dans les stations de métro et les grandes gares. Au lieu de prendre mes raccourcis habituels, je dois prendre des longs chemins. Certains hommes critiquent souvent ma naïveté. Et ils ont raison ! Je me fais toujours avoir, parce que je ne suis pas assez méfiant. Si les juifs ont accroché sur chaque coin de Paris une plaque commémorative de la Shoah, c'est pour ne pas oublier. Et moi, j'ai tendance à oublier. Malheureusement, mon pardon n'empêche pas les autres de me blesser à nouveau. Sincèrement, mon premier désir était d’écrire pour défendre les clandestins. Mais les trois ans d'enfer passés avec eux m'ont poussé à changer d'avis. J'ignorais que les clandestins algériens et maghrébins pouvaient être violents et perfides. Pourtant, leur foi ne les empêche pas de mentir, de voler et d'aller chez la prostituée.

Que fais-je à Paris ? Je me suis posé cette question chaque fois que je voyais les Parisiens et les touristes en famille. Comme la plupart des Blédards, j'étais séduit par la civilisation occidentale. J'étais venu en France pour étudier. Alors, regarde ce que nous sommes devenus ! Toi, un terroriste de renommée internationale et moi, un clandestin vivant dans l’anonymat. La seule différence est que moi, je n'ai pas choisi la marginalité. Peut-être toi aussi, ils t'ont forcé à devenir un renégat.

Le mois de décembre de l'année 2008 s'annonça très glacial. Plusieurs sans-abri moururent de froid. Actuellement, leur mort est devenue un sujet quotidien et fait partie des verbiages parisiens. Les sans-abri sont à chaque saison hivernale un prétexte pour des politiciens de promettre des solutions rapides. En attendant des logements sociaux neufs, ils seront logés temporairement dans des foyers. D’ailleurs, parler des SDF est devenu le feuilleton préféré des médias. Les journalistes français ne sont jamais à court d'informations. Parfois, c'est la panne ! Et il faut occuper les lecteurs français. De quoi parlent-ils ? Lorsqu'il n’y a plus d'attentats terroristes, de viols, de vols ou d’incendies, puisque l'hiver, les pédophiles et les malfaiteurs préfèrent le passer à l’abri en prison. Ils ont raison : dehors, il fait un froid de canard. Les journalistes français, l'hiver, aiment nous parler des catastrophes naturelles. Ils parlent tellement vite qu'ils oublient qu'ils nous ont déjà parlé auparavant des avalanches, des inondations et de la colère phocéenne.

En janvier de l’année précédente, des centaines de foyer étaient privés d'électricité, d’eau et de téléphone dans le Sud-Ouest de la France. Et quelle en était la cause ? Une météorite est-elle tombé sur la France ? Non, l’Afghan, la cause du désastre naturel était Klaus. Est-ce un kamikaze ? Non, Klaus est une tempête. Si l’Espagne, l’Italie, le Portugal et la France sont impuissants devant le déchaînement des éléments naturels, que font-ils en Afghanistan ? Où est-elle, leur rigueur face aux intempéries ? Ces Français me surprendront toujours. Ils veulent imiter les Américains, qui croient pouvoir dompter un jour le Tigre. Ces soi-disant Américains qui se montrent vulnérables devant Katrina, Rita et les flammes des incendies. Oui ! Les Américains sont très forts. Ils ont réussi à déposer le régime dictatorial de Saddam Hussein. Alors pourquoi n'arrivent-ils pas à mettre la main sur une bande de terroristes afghans ? Comment les alliés sont-ils parvenus à envahir l’Irak alors qu’ils n’arrivent pas à te capturer ? Je crois qu’ils te laissent libre juste pour avoir l’excuse de me traiter de terroriste.

Pourtant, les Américains savent où vous habitez. Vous au moins, vous n'êtes pas obligés de déménager. Parce que moi, le clandestin, en plus de quitter mon continent, j’étais obligé de changer chaque fois de cachot. À Paris, je courais d’un taudis à un autre. Habiter une grotte, ce n'est pas un luxe ! Je sais l’Afghan, Mais au moins vous, vous habitez au rez-de-chaussée et vous ne payez pas de loyer pour dormir dans une chambre de bonne au sixième étage et sans ascenseur.

Le fait de découvrir que les Français possédaient de belles qualités, m’a poussé à me demander une chose. Les juifs sont-ils tous mauvais ? Je venais de discuter avec un ami clandestin, d'origine algérienne sur des points d'interrogations :

– Les juifs de notre époque, sont-ils coupables des fautes de leurs parents ?

– Dieu est-il responsable des différences entre les juifs, les chrétiens et les musulmans ?

– Les croyants ne sont-ils pas des hommes égoïstes ? Et ne réagissent-ils par intérêt personnel ?

Ce jeune Blédard me disait ce que j'avais déjà entendu chez d'autres Arabes : que j'étais influencé par les Occidentaux et que je devais avoir peur de l’impact de mes pensées noires. Il souligna d’un trait rouge mes points d’interrogations. Pour lui prouver que je craignais toujours Dieu et que j'étais toujours un vrai musulman, je lui rappelai le matin où nous avions croisé un groupe de vagabonds. Des garçons et des filles, habillés avec les couleurs de l'arc-en-ciel et qui marchaient à travers la France. Nous les croisions au marché en train de ramasser des fruits, alors que je discutais avec une fille du groupe sur le sens de leur mouvement ; mon ami n'arrêta pas de la toucher, de la caresser et de l’embrasser. La demoiselle gênée le repoussa et lui demanda de cesser ses harcèlements. Je lui rappelai que je n'avais pas touché à la fille, alors que lui, l’excité n'avait pas hésité. J'ai respecté les limites de Dieu et non lui, l'hypocrite. Je ne suis ni un saint, ni un hypocrite.

D’autres amis clandestins prétendaient que je travaillais honnêtement pour mes bourreaux, parce que j'étais mieux payé qu’eux, alors que je refusais simplement de tricher parce que Dieu n'aime pas les tricheurs. Donc, c'est pour ça que Dieu n'aime pas les juifs. Ils sont des tricheurs ! Aujourd’hui, tout le monde triche. Les Marocains, les Tunisiens, Les Égyptiens, les chinois et les Français. J’ai vu tellement de gens voler en France que je me demandais comment ce pays arrive à tenir debout. Les Algériens de France aussi ne se gênent pas pour voler les magasins parisiens. J’ai décliné leur invitation à voler avec eux ou à acheter leurs produits volés. Je refuse de participer au pillage au nom du passé. Pourquoi volent-ils ? Chacun a ses raisons et sa logique. La plupart se vengent des Français qui les exploitent encore et les discriminent. Une partie ne supporte plus le poids de l’éloignement et de vivre loin de leurs siens. Une autre partie déracinée souffre du poids de l’injustice et de la clandestinité. Les immigrés expriment la violence de la séparation de leur patrie en dévalisant les rayons des magasins. Pourquoi volent-ils la France qui a donné un toit, un travail, et un avenir à leurs enfants ? La France leur a donné des solutions et des soucis en plus de leur nostalgie du pays d’enfance. Les Français m’ont volé aussi avant et après ma venue à Paris. Je refuse de voler et de gagner mon argent malhonnêtement.

Aujourd'hui, l’Afghan, je n'essaye plus d’impressionner les Français après avoir découvert leur réalité. Au contraire, j'attends qu'ils m'impressionnent et qu'ils me surprennent. Depuis que j'ai compris que Paris n’est belle que dans l'esprit de ceux qui ne la connaissent pas, je n'ai qu'une envie : briser leur mythe. Comment pourrais-je gommer le mythe de la suprématie française ? En déclarant la guerre à la France ?

Tes fou, lAfghan ! Je ne suis pas un soldat. Je peux t’entraîner et t’apprendre les arts du combat ! Et faire de moi un gladiateur moderne ! Un terroriste ? Tu seras le nouveau Oussama et ton nom résonnera partout dans le monde ! Tu seras célèbre et tu verras ta vidéo sur les chaînes de télévisions et sur le site YouTube. C’est ma photo que je verrai accrochée sur les murs avec un mot : Wanted ! Merci de penser à moi, l’Afghan, mais je refuse de passer ma vie à fuir les mercenaires et les soldats de l’OTAN. Je suis déjà fatigué de fuir la police parisienne. Moi, je désire voyager et découvrir de nouveaux pays ! Viens visiter l’Afghanistan. Je préfère plutôt aller à Dubaï. En faisant la guerre à la France, tu pourras te venger ! C’est vrai que la France m’a ruiné. Je croyais que la vieille bête blanche s’était rassasiée après tous ces vies humaines sacrifiées. Je me disais qu’après plus d’un siècle de carnage, la profanatrice s’était repentie. Hélas ! L’Afghan, la France des droits des hommes a fait de nouvelles victimes. Nous sommes des milliers de clandestins coincés dans son ventre puant. La France qui a privé mes parents du plaisir de la lecture, n’a pas résisté à me faire perdre mon précieux temps, ma vie et ma patience. Ne résiste pas, l’Arabe ! Prend une arme, venge les tiens et rends-toi justice. Je sais que ma cause est perdue devant un juge et des jurés français. Ils ne verront en moi qu’un plaignant de plus. Chaque fois, j’allais pour présenter mon cas auprès des associations parisiennes ; je trouvais devant moi des milliers d’Africains noirs. Les plaintes des Africains ne finissent pas et les Français ont mieux à faire qu’entendre les jérémiades d’un Arabe déboussolé.

Faire la guerre aux Français ? ! C’est une bonne idée. Puisqu’ils ne m’aimeront jamais. Pourquoi ? Les Français et les employés de la Cimade me reprochent d’être un Algérien. Contrairement au Marocain et au Tunisien, l’Algérien est indésirable. Il n’est pas aimé à cause de sa fierté, son orgueil et sa grande gueule. La vraie raison, l’Afghan, est que les Français ne sont pas très fiers de leur passé durant la guerre d’Algérie et ça explique le silence des Parisiens face à moi. Je représente un obstacle face à la volonté des Français de redorer l’image de la France à travers le monde. À leurs yeux de repentis, je suis un témoin gênant. Malgré le besoin des Français d’investir en Algérie et de renouer de nouvelles relations avec mon pays, ils redoutent d’être pris au piège des règlements en comptes avec les rescapés de la guerre d’Algérie. Si notre Président Bouteflika invite Monsieur Sarkozy à investir en Algérie, il n’est pas le seul à attendre le retour des Français. D’autres Algériens attendent cette chance et cette excuse afin d’attaquer la France au nom du passé colonial et de demander réparation. Je ne veux pas faire la guerre ! Tu veux faire quoi ? Je veux dormir, l’Afghan,. Tous ces Arabes qui dorment ne te suffisent pas ! Faux, l’Afghan, les Arabes somnolent. Ils attendent ! Et espèrent la venue de l’homme qui les unira et les aidera à retrouver l’éclat d’antan. Peut-être que tu es cet homme ! Tu exagères, l’Afghan, je suis qu’un paria. Si les Occidentaux tentent en vain de nous faire oublier ce que nous étions au passé, nous, nous n’avons aucune envie d’oublier ce que nous sommes. Je laisse le Français me traiter de clandestin. Mais je ne m’habituerai jamais à ce mot.

Ah ! L’Afghan ! Ces Français méritent le fouet. Il faut les tuer ! Leur mort me rendra-t-elle ma vie ratée ? Comme certains jeunes, j’ai de la haine et de la rage au fond de moi. J’ai tellement envie de leur faire vivre mon enfer ! Rejoins mes rangs et venge-toi des mécréants… Œil pour œil et dent pour dent ! Je regrette, cousin, je ne suis pas assassin. Au lieu de satisfaire ma soif de haine, je préfère pardonner. Au lieu de tuer le Français, je désire ressusciter mon bien-aimé père. J’aimerais lui demander pardon et retrouver ma paix intérieure. Mon échec envers lui dépasse tous mes échecs causés par les Français. Ils méritent un bouquet de fleurs ! Ils méritent de passer sous le feu de nos armes, l’Algérien ! Je me demande parfois, l’Afghan, si nous parlions des mêmes Français ? Parce qu’il y a plusieurs Français ? Tout à fait normal dans un pays fracturé et hiérarchique comme la France. Il y a le Français breton, le Français pied-noir, le Français juif, le Français de Paris, le Français de Neuilly, le Français du 9.3, le Français du boulevard de la Villette et le Français du boulevard Général Leclerc, le Français banquier et le Français éboueur. Et chacun réagit différemment par rapport à mon teint. Il y a celui qui me hait, celui qui me jalouse, celui qui ne me voit pas et celui qui me court après. Je ne peux pas faire une guerre sans cibler mes vrais ennemis français. Et pourquoi ? L’Arabe, tu t’attendris ! Eux, ils ne font pas de différence : pour eux tous les Arabes se ressemblent. Même fauchés et désorientés ! Je refuse, l’Afghan, de perdre la raison. Je ne peux pas me résoudre à tuer Monsieur L, l’homme qui m’a ouvert son cœur. Je ne peux pas faire la guerre à des Français qui eux-mêmes se battent contre leur propre système. Ce n’est pas tous les Français qui ont participé à ma faillite. Avant ma venue en France, je les rendais tous responsables de mes échecs et j’étais très choqué par leur indifférence face à mes soucis et à mes appels de détresses. Les Arabes et les Africains possèdent encore une image très surréaliste sur la vie des Français. Nous croyons qu’ils mènent une vie de rêve et que tout leur est accessible, alors qu’en réalité, la plupart des Français travaillent dur pour pouvoir s’offrir un peut de luxe. Après trois ans de clandestinité, j’ai compris que les Français travaillent autant que nous. Malheureusement une grande majorité d’entre eux ne critique pas la politique étrangère de la France qui appauvrit et exploite les pays pauvres. Les Français aiment se pavaner comme des rois durant leurs vacances au Maroc et en Tunisie. Ils partent en emportant avec eux la belle image de la vie à la française. Ils exportent l’image de la vie facile du Français.

Faut-il blâmer les Français de nous mentir encore ? Ou faut-il adopter un changement dans notre façon de les voir ? Les Français aujourd’hui ne cachent pas la vérité. Les journalistes et les envoyés spéciaux parlent de la crise et de la précarité en France. Les citoyens français se battent pour garder leur travail. Alors, pourquoi les Africains refusent-ils d’ouvrir leurs yeux ? Pourquoi les Africains veulent-ils venir s’échouer sur les côtes espagnoles et italiennes ? Les citoyens français rencontrent-ils les mêmes problèmes que les citoyens africains ? En France, les Français se battent aussi pour avoir un logement, un travail et avoir droit aux aides sociales. J’apprends dernièrement que le quartier Belleville était depuis toujours le quartier des pauvres. Les pauvres ont donc toujours existé en France. Le photographe Willy Ronis est décédé récemment à Paris. Selon le journal Directmatin, le Parisien entretenait une relation contradictoire avec la capitale. L’homme qui photographiait en marchant a publié un livre de photos : Belleville Ménilmontant.

Les politiciens français culpabilisent les clandestins africains sans mettre en cause leurs citoyens. Le touriste français, en allant en Afrique, exporte une belle image de sa situation en France, sans avouer avec quelle dureté il gagne sa vie. J’étais surpris de le voir travailler jusqu’à suer du front. Le Français nous parle des grands hommes, du progrès et de la robotisation des machines, alors que la plupart des employés français travaillent de leurs mains. Donc pourquoi les Africains viennent-ils en France ? Parce que personne ne les écoute en Afrique. En France, les Africains bruns et noirs ont trouvé leur voix. Ils parlent, s’expriment et n’hésitent pas à crier.

Après trois ans de vie marginale, j’ai compris que je ne devais pas compter sur le Français. Trois ans et demi, c’est aussi le temps qui a fallu pour restructurer les grands moulins de Pantin. Selon le maire Bertrand Kern :  « L’idée était de garder l’histoire de la commune, son patrimoine et finalement de faire vivre ces lieux.» Commente pourrai-je compter sur un homme qui ne crée plus ? Il ne m’aime pas parce qu’il a aussi ses propres problèmes. Nous devons chercher à mettre la lumière sur la dure réalité du Français. C’est à nous de savoir comment le Français arrive-t-il à bâtir son empire. Un mauvais Français m’a menti et un autre bon m’a dit la vérité : la vie en France est aussi dure qu’en Algérie et en Égypte. Je n’ai pas écouté le conseil des bons et j’ai cru aux mensonges. Les immigrés ! Les immigrés algériens, maghrébins et africains mentent aussi sur leur vie en France. Leur mensonge dure depuis des années et cet été aussi, ils se préparent à mentir à nouveau aux Blédards. Faut-il faire comme les Africains qui attendent tout des Français ? Où devons-nous trouver des solutions à nos propres problèmes ? Les Africains bruns et noirs viennent en France, parce qu’ils ont perdu l’espoir en Afrique.

J’ai envie de me venger ! Je veux faire la guerre aux hommes. Je veux régler mes comptes avec les Français ! Innocent, je ne veux pas tuer des innocents. Tout bêtement, je refuse de faire la guerre. D’ailleurs, je ne sais même pas comment une guerre se déclare. Il faut avant tout une raison pour la faire. J’ai toutes les bonnes raisons pour déclarer la guerre aux hommes. Vous aurez besoin d’une armée ! J’imagine que je serai obligé de recruter des soldats ? Des Arabes, des Africains, des Persans, des afghans tout ceux qui veulent se battre contre les Occidentaux ! L’Afghan, je refuse de traiter à nouveau avec les Arabes en particulier les Algériens. Pourquoi, le clandestin ? Excusez-moi ! Moi, je ne vous appelle pas le terroriste. Je vous appelle comment ? Dada suffit. J’ai habité et travaillé avec les Arabes dans l’égalité et dans l’inégalité. Et crois-moi, l’Afghan, vous n’irez jamais loin avec eux, tant qu’ils refusent de reconnaître leurs défauts en se réjouissant de critiquer ceux des juifs et des Occidentaux. Les Arabes sont très envieux et ne supportent pas la réussite d’un autre Arabe. Même Paris n’a pas réussi à me protéger de l’extrême jalousie des Algériens. Ils m’ont jalousé dans l’aisance et dans la misère. Savez-vous pourquoi les Français réussissent leurs projets, contrairement à moi ? Non, Dada ! Parce que les Algériens ont une mauvaise définition de la liberté. Les Algériens fraîchement libérés des Français refusent d’être à nouveau commandés. Ils voient dans la moindre demande un ordre et ils refusent d’être dirigés. J’étais agressé par des Maghrébins parce qu’ils interprétaient mes souhaits comme des ordres. Leur riposte se traduisait par des questions : « Qui es-tu pour nous donner des ordres ? Même toi, tu commences à diriger ! »

Et pourtant, je ne me prenais pas pour leur patron. C’est ça les Algériens ! Comment voulez-vous que nos projets se concrétisent, s’ils refusent d’obéir ? Les Arabes ne m’obéissaient pas à moi, mais ils obéissaient à mes soi-disant patrons. Les rebelles n’obéissent qu’au grand patron, au sultan et au maton. J’ai vu les fiers se taire devant l’humiliation et l’insolence de mes bourreaux, alors qu’ils n’hésitaient à m’agresser. Pour vivre en paix avec les Arabes, il faut être au-dessus d’eux. Le plus vieux peuple au monde avait déjà compris le défaut des Arabes et voilà pourquoi les Israéliens tentent de devenir une puissance mondiale : ils veulent dominer les Arabes, puis le monde.

Le Maghrébin et l’Algérien en particulier croient qu’être libre signifie ne plus être contrôlé. L’Algérien libre après l’indépendance de son pays vit avec le rejet de l’idée de rentrer dans un rang et dans un ordre. Après s’être débarrassé de son maître blanc, l’Algérien est réticent à toute forme de servitude. Ce refus se manifeste aussi très fort chez l’Africain, qui a du mal à accepter la moindre demande. J’ai rencontré le Marocain, le Tunisien et l’Égyptien et j’étais très surpris par la force de travail de ces étrangers en France. S’ils travaillent énormément, comment expliquer leur échec à égaler le Français et à faire mieux que lui ? Le Français, en plus de travailler aussi dur que les étrangers, obéit facilement. J’étais aussi surpris devant la rapidité des Français et de Monsieur L à répondre à l’appel de Monsieur Sarkozy concernant l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Le Français n'obéit pas par docilité et par soumission ; il obéit par compréhension contrairement aux étrangers. Je ne prétends pas que l’Arabe et l’Africain sont des idiots. Ils sont plutôt moins conscients et moins éveillés par rapport à l’esprit vif du Français. Le Français ! Ils le construisent, l’éduquent, le sensibilisent et à chaque occasion, ils le rappellent à l’ordre et à la discipline. Le Français ne s’est pas construit tout seul. Il est le produit de l’image qu’il a façonnée pour lui-même. Le Français est un homme moderne, civilisé et cultivé. Contrairement à l’Africain et à l’Arabe, le Français a le sentiment d’exister et d’être considéré comme un citoyen. La France possède sa place dans le monde et le Français aussi. Monsieur L ne manque pas un instant de me rappeler qu’il est un Français. Il sait qu’en tant que citoyen, sa voix électorale compte. Il sait qu’il pèse et peut contribuer au changement de son pays. Au second tour de l’élection présidentielle, les Français ont cré& l’événement en choisissant un homme de droite. Ce sentiment d’existence et d’être un maillon fort dans la chaîne sociale se reflète sur le comportement du français. Le Français est respecté, se respecte et respecte autrui. Malheureusement, l’étranger africain ou arabe sait qu’il ne possède aucun pouvoir dans le choix politique de son pays d’origine. L’étranger a le sentiment d’être un homme effacé, estompé et opprimé par rapport au Français. Si le Français n’a rien à prouver, l’étranger a toujours besoin de prouver qu’il existe. L’expansion de la violence dans la banlieue parisienne explique ce besoin de l’étranger de marquer son territoire. Guerres de gangs ou guerres communautaires, la violence est devenue un mode d’expression contre toute forme d’oppression.

Exilé en premier et exclu par le système français, l’étranger n’a pas l’impression de faire partie d’un ensemble. Ici, la première règle est le chacun pour soi. Le sentiment de l’individualisme est plus présent chez lui que chez le Français. Le Français narcissique et égocentrique est aussi conscient qu’il fait partie d’un ensemble. En pensant à l’intérêt général, il sait qu’il rend service aux autres et à lui-même. Il ne faut pas être un homme intelligent pour comprendre l’intérêt de se comporter avec civisme. J’ai connu des Français qui n’étaient pas des hommes intelligents et pourtant, ils avaient tous un comportement commun et similaire. Vous sentirez chez eux la conscience de l’importance du respect de l’ordre, de l’organisation et du temps.

Savez-vous, l’Afghan, pourquoi les Français et les Occidentaux vous vaincront ? Parce qu’ils sont mieux armés que nous. Non, l’Afghan ! Ils triompheront grâce à l’ordre. Le travail des Français est mieux organisé et mieux encadré. J’aime travailler avec Monsieur L, parce que sa façon de travailler me convient. Le Français dans sa façon de travailler obéit à un ordre. Vous sentirez qu’il y a un début et une fin à tout. Détrompez-vous, l’Afghan, ce n’est pas les Français qui ont perdu, c’est leur système. Comment ferais-je la guerre à des Français trahis par leurs patrons qui ont choisi de les abandonner et de faire fortune sur le dos de nouveaux esclaves ?

Savez-vous ce qui est dur dans le travail clandestin ? Non ? Le manque de réglementation et l’absence de l’ordre. Travailler au noir signifie taffer sans cesse et sacrifier parfois ses jours de repos. Au moins, vous, vous ne payez pas d’impôts. Comme si vous, l’Afghan, vous les payiez ! Sincèrement, je préfère payer des impôts et avoir mes droits plutôt que de travailler dans le noir avec des Arabes immigrés et clandestins qui ne respectent rien. Je refuse d’être à la tête d’une armée composée d’Arabes qui ignorent le sens de l’ordre et de l’organisation. Je refuse de diriger des hommes qui se détestent entre eux. À Paris, j’ai découvert la haine que portent le Marocain et le Tunisien envers l’Algérien. Certains immigrés prétendront qu’il existe une solidarité et une entente entre les Maghrébins de France. Malheureusement, ce soutien existe surtout pour faire face aux Français et à la politique de Monsieur Sarkozy. Pourquoi les Maghrébins se détestent-ils ? Pour la même raison que les Hutu et les Tutsi se détestaient. Dans son livre Génocide, Révérien Rurangwa était arrivé à la même conclusion que moi. Le rescapé du génocide rwandais de 1994 tentait de comprendre les raisons du massacre en se posant ces questions. Comment cette harmonie va-t-elle se briser ? Pourquoi chacune des ethnies va-t-elle se mettre à haïr l’autre ? Des questions à qui il devait trouver des réponses. Toutes les réponses me paraissent incomplètes. J’en suis convaincu, on ne peut réduire l’explication du génocide à des mobiles politiques, à des raisons économiques, ni même à des rivalités ethniques. Il y a une sorte d’insondable « mystère du vice » dans telle inhumanité commise par des humaines. Une haine qui vient d’ailleurs, une inspiration secrète qui dépasse nos catégories mentales et nos capacités d’analyse.

Si j’ai pardonné à ma mère, je n’ai pas pardonné aux hommes. Des Algériens, des Maghrébins et des Français n’ont pas hésité à me blesser et à me ruiner. Mon refus de me venger d’eux n’est point un pardon. Tout simplement, j’ai d’autres priorités. De plus, je n’ai ni l’âge, ni le temps de faire la guerre à tous mes tortionnaires. Depuis, que j’étais trahi par mon meilleur ami et par la harde des clandestins algériens, j’ai un besoin urgent de trouver un ami face à la solitude et l’indifférence. Mais lequel, du Tunisien, du Marocain et du Parisien, vais-je choisir ? Ces hommes se ressemblent comme autant de gouttes d’eau malgré leurs différences. Ils ne possèdent pas les mêmes vertus, mais ils sont affectés des mêmes défauts. Je ne refuse pas de faire la guerre aux hommes, je refuse surtout de faire la guerre à leur nature humaine. J’ai compris qu’il était inutile de se battre contre l’instinct naturel de l’homme. L’Afghan ! Le rwandais Révérien Rurangwa a trouvé cette raison secrète qui anime le penchant des hommes vers le vice. Ce n’est pas l’histoire qui se répète, mais c’est l’homme qui répète la même histoire. Malgré le progrès, l’homme n’a pas évolué totalement. Qui peut empêcher les hommes de mentir ? Ce n’est pas la clandestinité qui m’épuise, mais le besoin des hommes de mentir. À Paris, ils mentent tous ! Je me demande toujours comment je pourrais vivre parmi les menteurs et les radins… !

Je venais d’acheter le livre de Révérien Rurangwa ce mois de juin et j’étais surpris par les points communs qui nous unissaient. À la différence du Rwandais, les membres de ma famille n’ont pas été massacrés sous mes yeux et je ne porte aucune blessure physique apparente. Au pays des droits de l’homme et du tri, les Français diront que j’ai tout inventé. Dans mon histoire, je n’ai pas assisté à la mort d’un millier de Tutsi et je n’étais pas mutilé par la lame de mon voisin. Les Blédards africains, maghrébins et algériens subissent une autre forme de torture. Ils meurent d’une façon très lente et leur agonie dure une éternité. Nos proches meurent face à l’indifférence de nos dirigeants politiques. À Paris, la déchéance m’a poursuivi et j’ai été à nouveau le témoin du gâchis. À Paris, j’ai pleuré ! J’ai versé les larmes de la brune qu’elle n’osait pas me montrer. Ou qu’elle ne trouvait pas la force de verser de son corps épuisé et essoré par l’injustice des hommes. Seuls des soupirs étouffés s’évadaient parfois de son cœur surchargé de douleurs. Contrairement à Révérien Rurangwa, je n’ai pas assisté à un massacre collectif, mais au massacre d’une seule femme. Pourquoi faire la guerre quand c’est mal écrit ? Et à qui faire la guerre ? À Monsieur L qui m’a traité de sauvage ? Je n’avais pas besoin de me battre avec lui, puisqu’il a changé de vision sur moi. Il a compris que j’étais mieux éduqué. Comment ferais-je la guerre à Monsieur L, qui tente à son tour de survivre ? Après avoir vu comment les Français se battent pour gagner leur vie, j’ai changé d’avis sur eux. Comment ferais-je la guerre à des hommes qui acceptent des pourboires et préparent leurs gamelles pour aller travailler ? J’ai vu tellement de Français pauvres qui galèrent et qui viennent se plaindre à moi, le clandestin. Une guerre contre qui ? Contre les glaneurs, les chiffonniers et les misérables de Paris.

Pourquoi se battre ? Pour un monde meilleur. Depuis des siècles les hommes se battent contre le mal et le besoin de faire régner le bien. Mais ce mal, chaque homme le porte en soi. Je me demandais pourquoi les clandestins m’agressaient ? Certains étaient des envieux, d’autres étaient manipulés par nos soi-disant patrons et une partie du clan ne supportait pas mon sale caractère. Il me fallait du temps avant de voir la lourdeur de mon humour. Le mal s’il n’est pas au fond des autres, il est en vous. L’Afghan, vous arrive-t-il de vous interroger ? Et de vous remettre en question ? Réussirez-vous un jour à faire de ce bas-monde un monde merveilleux ? Non ! Et vous le savez déjà. Comme tous ces hommes qui ont renoncé à sauver le monde, pour sauver leurs propres âmes. Avant, je voulais sauver les clandestins. Aujourd’hui, je cherche à sauver mon teint. Pourrions-nous faire des vicaires, des hommes honnêtes et de parfaits croyants ? Non. Nous serions toujours trahis par la nature humaine. Comme j’étais trahi par mon meilleur ami, mes aînés et par les clandestins algériens.

Pour espérer un changement en Orient, il faut que ce changement vienne des Arabes eux-mêmes. Les Arabes frustrés croient que la solution viendra d’ailleurs. La présence massive des jeunes Arabes en France explique le taux élevé de leur désespérance à trouver des solutions à leurs problèmes. L’exode massif des jeunes Égyptiens et des jeunes Maghrébins a l’allure d’une débâcle générale devant la dictature anarchique. L’Orient se vide de sa force vitale, de ses jeunes qui ne voient plus un avenir à eux dans un monde floué. Si je refuse de vivre à la Courneuve, ce n’est pas à cause des pauvres immigrés. C’est surtout à cause du mode de vie de la plupart des étrangers arabes et africains. Les étrangers ont un mode de vie presque archaïque et très différent de celui du Parisien, qui travaille pour son escapade dominicale et estivale. Par contre, les étrangers travaillent pour bâtir des châteaux au Bled et ne voyagent qu’une fois dans l’année. Ils vivent enfermés entre les murs gris de leurs cités sans aucun moyen d’évacuer le stress de la vie quotidienne. Leur seul loisir est de se bousculer vers les discothèques de Châtelet et de Saint-Michel. En banlieue, ils rampent tous deux fois par semaine vers les centres commerciaux ou vers les marchés. Des souks horribles tenus par des Arabes, des Indiens et de rares parisiens. En Seine-saint-denis et en particulier à la Courneuve, j’avais toujours l’impression d’être au Bled. Les étrangers refusent de changer ? Malgré les critiques du Parisien, les banlieusards insistent pour garder le même rythme de vie. Avant, je voyais d’un mauvais œil l’invitation des politiciens aux étrangers à intégrer la société française. Après avoir vécu et travaillé dans la banlieue nord de Paris, j’ai compris la nécessité de cet appel. Le Français en réalité n’a pas tort, les banlieusards doivent faire un effort afin d’améliorer leur façon de vivre. J’étais obligé d’aller vivre à Paris, loin de la cacophonie banlieusarde. Pourquoi les étrangers de la banlieue parisienne refusent-ils de changer ? Le sentiment d’infériorité chez les Arabes et les Africains par rapport au Parisien reste un obstacle. C’est dans l’esprit de « nous refusons de changer pour ne pas lui donner raison.» J’avais un soi-disant patron arabe qui refusait mes suggestions parce qu’elle venait de moi. Son complexe envers moi consiste à me pousser à régresser et à travailler à sa façon sauvage. Le travail bâclé des Arabes existe vraiment. Les étrangers refusent d’écouter celui qui se sent meilleur qu’eux et insistent pour rester purs, alors qu’ils devraient changer leur façon de penser et de vivre. Pourquoi encore les banlieusards refusent-ils d’écouter les critiques du Parisien ? Pour la simple raison que les politiciens français et le Parisien abusent avec les critiques. Les humoristes français se moquent toujours des banlieusards, de leur façon de parler et de s’habiller. Je suis depuis trois ans en France et les humoristes ne résistent pas à ridiculiser les jeunes Beurs. Il est surprenant de découvrir que le phénomène humoristique existe depuis les années 90. Je me mets à la place des jeunes de la banlieue et je comprends leur réticence à changer. Ils refusent de céder face aux harcèlements de la critique des politiciens, des journalistes et des humoristes. Les banlieusards s’expriment et disent toujours qu’ils sont visés et stigmatisés. C’est vrai ! Je suis depuis peu en France et je commence à m’ennuyer de voir les Français viser les banlieusards. Il n’y a pas d’autres sujets à traiter ?

Pourquoi les banlieusards étrangers sont visés ? La puissante France à l’époque de l’empereur Napoléon est devenue aujourd’hui un petit pays hexagonal. Le monde a rétréci et le Français, le grand concurrent a perdu ses anciennes colonies et ses privilèges. Jadis, le maître blanc était occupé à mater ses esclaves et ses serviteurs. Punisseur de nature, le Français moderne aujourd’hui fouette avec sa langue et de quoi parle-t-il ? Il parle de l’arriération mentale de ses anciens esclaves qui l’ont suivi jusque chez lui. Le Français moderne nostalgique et lié à sa grande histoire a toujours vécu à travers les autres. Le Français moderne, maître d’un temps a toujours besoin de l’Arabe, pour exalter sa supériorité raciale. Le Parisien a toujours besoin d’aider une Africaine à monter sa poussette dans le bus et de sourire à son petit enfant noir. Inconsciemment, le Français se croit responsable des Africains. Il donne l’impression d’être un homme moderne, indépendant et défenseur des causes humaines. Monsieur a le devoir de sauver et d’aider les Africains, alors qu’en réalité le Français ne sait plus vivre sans eux. La mascarade continue et le Français fidèle à la condescendance de ses ancêtres ne résiste pas à dénigrer les étrangers.

Pour que les habitants étrangers de la banlieue parisienne changent, il faut que le Parisien change en premier. Malheureusement, le Parisien à cause d’un soupçon de civisme qui le distingue des mutants se croit au-dessus d’eux. Il se croit aussi sans défaut et si parfait, alors que le narcisse est aussi coupable du gâchis. Le geste le plus simple que doit faire le Parisien est de boycotter les spectacles des humoristes qui caricaturent des jeunes banlieusards et se moquent d’eux. C’est aussi un moyen afin de bousculer les mœurs et de pousser les humoristes à trouver de nouveaux sujets. Le rire tue le cœur ? C’est vrai, puisque le Parisien rit de tout et de rien, jusqu’à ne plus savoir quand il doit garder son sérieux. Aujourd’hui, la plupart des showmen et des journalistes se servent de la critique caricaturale et sarcastique pour vilipender Monsieur Sarkozy et le banlieusard. J’étais étonné par le grand nombre des livres et des revues qui critiquaient Monsieur le Président. Le plus surprenant est que Monsieur Sarkozy ne semble pas gêné par les attaques. À force que tous les opposants, les journalistes et les humoristes le critiquent en même temps, ils en sont arrivés à banaliser le rôle de la critique. Trop d’informations tue l’information et trop de critiques tue la critique, alors que l’intérêt de chaque critique est de montrer les défauts et les incompétences d’une personne dans le bout de la pousser à corriger ses erreurs et à s’améliorer. Pourquoi Monsieur Sarkozy insiste-t-il à poursuivre ses réformes et ne semble-t-il guère inquiet des critiques de la presse et de l’opinion de ses opposants ? Parce que le plus grand défaut des politiciens, des journalistes et des humoristes est qu’ils ne créent plus. La France est quoi ? Un pays composé de citoyens de différentes classes sociales. Ces citoyens sont partagés et représentés par des hommes de plusieurs fronts politiques différents et qui défendent le même intérêt. Le chef d’État et ses ministres, l’opposition et les journalistes participent tous à animer le show politique. Après des années d’observation, le dernier des étrangers comprend que la critique n’est qu’un divertissement au pays de la liberté d’expression. Ils parlent tous. Tout le monde critique, si bien que ça ne fait aucun effet. Ainsi le banlieusard refuse-t-il à son tour de changer parce qu’il se prête au jeu sarcastique. Le banlieusard se trouve enfermé dans le cercle vicieux du Français qui refuse de changer et qui n’arrive plus à créer, à inventer et à s’ouvrir vers de nouveaux horizons. Il existe de nombreux journaux français et pourtant ils écrivent toujours sur les mêmes sujets : la crise, le pouvoir d’achat, la religion et la laïcité, la sexualité, la violence dans la banlieue et l’euthanasie. Chaque petit événement analysé par la presse écrite fait la Une de tous les journaux. Sans le vouloir, le Français se trouve envahi de tous les côtés par les dernières nouvelles par exemple du procès du gang des barbares. Il y a une liberté d’expression, mais les Français se débattent sur de vieux sujets comme la parité, la retraite et le travail dominical. Les chaînes de télévisions diffusent les mêmes vieilles émissions télévisées et les mêmes vieux feuilletons. Le Français d’aujourd’hui reste nostalgique de son passé, de ses châteaux et des rois de France. L’homme moderne ne crée plus. Je n’aime pas Paris alors que j’ai habité dans ses beaux arrondissements. La capitale est très pauvre et tellement usée par le temps. L’Afghan, sais-tu pourquoi je préfère quand même Paris ? Non ! Je vais te le dire. Je préfère surtout habiter avec les Parisiens. Contrairement aux mauvaises langues, je n’ai jamais été agressé par un Parisien ou une Parisienne. Ils sont très polis et très serviables. Malheureusement, le civisme des Parisiens est détrôné par la vétusté des immeubles, des restaurons, des cafés, des magasins et des trottoirs de la capitale de la mode. J’aime surtout le mode de vie des Parisiens. Ils sont toujours en train de courir. Ils viennent toujours d’un coin pour aller vers un autre. Nous sommes au débout du mois d’août, et les Parisiens sont tous partis. J’ai tout Paris rien qu’à moi. Enfin, il y a toujours la police. S’ils le voulaient, ils pouvaient profiter de l’occasion pour m’arrêter. Non, ils ne m’arrêtent pas ! Je ne l’espère pas. Pas avant d’avoir publié mon livre, mon testament. 

Pour amener les Français à changer de vision sur nous, il faut que nous changions. Pourquoi des Arabes hommes et femmes viennent-ils errer en Europe ? Pourquoi viennent-ils en France ? Parce qu’en France la voix des clandestins est entendue. À Paris, les Africains sont accueillis et écoutés, alors qu’en Afrique noire et en Afrique du Nord, personne n’écoute nos jérémiades. Il est même interdit de se plaindre et toutes les portes sont fermées devant nous. En Afrique, vous ne savez pas vers qui aller. Voilà pourquoi les Africains préfèrent risquer leur vie et venir clandestinement en France. Ici, ils retrouvent l’usage de la parole. D’ailleurs, vous remarquerez qu’à Paris, c’est toujours les Africains noirs et bruns qui se plaignent le plus. Oui ! L’Afghan, les immigrés rechignent plus que les Parisiens.

Au pays de la liberté d’expression, le Français a donné la parole à l’étranger. Curieusement, le premier homme que les immigrés critiquent, c’est le Français. Ils le trouvent toujours raciste et égocentrique. Ils le rendent responsable de leur malheur et de les avoir exploités. Les étrangers africains et arabes se victimisent toujours, alors que le Français galère comme eux pour gagner sa vie. La victimisation chez les Africains est-ce une ruse ? Une mauvaise habitude ? Un prétexte pour fuir leur part de responsabilité. Durant cette année 2009, je suis allé manger dans un foyer africain situé à la rue de la fontaine au roi. Un foyer est un immeuble habité par des étrangers arabes et africains. Celui-ci regroupe spécialement des Africains. Et la particularité de tous les foyers est qu’ils sont délabrés et très sales. Le manque d’hygiène dans la cuisine de ce foyer vous ôte l’appétit. Je commande ce jour-là des frites et je pars m’asseoir à une table occupée par un Noir. Un autre Africain se joint à nous et se met à manger. La couleur de son plat de couscous attire mon attention. Et sans tarder, j’engage la discussion. « Pourquoi votre couscous est-il vert ? » lui demandé-je. « Ce couscous est meilleur que le couscous arabe ! » me répond-il sèchement. Rejeté, j’étais étonné par l’hostilité du Malien, alors que je voulais nouer contact avec mon voisin africain. Un quatrième Africain se joint à notre table et la discussion tourne autour des différents plats africains et l’histoire des Africains en France. Bien qu’ignoré, je m’impose afin de connaître mes voisins. Le Malien, toujours réticent envers moi, m’apprend que les Arabes étaient les premiers à réduire les Africains à l’esclavage. Je suis à nouveau très surpris d’apprendre que les Arabes ont exploité les Africains. Je me dis que : peut-être ! Ne suis-je pas moi-même exploité par des immigrés d’origine arabe ? Autant que je sais que les Arabes sont capables de commettre le pire.

Même en me sentant exclu, je suis resté pour en apprendre des trois africains. Dites-moi, l’Afghan, de qui parlent les Africains réunis ? Ils parlent du Zèbre. Non, ils parlent du Français. Les Africains et les Algériens ne savent parler que de lui. Les trois Africains racontent l’historique de leur présence à Paris et comment le Français les a fait venir de l’Afrique pour les exploiter à nouveau. Les trois hommes, d’une seule voix criarde, critiquent et culpabilisent le Français. Et soudainement, cette même voix s’adoucit, lorsqu’ils évoquent le rôle de leurs dirigeants africains dans le chaos qui touche tout le continent africain. « Nos dirigeants ont commis des erreurs ! » s’exclame l’un d’eux avec regret. Ces fiers Africains me surprendront toujours. Ils culpabilisent facilement les Français et les Arabes. Ils rendent tous les hommes responsables de leur malheur et éprouvent de la peine à accuser leurs dictateurs africains. Ils traitent Jean-Marie Le Pen de raciste et considèrent Omar Bango comme un père. Je ne suis pas contre les Africains et je ne défends pas l’extrême droite. Mais n’est-il pas temps qu‘ils reconnaissent leur part de responsabilité dans leur histoire ? Les Africains qui m’accusent n’ont-ils rien à se reprocher ? Comment expliquent-ils que tout le continent africain était colonisé ? Comment expliquent-ils qu’après la succession d’indépendances aucun pays africain ne s’est démarqué ? Les Africains restent toujours à la traîne, victimes des guerres ethniques et des maladies incurables.

Au lieu de m’agacer et d’agresser le Français, les Africains devront avoir l’audace de se regarder en face dans une glace et de se remettre en cause. Qu’ils arrêtent de se victimiser et de s’en prendre au monde entier. Comme tous les hommes, les Africains possèdent des défauts. «Il y a des poisons pires que le tabac : la haine, la colère, l’envie, le ressentiment, etc.» À travers une ligne courte, l’écrivain Révérien Rurangwa évoque les points noirs dans la personnalité de chaque être humain et chaque Africain. Si vous demandez à un Africain qui était le responsable du génocide rwandais ? Il vous répondra que c’était le colon belge qui avait attisé la haine contre les Hutu et les Tutsi. Pour régner, l’envahisseur belge devait diviser le peuple rwandais en exploitant le trait de différence qui distinguait les Hutu des Tutsi. Monsieur Révérien Rurangwa explique très bien dans ce livre Génocide que les Hutu possédaient une méthode de tuer : Les Hutu blessent lors d’une première tournée ; laissent la victime mariner dans son jus et sa douleur ; puis terminent le « travail », comme ils disent, lors d’une seconde tournée. Qui a appris à Sibomana à manier une hachette ? Les Africains à l’unanimité diront que c’est le colonisateur belge qui a appris à Sibomana l’art de tuer. Parce que le Hutu est un cultivateur et non un chasseur. En réalité, l’envahisseur belge n’a pas divisé les Rwandais déjà divisés. Il a tout simplement utilisé leur point de faiblesse en sa faveur. Il a fait de leur trait de différence un fossé. Je demande si les Africains ont lu le livre Génocide de Monsieur Révérien Rurangwa. Je ne le pense pas ! Sinon, ils auraient compris que l’imperfection est en eux. L’écrivain rwandais s’étonnera d’apprendre qu’à Paris des Africains m’interpelle et me reprochent d’être un Arabe. Selon eux, les Arabes ont inventé l’esclavage.

Obama ou pas Obama ! Personnellement, je suis désespéré par le situation des Africains. Il n’y a pas d’avenir pour des hommes qui ne se réinventent pas et quelle que soit leur couleur de peau. Les Africains, qui croient qu’ils n’ont rien à se reprocher, répètent la même erreur, puisque à Paris, le Sénégalais se sent supérieur au Malien, l’Antillais à l’Africain et le Douala aux autres hommes des tribus camerounaises.

Les Algériens souffrent du même problème que les Africains, si vous demandez à un Algérien, qui est le responsable de sa déchéance. Il accusera le Français, comme le musulman qui accuse le juif et l’Américain. La plupart des rescapés de la guerre d’Algérie comme le médecin algérien accuse le Français d’avoir contribué à la dégradation actuelle de la situation du pays. Cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie, les moudjahidin algériens accusent toujours le Français. Comment l’Algérie peut-elle se moderniser et se développer, si les Algériens vivent dans le passé ? Ils ne pourront jamais avancer. Chasser l’occupant ! Si l’occupant est chassé, pourquoi ne parlent-ils du grand absent, alors qu’au présent, je suis inexistant ?

Savez-vous quel est le vrai passe-temps des Algériens ? Ils adorent critiquer les Français, les Américains et les juifs. Les fiers Blédards ne résistent pas à se moquer des Tunisiens et des Marocains. Pourquoi se sentent-ils meilleurs que leurs voisins maghrébins, alors qu’ils sont aussi imparfaits que les autres hommes ? Aucun homme ne pourra s’améliorer tant qu’il se croit au top. La situation dégradante et stagnante de l’Algérie est due à l’opiniâtreté des Algériens à refuser de changer. Pourquoi changer ? Puisqu’ils n’ont rien à se reprocher. Ils sont des hommes fiers, fiers d’avoir triomphé de la grande puissance française. Ces grand hommes sont tellement occupés à critiquer les autres, qu’ils oublient les leurs. Les moudjahidin algériens ne se fatiguent pas à évoquer le Français, Cinquante ans après l’indépendance, ils le décrivent toujours comme un homme hautain, méprisant et sanguinaire. Je ne disculpe pas le Français et je ne le défends pas. Tout simplement, j’en ai ras-le-bol de voir des immigrés agresser et insulter des pauvres Français qui n’ont rien à voir avec leur histoire. De pauvres citoyens français qui comme nous essayent de survivre. Certes le Français a violé ! Il a pillé ! Il a tué et massacré des vies humaines. Les archives et la mémoire collective des rescapés de la guerre d’Algérie le prouvent. Je n’ai pas oublié que le colon français a exercé sa force meurtrière sur des enfants, des femmes et des hommes sans défense. Je n’ai pas oublié que les Français m’ont volé mon temps et mon argent.

Je remercie l’écrivain Révérien Rurangwa pour sa sincérité et sa sérénité à étudier le génocide rwandais. J’étais surpris par la ressemblance de nos visions et nos idées des choses. Je me demande qui a copié sur l’autre ? Pas moi et moins lui. Les pensées, les écrits et les discours des hommes se ressemblent parce que nous sommes tous le produit d’un seul Créateur. Je me lisais en lisant les lignes de Révérien Rurangwa :

« L’assemblée a prié dans la ferveur, Tutsi et Hutu mêlés, les deux ethnies réunies, tous frères du même peuple et fils du même Seigneur.»

« On ignore pourquoi cet homme se met à frapper un autre homme et l’abat ; sans doute, l’ignore-t-il lui-même. Tous les prétextes de loin semblent futiles. Ces silhouettes se ressemblent : elles sont celles d’un homme et d’un autre homme, signes d’une humanité commune et partagée. Ils pourraient être frères et amis. Non, ce sont les ombres revenantes de Caïn et d’Abel».

«Conflit de devoir entre ce qu’il faut oublier et ce qu’il ne faut pas oublier. Comment discerner ? Ce qu’on voudrait oublier, on ne peut pas l’oublier».

Dans la vie, il y a des priorités. La réconciliation de la France avec l’Allemagne explique cette nécessité d’aller au-delà des vieux conflits. L’histoire ne doit pas empiéter sur l’avenir. Entre l’envie d‘oublier et de ne pas oublier, que dois-je choisir ? Il n’y a pas de choix à faire. Je ne peux pas demander à un vieil Algérien d’effacer son passé douloureux. Et le rescapé de la guerre d’Algérie n’a pas le droit de me demander de vivre dans son passé. J’ai quitté l’Algérie à cause de ce devoir de mémoire. Ce n’était pas ce devoir qui était un frein à mes yeux. Mais plutôt le fait de faire de ce devoir une priorité obsessionnelle. La mémoire collective devient un carcan lorsqu’elle empiète sur mon présent. Je devais vivre avec les souvenirs des morts et des survivants. L’histoire ne s’arrête pas à un épisode de la vie des Algériens. Je représente la continuité, je suis le nouvel héritier qui ne possède rien, puisque mes aînés, après avoir pris les pleins pouvoirs, ont confisqué tous les outils de l’expression afin de contrôler l’information. Et aux dernières infos, je suis inexistant. Comment pourrais-je exister face aux grands hommes comme l’Émir Abdelkader et Houari Boumediene ? Pourquoi mes aînés, les rescapés de la guerre d’Algérie m’évitent-ils d’exister ? Suis-je une menace pour eux ? Non ! Juste que les témoins du passé ont peur de perdre leur fond de commerce. Il faut comprendre que la mémoire est devenue un commerce rentable. Mes vieux aînés qui me tiennent à l’ombre ont surtout peur d’être oubliés avec le temps. Si j’existe, je peux leur faire de l’ombre. C’est pourquoi, ils font de l’histoire un événement indélébile. Ce qui me dérange avec les Algériens c’était leur besoin de m’inviter à partager avec eux ce passé sombre de l’histoire de l’Algérie. Si vous demandez aux Algériens qui est le coupable du gâchis, ils n’hésiteront pas à accuser le Français. Mais l’histoire de l’humanité ne commence pas en l’an 1830. Le Français n’est pas le premier homme touché par la fièvre de la conquête du monde. Hitler a conquis l’Europe après que l’empereur Napoléon a tenté une mainmise sur le vieux continent. Grâce au devoir de la mémoire, les Français font de Hitler un tyran et de Napoléon un grand conquérant.

Je me suis désintéressé de l’histoire de l’Algérie, parce que le récit ressemblait à celui des autres hommes : « Ils étaient peu nombreux face un ennemi mieux occupé et mieux organisé. Mais ils ont gagné la bataille grâce à leur bravoure et leur lutte acharnée. » Je me sentais exclu de l’histoire de mon pays parce que j’étais le fils d’un petit homme, alors que l’histoire appartient aux grands hommes. Mes aînés algériens se revendiquent comme des anciens combattants, des résistants et des héros. Ils tiennent à leurs souvenirs et à leurs blessures de guerre, parce que la mémoire est devenue un gisement inépuisable. Grâce à leur mémoire collective, mes aînés peuvent réclamer des privilèges, des indemnités et des récompenses.

Dans l’histoire, mes aînés sont à la fois les victimes et les héros. Le colon français tient le rôle du méchant tyran. Moi, je n’existe même pas dans leur histoire. Qui suis-je à leurs yeux, sinon le fils d’un déserteur ? Pourtant, je leur avais expliqué que mon père avait participé à la guerre d’Algérie. Comment ? me disaient-ils, puisque personne ne l’a vu ? Sinon, son nom serait parmi les noms des martyrs gravés sur les stèles en marbre. Non, mon père a survécu. Porte-t-il une blessure de guerre ou des marques de tortures ? Apparemment non ! Mais il était griffé par la misère. N’est-il pas mort sur son lit d’hôpital ? Il aurait vraiment aimé être décoré avec la médaille de la bravoure. J’avais supposé que peut-être au grand jour du comptage des anciens combattants, ils ne l’avaient pas compté. Mon père était un petit homme ! Il était sûrement caché par un buisson. Nicolas est un aussi un nain ! s’écria l’un d’eux. Ça n’empêche pas qu’il brille. Qu’ils m’excusent. Ce n’est pas Nicolas qui brille, mais sa Rolex. Mon pauvre père portait une vieille montre que je devais chaque fois la mettre à l’heure.

Que faire d’un devoir de mémoire qui me rejette ? Que faire d’une mémoire privée qui a ses adeptes, ses gardiens et ses privilégiés ? Une mémoire inépuisable, qui résiste comme le sphinx face au temps. Mais mortel, je n’ai pas le temps. Je ne rejette pas l’histoire de l’Algérie, qui m’éclabousse. Je cherche à créer ma propre histoire. Une histoire dont je serai le héros ! Même pas un héros, une histoire où je me sentirai vivre. J’ai besoin d’exister et chaque être humain a le droit de se sentir vivant. Même si le Français m’a fait perdre mon précieux temps, je refuse de lui faire la guerre. Le Français que je connaissais à travers l’histoire de mes aînés, m’a aidé énormément à m’épanouir intellectuellement. Avec le Français, je me sentais vivre, alors qu’en Algérie, je devais faire le mort. Je devais éviter de réfléchir, de penser et d’avoir une opinion. D’ailleurs, mon avis ne comptait jamais aux yeux de mes aînés. Durant toute ma vie en Algérie, je devais écouter Dieu, notre imam, mon père, mes supérieurs hiérarchiques et mes aînés. Je devais exécuter les ordres et obéir. J’étais gavé d’histoires sur les prophètes et les moudjahidin sans éprouver le besoin de me poser de questions. L’histoire était simple : le juif était l’ennemi du divin et le Français était le mien. Les moudjahidin étaient mes sauveurs et mes héros. Mais moi, dans cette histoire, j’étais qui ? La marionnette et le fils du déserteur.

J’étais surtout le minable professeur de dessin harcelé par les innombrables courriers envoyés par le Ministère de l’Éducation. Je partais heureux à l’administration de l’école en me réconfortant à l’idée qu’enfin, mes hauts supérieurs hiérarchiques se seraient souvenus de moi. Ce courrier, était-ce ma promotion tant attendue ? Non ! La correspondance était une invitation à participer à des concours de dessin. Comme les occasions de se souvenir du passé ne manquaient pas au calendrier algérien, les rescapés de la guerre de l’Algérie me demandaient depuis le début de l’année scolaire de choisir les meilleurs dessins réalisés par mes élèves. Je n’ai raté aucun rendez-vous et pourtant, je n’ai jamais gagné un seul prix. Pourquoi ? Mes élèves étaient aussi peu enthousiasmés que moi-même par le thème choisi : l’histoire de l’Algérie. J’étais parfois obligé de les menacer afin qu’ils participent à ces concours. Pourquoi demander à un enfant de regarder derrière lui, alors qu’il veut courir devant lui ? J’étais très peiné pour ces enfants qui étaient plutôt animés par l’envie de jouer et de jouir de la vie… !

Pour sauver les nouvelles générations algériennes, il faut réformer l’école algérienne. Il faut brûler les anciens livres et alléger les programmes. Les rescapés de la guerre d’Algérie ne pouvaient-ils pas se souvenir tout seuls ? Pourquoi m'invitent-ils à commémorer une histoire que je n’ai pas vécue ? Malgré tout le mal qu’ils disaient sur le Français, je ne parvenais pas à le détester. Lui, qui m’a aidé à trouver ma quiétude et mon équilibre. Il a aussi supporté mon sale caractère. Au pays de la liberté, le Français m’a permis de m’exprimer librement, même si la religion est un sujet de discussion à éviter en France. Après plus de vingt ans de silence, enfin un Parisien me demande de parler. « Parle, je t’écoute ! » m’invite-t-il. Et dire que dans mon pays, personne n’a voulu m’écouter. Le Français et le Canadien sont arrivés à un niveau de conscience très élevé. Ils ont évolué humainement et intellectuellement. J’adore le Français parce qu’il m’appelle Monsieur ! Même la boulangère de mon quartier parisien m’appelle ainsi. Parfois, je ne comprends pas les Algériens qui disent que le Français ne nous aime pas. Le Français est-il un raciste ? Déjà, que signifie le mot « raciste » ? Le Français n’est pas un raciste, il est surtout réaliste. Il n’est pas dérangé par les étrangers. Il est surtout inquiet par leur nombre qui augmente chaque année. Personnellement, j’étais choqué par le nombre important des immigrés en Île-de-France. Le grand cœur des Français ne peut pas accueillir n’importe qui et ne peut supporter notre invasion. C’est pourquoi nous devons trouver nos solutions. L’humanisme des Français ne suffit pas et ne peut suffire à satisfaire à toutes les demandes, parce que les Français ont aussi leurs propres problèmes. Le Français se bat aussi pour valoir ses droits. Il faut cesser de se servir du passé. La plupart des étrangers accusent le Français d’avoir contribué à anéantir leur civilisation par le passé et de s’enrichir sur leur dos. Le Français était comme chaque homme à une époque de l’histoire : un coupable, un pion et une âme manipulée. J’ai croisé le Français fauché, le Français touffu, le Français dégarni, le Français puant et aucun d’eux n’étaient une menace pour moi.

L’humanisme du Français ne suffit pas à nous sauver tous, parce que le Français est un homme. Et chaque homme a ses limites et apte à commettre des erreurs. Il ne faut pas oublier que le Français a commis énormément d’erreurs à travers le passé et le présent. Pour lutter contre l’immigration clandestine, nous devons cultiver notre propre humanisme et notre propre civisme. Pourquoi à Paris l’Africain n’aime-t-il pas l’Arabe ? Parce que l’Africain est indésirable en Orient. Le dernier accident de la chute de l’avion yéménite est une preuve : on a donné un vieil avion aux Comoriens. Les Africains n’aiment pas les Arabes parce qu’aucun d’eux n’a développé l’idée d’un respect mutuel l’un envers l’autre. Il faut arrêter de se tourner vers le passé et penser au présent et au futur. L’Africain et l’Arabe doivent sans aucune réticence penser à cultiver leur amour avec réciprocité et respect. Il n’y a pas de sale Arabe, il n’y a pas de sale nègre. Il y a des hommes de divers cultures qui doivent penser à améliorer leur situation sociale et modifier leur mode de vie. Je ne suis pas fasciné par le Français en tant qu’homme. Je suis séduit par sa manière d’être et son mode de vie. Je sais que le Français n’est pas un saint homme et sous l’anonymat, il peut cracher son venin et son insolence. Le Français peut être un homophobe, un antisémite et un sexiste.

Au 21ème siècle, rien ne se fait au hasard. L’oubli doit se programmer et se préparer à l’aide des spécialistes, des experts ou des coachs. L’oubli est un événement qui se prépare comme les conservateurs français préparent l’anniversaire du 14 Juillet et comme l’extrême droite répare sa question fétiche : qu’est-ce que vous faites en France ? Depuis plus de quarante ans, les Algériens célèbrent l’anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. La commémoration prend la dimension d’une grande fête nationale. Les moudjahidin mégalomanes n’hésitent pas à déployer les grands moyens afin de préparer et d’immortaliser l’instant passé. Mes aînés, qui m’ont oublié, n’ont rien omis pour marquer l’événement : des rues pavoisées de drapeaux et des banderoles, des parades et des défilés militaires, des concerts, des reportages et des discours solennels à la mémoire des morts. L’anniversaire de l’indépendance est aussi une excuse pour les moudjahidin pour accuser le colon français. Pourquoi me parler du Français ? Puisqu’ils m’ont libéré de lui. L’évoquer, c’est lui donner vie. Ils prétendent m’avoir libéré du Français. C’est eux qui doivent se libérer de son emprise. La vraie victoire des Algériens aujourd’hui est d’ignorer le Français et de l’effacer de notre mémoire collective. Bizarrement, les moudjahidin ne savent plus vivre sans lui. Ils l’évoquent à chaque occasion. À force de me parler du Français, ils ont fini par me lasser avec cette histoire. Au lieu de m’allier à leur cause et de le haïr comme eux, je les ai fuis et j’ai rejoint le seul homme que je connaissais : le Français.

Le devoir de mémoire est devenu un instrument de torture pour les enfants de l’après guerre ; des enfants qui souhaitent investir dans l’avenir au lieu de vivre dans le passé. Ils sont devenus les nouvelles victimes des rescapés de la guerre d’Algérie. Quarante ans ont passé et les moudjahidin se prennent encore pour des victimes en faisant de nous leurs nouvelles victimes. Au lieu de financer les projets des jeunes Algériens, mes aînés préfèrent gaspiller l’argent de l’État et des contribuables dans la commémoration des morts. Mais une question se pose : qui a appris aux moudjahidin algériens à se servir du devoir de mémoire ?

Qu’est devenu mon pays ? L’Algérie a pris son indépendance en 1962. Malgré ses richesses souterraines, mon pays à de la peine à se mettre sur ses deux pieds. Qui sont mes aînés ? Ce sont des résistants devenus des dirigeants à la tête d’un pays dévasté par la guerre. Par manque d’expérience, mes aînés ont commis d’énormes erreurs. D’ailleurs, ne suis-je pas une de leur victime sacrifiée nullement ? À cause de la proximité géographique avec la France, les néophytes algériens ont tout copié sur les Français. Le devoir de mémoire n’est-il pas une invention française ? Et en terme de commémoration, les Français sont très accros à leur histoire. La première victime de ce devoir est Paris. « Paris ! Paris outragée ! Paris brisée ! Paris martyrisée ! Mais Paris libérée ! » disait le général de Gaulle. Paris au masculin ou féminin est devenu l’otage des Français qui refusent de libérer la ville lumière de l’obscurité de leurs souvenirs. Les fiers conservateurs tiennent à leurs défunts rois, à leurs châteaux et à leurs jardins plus qu’à elle. Si le général allemand Von Choltitz a refusé de détruire Paris par amour, les Français la détruisent par amour de leur devoir de mémoire. À présent, pour sauver Paris, il faut la libérer de la mémoire des Français et des brocanteurs. Paris est restée intacte afin de ne pas effacer les traces des grands hommes, qu’ils l’ont construite, façonnée et libérée. Les vivants ont fait de Paris un musée à la mémoire des morts. Paris prisonnière ! Paris poussière ! J’ai compris ta souffrance. Comme toi, je dois vivre dans l’ombre des grands hommes. Des hommes que leur grandeur n’a pas empêchés de mourir…

Pour me libérer, je dois libérer Paris de la mémoire collective des Français et de leurs archives. J’ignore si les juifs ont tué Jésus, mais je sais qu’ils ont tué Paris. L’histoire des déportés juifs de France est marquée sur des plaques commémoratives. L’histoire de Paris est gravée sur chaque coin de son corps. Comme si Paris devait vivre toujours redevable à ses grands hommes ! Chaque année, les Français organisent des débats, des manifestations et des expositions culturelles afin de se reparler des grands exploits du baron Haussmann, de Napoléon III, de Philippe-Auguste et de Charles De Gaulle. L’année 2009 était l’occasion de se souvenir de Gustave Eiffel, le concepteur de la dame de fer. Personne ne pouvait passer à coté de l’affiche concernant l’exposition consacrée à l’architecte. L’exposition Gustave Eiffel, le Magicien du fer, s’est déroulée en mois d’août à l’Hôtel de Ville. Comme d’habitude, les journalistes français qui ne créent plus ont multiplié les reportages sur l’histoire de la Tour Eiffel. Moi, si j’étais un magicien, je ferais disparaître ce monument vieux de 120 ans. La Tour monopolise les regards et met de l’ombre sur les créations de nos jeunes créateurs contemporains. Si j’étais le maire de Paris, je détruirais le Mémorial du maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris. Il est temps de libérer Paris des vieilles histoires des hommes. Je débarrasserais la capitale de toutes les plaques commémoratives et je peindrais tous ses murs roués en blanc. J’animerais les trottoirs parisiens en leur donnant des couleurs au lieu de ce béton gris morcelé.

Le devoir de mémoire dérange, lorsque le passé prend le dessus sur l’avenir. Les Français abusent avec leur histoire. Mauvaise nouvelle : Stéphane Berne revient avec une nouvelle émission 100% histoire. Pourquoi les mêmes noms d’architectes français reviennent-ils constamment ? Qu’ont-ils créé, les Français, après la Tour Eiffel ? Rien ! Ils sont où, les jeunes créateurs français ? Le problème de la jeune génération française et le même de celui de la jeune génération algérienne : des générations ignorées et obligées de vivre dans l’ombre des aînés. Nous sommes au 21ème et Frédérique Gersel nous parle toujours de Molière, d’Alexandre Dumas et de Baudelaire.

Dis-moi, l’Afghan, comment pourrais-je faire la guerre à la France ? Un pays bâti sur la contradiction et la controverse ? La France chasse les petits délinquants de la banlieue et honore Jacques Mesrine. Le journal Métro lui consacre plusieurs pages sous des titres étincelants : Jacques Mesrine, la légende revit. Trente ans après sa mort « l’ennemi public n°1 continue de fasciner. De plus, de vieux films consacrés à ce gangster des années 70, qualifié de personnage hors normes, refont surface. Le cinéma français lui consacre deux nouveaux films : l'Instinct de mort et l'Ennemi public n°1. Le monde littéraire s’est intéressé aussi au bandit. Pas moins de quatre livres pour le ressusciter.

Instinct de mort, est une autobiographie ;

Mesrine intime : lettres de prison à son avocate ;

Mesrine : l'évasion impossible ;

Mesrine mon associé, écrit par son associé Michel Ardouin.

Comment pourrais-je faire la guerre au Français ? Un homme dépassé par le revers de sa réputation d’homme moderne. Une réputation qui lui apporte des envieux et des ennemis à l’intérieur et à l’extérieur de la France. Le Français est différent de la description que mes aînés ont faite de lui. Le maigrichon a ses défauts et ses qualités. Et je n’imagine pas faire la guerre à cet homme squelettique. Le Français a-t-il changé ? A-t-il évolué ? Dissimule-t-il ses sentiments envers moi ? Me traite-il de bicot derrière mon dos ? Je l’ignore. Je sais juste qu’il existe des Français, des politiciens et une France. Dans l’histoire, le Français est le dernier à savoir. Parfois, je doute même de son intelligence supérieure. Si le Parisien était intelligent, comment a-t-il pu laisser la situation de Paris se dégrader ainsi ? Quand je me balade à travers les rues parisiennes, j’ai l’impression de vivre un cauchemar. Comment pourrais-je faire la guerre à des retardataires ? Le projet du Grand Paris devait être déjà réalisé. Les Parisiens ont tué Paris en lui choisissant le noir comme couleur officielle. Sont-ils endeuillés ? Sont-ils ensevelis ? Où sont-ils aveugles ? Si les Parisiens ne voient pas, c’est parce qu’ils ne sont jamais là. Ils sont toujours en train de voyager. Depuis que je vis à Paris, le plus dur était de supporter la façon de s’habiller des Parisiens. Les voir déguenillés est un vrai choc. Ces trois ans de clandestinité étaient vraiment instructifs afin de comprendre le comportement de mon hôte. Durant la première année, je croyais que le Parisien ignorait l’art de se vêtir. La deuxième année, je me disais que son mode de vie le poussait à renoncer à certain luxe. Son agenda était toujours plein. Mais durant la dernière année, j’ai découvert une autre raison à son accoutrement burlesque. Durant les derniers affrontements entre les jeunes de la banlieue et les forces de l’ordre, les policiers français et parisiens expliquent toujours qu’ils étaient piégés et qu’ils étaient tombés dans un guet-apens préparé par des bandes organisées. Même la police parisienne se victimise ! À première vue, je ne comprenais pas l’intérêt des Parisiens de s’habiller négligemment. Aujourd’hui, j’ai compris qu’ils le font exprès afin de se différencier des banlieusards. Parce que ces derniers s’habillent mille fois mieux que les Parisiens qui refusent d’aimer le rapp. Le rapp est la musique officielle des banlieusards blacks et beurs. Pourtant, les Parisiens aiment le Jazz ! Sommes-nous face à une guerre de mémoires, puisque le Parisien et le banlieusard tiennent chacun de son côté à son identité vestimentaire ? Les étrangers sont aussi les victimes d’un vieux discours politique très rodé. Ils sont isolés et mis à l’écart. Le département du Seine-Saint-Denis est une zone délibérément oubliée des dirigeants français.

Donc, je trouve normal que les banlieusards s’organisent face à des Parisiens très décidés à les stigmatiser. Les Français sont-ils tolérants ? J’en doute un peu. Les mariages mixtes existent surtout dans les quartiers pauvres. Le Français est obligé de se marier avec une étrangère, surtout par intérêt. Les Parisiens sont très exigeants par rapport à la beauté et pour vivre parmi eux, il faut être beau et grand. Mais bizarrement, dans la plupart des couples parisiens, il n’existe pas d’homogénéité. La femme est plus belle que l’homme, ou l’inverse. Je me demandais même comment une Parisienne pouvait vivre avec un partenaire aussi laid assis à côté d’elle – qu’elle oublie, d’ailleurs, lorsqu’elle est face à un autre homme beau, comme si elle découvrait l’erreur de son choix précipité. Qui pousse un Français blanc à choisir une femme africaine, une Orientale ou une Asiatique ? C’est sa peur du vide et de la solitude. Cela explique la hausse des crimes passionnels en France. Le Français supporte moins la séparation et l’échec. S’il ne tue pas, il se suicide. Donc, sommes-nous vraiment tolérants ? Et à quel point ? Je sais juste que nous exigeons trop du Français. Les bénévoles français aident-ils leur prochain par amour ? Ou pour fuir le vide ? Pour un Français raciste le pire qui puisse lui arriver est de se marier avec une femme de couleur. Monsieur L ne cache pas sa haine pour les Noires. La précarité, la solitude et la mixité poussent les Français à s’unir avec des étrangères. Fuir la misère et la pauvreté est la vraie raison qui pousse les Africains à se marier avec des vieilles femmes blanches. Le racisme français existe-il vraiment, alors que les Africains refusent la présence des Chinois en Afrique ?

Comment pourrais-je faire la guerre à la Vème République, le pays qui a perdu la face devant Chantal Sebire et Vincent Humbert ? Les dirigeants du septième pays producteur d’armes au monde préfèrent financer la recherche militaire au lieu de financer les recherches scientifiques. Comment les Français peuvent-ils faire la morale aux banquiers, alors qu’au 21ème siècle, il n’existe pas encore de remède contre le cancer ? Comment peuvent-ils juger Jérôme Kerviel ? Et tolérer le cumul des mandats ? N’est-ce pas un abus de pouvoir ? S’il existe des ruelles étroites, insalubres et mal famées à Paris, c’est en partie à cause de l’emploi du temps chargé des élus qui n’arrivent plus à honorer leur engagement. Comment le chef de l’État peut-il se permettre de tripler sa paie tandis que l’ensemble des citoyens français vit dans la précarité ?

Ii est impossible de faire la guerre au pays droits de l’homme. La grande France, qui a dominé et dompté le monde aujourd’hui fait la guerre aux sans-papiers. Des hommes déracinés qui ne jurent que par leurs mères.

Je refuse de faire la guerre aux Français. Je préfère dialoguer et discuter loin du cercle vicieux des débats de Yves Calvi Mots croisés et de Thierry Guerrier C dans l’air. Invitée à l’émission l'Habit ne fait pas Lemoine, Fadela Amara était flattée d’être qualifiée de femme rebelle par l’animateur Jean-Luc Lemoin. Pourquoi les Français s’obstinent-ils à faire de nous des rebelles ? Madame Amara sait très bien que le temps des grandes rebellions est révolu. Aujourd’hui, nous répétons inlassablement les mêmes histoires d’autrefois et nous croyons pouvoir changer l’ordre des choses et faire la loi, alors qu’en réalité, rien n’est acquis et que chaque victoire est illusoire. Le capitalisme a déjà tué les valeurs humaines de la Révolution française. Est-il raisonnable de se dénuder pour dénoncer le réchauffement climatique ? Nous sommes à une époque où tout a été déjà fait et dit. La nudité ne nous choque plus. Nous n’inventons rien de nouveau. En France, à l’occasion de la journée de la femme, Monsieur Sarkozy a annoncé qu’il ferait voter une loi en 2009 afin de sanctionner financièrement les entreprises qui ne respectent pas l’égalité des salaires entre hommes et femmes. Même Cécile de Minibus, libérée de Cauet, est obligée d’exister dans l’ombre de Morandini.

Je n’arrive toujours pas à matérialiser le cauchemar que je vis. À force d’étouffer mes cris et mes angoisses ; à force de fuir les policiers ; à force de me tapir et de m’estomper, j’ai l’impression de ne plus exister. Mal dans ma peau, je ressens un fort poids de dépit. Et pourtant, je n’exprime rien. Sans-papiers, je n’ai plus le droit de montrer ma révolte. Je dois subir et me taire. Tous mes proches me demandant de supporter et de patienter. Au début, l’Afghan, je ne comprenais pas comment les Français ont laissé s’aggraver une telle situation inhumaine. Aujourd’hui, j’ai compris que ce sont les immigrés qui acceptent de vivre dans la clandestinité. Les Arabes ont changé. Ils supportent de travailler au noir et d’être exploités par les Français et les mutants. Les étrangers acceptent de faire n’importe quel travail en France, alors qu’au Bled, ils refusent de s’échiner. Ils cachent la vérité sur leur vie en France et exportent une autre image d’eux-mêmes. Je refuse de faire la guerre ! Je refuse de recruter de jeunes soldats et de faire d’eux de la chair à canon !

La guerre aujourd’hui est en réalité une guerre d’images. La dernière image c’est celle de Valérie Boukobza, une directrice d'une école placée en garde à vue et l’image des enseignants de quatre écoles du 20ème qui ont manifesté pour soutenir deux familles menacées d’expulsion. C’est beau de voir des Français se battre pour soutenir des clandestins ! Ces images renforcent notre belle idée sur les Français. Les documentaires influencent aussi notre imaginaire sur la personnalité du Français à titre d'exemple. À nos yeux, le Français est un homme tolérant, pacifiste, généreux et aimant. Il aime adopter nos petits orphelins noirs et les sauver de la misère. La femme française a aussi hérité de cette belle réputation, alors qu’elle n'a rien perdu de son instinct animalier. Lucienne Ulpat incarne l'image de la belle-mère européenne méchante et sans cœur. Lydia Gouardo de son côté nous rappelle le mauvais sort de Cendrillon ; et à la place du prince charmant, un père pervers et incestueux. D’ailleurs, la vie de la plupart des Français n’est pas un conte de fées. Et je refuse de faire la guerre à des hommes qui eux-mêmes sont en guerre contre la crise, le cancer et le progrès.

Il existe une seule façon de contrôler les Occidentaux. Il faut que nous contrôlions nos biens, alors que l’Orient est riche de ressources souterraines, la plupart des Arabes sont des citoyens pauvres. Nous quittons nos terres brunes et nous renonçons à nos droits parce que nous sommes exclus par une clique de dirigeants arabes. J’étais très choqué par le grand nombre des jeunes Arabes en Île-de-France. Qu’imagineriez-vous, l’Afghan, en apprenant que le célèbre théâtre équestre Zingaro s’est installé à Aubervilliers ? Vous imagineriez qu'Aubervilliers est un lieu très chic, alors que la réalité est toute contraire. Je ne suis un raciste, si je refuse de vivre avec les étrangers spécialement à Aubervilliers, à Strasbourg-Saint-Denis, à Château rouge, à Belleville et à Barbès. Je refuse de vivre avec les Arabes, les Africains et les Chinois à cause de la vétusté de ces quartiers hors et à l’intérieur de Paris.

Le mouvement massif des étrangers arabes vers l’Île-de-France explique aussi la présence d’un état de coagulation en Orient. Pourquoi la situation est-elle toujours figée là-bas ? Le Président Hosni Moubarak a été réélu en 87, 93, 99 et en 2005. Et il est toujours l’unique Président de l’Égypte. Le colonel Kadhafi est à la tête de la Libye depuis l’année 69. Qui apportera cet air de changement en Orient ? Les nouvelles générations. Éparpillés à travers le monde entier, les orphelins de l’Orient ne contrôlent ni leur richesse ni leur avenir. Pour contrôler le monde, nous devons nous réconcilier et nous contrôler. Comment pouvons-nous unir le Maghreb, alors que la France soutient nos anciens régimes ? Les défunts présidents Habib Bourguiba, Houari Boumediene et le roi Mohammed V ont décidé auparavant de régler leurs conflits. Les voisins arabes se détestent à cause du mauvais héritage collectif. Les Tunisiens me détestent à cause d’une phrase que Houari Boumediene a dite à Habib Bourguiba. Les Marocains me détestent à cause d’une phrase que Houari Boumediene a dite à Mohammed V. Aujourd’hui, je dois répondre des actes des morts et subir la colère des vivants.

L’union du Maghreb est un vrai pas vers le self-contrôle des Arabes. Hélas, l’Afghan, vous êtes le premier obstacle face cette union. En réalité, vous n’aidez ni l’Islam ni l’Orient. Vous êtes un homme qui fait peur aux Arabes plus qu’aux Occidentaux. Parce que personne ne sait qui vous êtes vraiment. Dans votre prochaine vidéo, au lieu de menacer les Américains et les juifs. Parlez nous ! Parlez aux millions d’Arabes et dites-nous qui vous êtes vraiment ! Pour contrôler l’Orient, nous devons retourner chez nous. Mais sans paix, notre retour est inenvisageable… !

De quoi parle-t-on en France ? De la mort d’un soldat français en Afghanistan, du sort des Afghans à Calais. Les Français parlent de la jungle. Parce qu’il y a une jungle en France ? Et qui vit dedans ? Tarzan ? Non, ce sont les Afghans ! Tarzan est au musée du quai Branly.

Drôle d’Ère ! C’est très difficile de réaliser que rien n’a changé depuis le premier crime fratricide et de comprendre que l’adoration de Dieu s’accomplit par la mort de son ennemi mortel. Je n’arrive toujours pas à réaliser ce que je vis et ce que je vois. Je comprends tardivement l’intérêt du commun des mortels à ne plus vouloir comprendre. Puisqu’il y a rien à comprendre, il vaut mieux vivre con et heureux. Les hommes et les femmes de toutes races et nationalités se hâtent de procréer des enfants sans se préoccuper un instant à leur avenir. Certains sont dominés par leur instinct naturel et d’autres par la Voix du Seigneur. Que sommes-nous vraiment ? Des hommes libres ou des hommes cobayes ? Une attraction pour Dieu ou un sujet d’observation pour Darwin ? Même si le Royaume-Uni a rendu hommage à son célèbre naturaliste Charles Darwin pour le bicentenaire de sa naissance, je préfère aller visiter les vallées des Rois en Égypte au lieu d’aller à la vallée des singes au Futuroscope. Si la théorie de l’évolution est exacte, qui nous empêche d’évoluer à nouveau ? Notre évolution est incomplète ! Où elle était mal faite. Clandestin, redevenir un homme ne suffit pas. La plupart des hommes sont très stupides et très sanguinaires. J’aimerais muter, changer de peau et devenir un saint. Le temps presse ! Au lieu d’attendre, je préfère anticiper mon évolution. J’espère que Darwin a défini les différentes conditions de sa théorie. Je veux une mutation réussie. Un nouvel échec me sera fatal.

Mais pourquoi évoluer ? Et vers quelle nouvelle rive voler, puisqu’un musulman n’a pas d’avenir sur terre ? C’est la raison de toutes ces guerres planétaires. Il n’y a pas d’avenir, puisque la Terre se réchauffe et que la fin est proche. Certains hommes préfèrent jouer aux soldats alors que d’autres préfèrent jouer aux kamikazes. Je sais qu’il est inutile de discuter avec vous, l’Afghan. Les hommes sont devenus fous et aveugles.

Pourquoi recruter des jeunes coquelicots et faire une guerre aux narcisses blancs, alors que les frelons asiatiques s’en chargent très bien ? Les Français s’épuisent à faire de petites guerres aux jeunes de la banlieue, si bien qu’ils ne se rendent pas compte de la vraie menace. Le frelon d’Asie est un vrai prédateur.

De quoi parlent les Français ? Ils parlent de la crise. Ils sont très affolés ! Pas nous. La misère et la famine ne font pas peur aux Africains. Et pourquoi faire la guerre, puisque je me suis battu contre des clandestins, des souris et des rats ? Le problème des souris, c’est leur nombre. Dès que vous en tuez une, une autre sort du mur. Les rats sont des rongeurs très voraces. Le Français est aussi un grand rongeur. Il a creusait des tunnels partout sous Paris. Il existe même un carnaval parisien underground.

 

                                                                Ecrit en 2009

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité