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Paris, de moi à toi
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9 janvier 2013

Ère conditionnée : CHAPITRE 3


CHAPITRE 3

 

Dans le noir

 

Depuis mon cachot obscur et dans la perdition totale, stoïque, désabusé et anorexique, je vous écris, Monsieur Bouteflika. Pas un mot ! Je refuse tout jugement précoce de votre part. Je n'ai pas choisi l'anomalie de ma situation, mais j'étais forcé à franchir la ligne rouge et de défier l'interdit. Je ne suis pas fier de ma situation et je n'ai pas honte. Comme un ange déchu mon acte est légitime et n'émane pas d'une velléité de dernière minute.

Je ne sais pourquoi le noir est toujours lié à la désolation et à la honte. Pourquoi le noir est-il la couleur de la tristesse et du deuil ? Ils disent que je vais dans le noir. Enfin, je travaille au noir. Pourtant, ils disent un mariage blanc et un mensonge blanc. Est-ce pour minimiser leur péché, alors qu’un mensonge est un mensonge. Les politiciens qui n'arrêtent pas de mentir aux citoyens se teintent de blanc et moi, ils m'enfoncent le clou. Dieu sait que je hais les menteurs et dans cette histoire, les hommes n'arrêtent pas de me mentir. Qui sont-ils ? Mes aînés qui ont creusé le sentier. Tous les clandestins marchent derrière leur ombre. Je regrette Monsieur le Président, je ne suis pas le seul coupable dans cette affaire.

Depuis l’orée de ma clandestinité, je vous écris, Monsieur le Président Bouteflika. Je n'ai rien d'un rescapé ou d'un hors-la-loi et mes raisons n’ont rien de prétextes ou de faux arguments. Si la vie est qu'une multitude de phénomènes enchaînés, liés comme le relais des saisons et l'alternance du jour et de la nuit ; si vous faites bouger une pierre dans le nord, vous découvrirez ses effets secondaires dans le sud. L'histoire des hommes est entremêlée et liée comme une langue chaîne. Nous ne sommes que les acteurs et parfois les figurants d'une histoire qui se répète à travers les Ères. Le fait que je sois dans la clandestinité, n'est pas un fait à part. Le passé et l'histoire communs entre l'Occident et l’Orient ont un impact sur notre présent et notre avenir. Je refuse d'être le maillon faible et de n'être qu'un pion dans cette longue pièce théâtrale. Je refuse de m'incliner et d'être l'otage des systèmes politiques. Les systèmes français et algérien veulent me rendre coupable, afin de se disculper eux-mêmes.

Je refuse de me soumettre comme les gitans à leur destinée. À Paris, ils sont les otages d'une fiction et d'une coutume ancestrale. Les gitans vivent sur la marge de l'Europe. En l'an 2007, je croisais pour la première fois des gitanes, des jeunes mendiantes. Combien de fois avec un pincement dans le cœur, je voyais les sœurs d'Esméralda sortir de leurs poitrines des pièces jaunes, la récolte d'une journée. À Saint-Denis les agents de la sécurité d'un supermarché leur interdisaient de rentrer, de peur qu'elles ne dérobent quelque chose. J'étais triste de les voir ainsi dans cette situation, qui d'ailleurs ne choquait personne et même pas les Parisiens. Les cousines de la bohême sont devenues un détaille normal, elles font partie du décore patrimonial français. Victor Hugo a marqué les esprits par son ouvrage Notre-Dame de Paris. Je les ai croisées un matin pluvieux devant la cathédrale de Notre-Dame de Paris en train de danser et de mendier. Les touristes européens ne semblaient pas choquer par la situation dégradante de ces jeunes filles. Si les touristes européens m'accusent d'être un voleur et un terroriste, ils considèrent aussi les gitanes comme des voleuses. Drôle d'Ère, la France du droit de mémoire fait tout pour sauvegarder l'histoire des juifs et des illustres écrivains français ; et oublie qu’Esméralda est la pièce maîtresse de l'œuvre de Victor Hugo. Horrible de voir les touristes européens, anglais et américains admirer la cathédrale avec fascination et regarder les sœurs d'Esméralda avec dédain. Les Occidentaux qui dépouillent l'Afrique de ses richesses traitent les Roms de voleurs. Ils savent que voler ! Mais leurs ont-ils appris d’autres métiers ? Les hommes politiques oublient que ces jeunes bohêmes sont réelles et parcourent les rues, alors qu’à notre Ère, il est inadmissible de vivre de la charité et de la prostitution. Les Occidentaux évoquent la situation dégradante de l'enfant africain, alors qu'en Europe des enfants subissent le même mauvais sort. Peut-être les Roms ne sont-ils pas des Européens ? Combien d'enfants parcourent la rue et quittent l'école ? Certains enfants ne sont jamais allés à l’école. Dommage de voir ces gitans ne sachant que mendier dans les rues de Paname. En Algérie, les gitans existent et sont aussi indésirables que les Roms en France et en Italie. Ils sont de véritables nomades obligés de voyager, à cause d'un mauvais sort que leur a jeté leur arrière-grand-père. Ils seront maudits, s'ils s'installent dans un endroit. Ils sont obligés de voyager à travers le monde et d'être pourchassés des terres qu'ils occupent. Les gitans fuient un vieux mythe. Les garçons volent, les filles mendient et les adultes ramassent de la ferraille. La littérature occidentale s'est enrichie en décrivant ses voleurs et les Occidentaux s’empressent de les chasser. Est-ce un mode de vie ? Les gitans devront évoluer dans un monde qui mue. Il faut parfois, se dresser contre le vent des mythes et des chaînes, quitte à briser l'échine. Les gitans mènent une vie de misérables, une vie qui leur plaît. Mais pourquoi, ne lient-ils pas l'agréable à l'utile ? Le Français gringalet possède sa propre terre et ça ne l'empêche pas de voyager à travers le monde. Comme les gitans, j'ai couru derrière un mythe en quittant tout pour la France. Depuis l'Algérie, je vagabondais avec mon imagination dans les rues françaises. Je rêvais de marcher sur les podiums parisiens. Aujourd'hui, je suis coincé ici réduit à vivre dans l'obscurité. Je n'ai rien laissé derrière moi et je n'ai rien devant moi. Je n'ai plus 20 ans ! Je ne peux ni reculer, ni avancer. Je me réveille de mon idylle avec des traits séniles. Je me sens tellement vieux que je n'ai plus la force de courir. Clandestin, je veux m'installer et meubler mon coin, comme ces jeunes couples Parisiens que j'ai croisés à Conforama. Si les gitans volent des pièces et des nains de jardins, les Français m'ont volé ma vie. Le temps est passé tellement vite, que je ne me suis pas aperçu. Je me réveille déchu de mon rang, avec des vagues souvenirs. La vie nous joue des tours et parfois, nous ne percevons pas que le temps passe vite. J'ai déjà 36 ans ! Pourtant, je ne sentais pas le changement. Le changement et la vieillesse c'était un jeune Tunisien qui me les a fait sentir alors que je l'avais aidé dès son arrivée de la Tunisie. Jeune clandestin ! Je l'avais adopté comme tous les autres. Et pourtant, contre moi qu'il s'était déchaîné.

– T'es vieux, qu'est-ce que tu fais ici... ? rentre chez toi ! me disait-il.

Pour la première fois, je me sentais battu et sans trouver quoi répondre. Battu par un jeune clandestin. Un ami algérien que je taquinais souvent s'était aperçu de mon long silence, me répétait :

– Répond-lui, vas-y ! Répond-lui et défends-toi.

Je n'avais rien à dire à ce jeune tunisien, parce qu'il avait raison. J'étais devenu un vieux jeu ! Un vieux célibataire clandestin. Quel choc ce fut de se voir ruiner par le temps et par les hommes. À cause d'un mythe, j'ai tout perdu.

Ce jeune Tunisien était un élément extérieur qui m'a aidé à prendre compte de ma situation. L'inconvénient de la mémoire est qu'à force de s'habituer à un mode de vie, nous oublions parfois de sortir nos têtes de nos œillères. Les gitans se sont tellement habitués à leur mode de vie misérable, qu'ils n'envisagent plus de changer. Pour que les gitans changent et s’intègrent à la société française, il faut les aider à faire cette démarche. Il y a qu'une personne de l’extérieur du clan qui leurs permettra de voir leurs défauts. Dans les émissions de relooking et de décoration d'intérieur, les Français ont toujours besoin d'une assistance psychologique et de l'avis d'un expert ou d'un coach pour les aider à changer. Les émissions Question maison et D&CO, Super Nanny, Le Grand frère expliquent que même les Français ont besoin de spécialistes.

Monsieur Bouteflika, je suis dans la clandestinité et ce n'est pas un choix. J'ai passé plus de deux ans de travaux forcés et je refuse d'être réduit au servage. Déchu de me rang d'être humain à un rang plus inférieur, je refuse d'être l'otage du système et de mes soi-disant patrons. Je ne me sens pas mieux que les gitans. La seule différence et que j'ai une petite maîtrise de la langue française. La clandestinité, m'a permis de croiser les rebus de la société occidentale. Je patauge avec les clandestins, les SDF, les toxicomanes, les séropositifs et les gitans dans la même boue. La clandestinité m'a permis de toucher le fond, et le fond de la France d'en bas. Malgré le stress et l'angoisse permanents, je ne regrette pas d'avoir partager la réalité des misérables de l’Hexagone.

Monsieur Bouteflika, je n’ai pas d'autre ennemi que l'oubli. Le système français me considère comme un corps étranger, Resident Evil et son ennemi. Pourtant, les Français ne sont pas étrangers à mon histoire. Contre mon gré, le système m'oblige à porter une sagaie. Je refuse la guerre, que le système m'oblige à faire. Je ne suis pas un guerrierMasai, je suis juste un Arabe qui cherche un issue à travers ses mailles.

Lorsque le professeur parisien me demandait de parler à voix basse. Comme Fred qui désire rendre service à la race d'Omar en lui apprenant à parler sans élever le ton. Les Parisiens savent se moquer des autres, sans prendre le temps de comprendre les raisons de leur involution. Hélas, la Révolution des uns n'a servi à rien, puisqu'ils se comportent comme des aristocrates. J'expliquais à ce vieux professeur que l’Africain élève la voix, parce qu'il était habitué à parler au milieu des cris des bombes. À présent les Français critiquent notre façon de parler, en oubliant quand dans un passé proche eux aussi levaient la voix contre la bourgeoisie et le nazisme. Le Français actuel parle à basse voix, parce qu'il a déjà crié durant les révolutions et Mai 68. Aujourd'hui même les pêcheurs et les éleveurs français brûlent et crient devant la hausse des prix. Le cri des manifestants français est audible sur les banderoles et les étendards anti-Ch'tis. Les Français ne crient plus, ils écrivent leur angoisse et taguent leur colère. Mais le plus grand défaut de l'homme est qu'il oublie très vite. Pour cette raison, je répète aux Français que je suis un artiste et non un terroriste. Si les petits Africains parlent en criant, c'est pour se faire entendre. Tandis que je clame mon innocence, les Français me répètent que je suis bon pour la potence. Je résiste contre la discrimination, l'oubli et ma mémoire qui me joue des mauvais tours. Opiniâtre, je refuse de tourner la page sans régler mes comptes. La clandestinité est une immense mer truffée par des éternelles angoisses qui nous rangent les nerfs. Le stress et la chasce que nous impose le gouvernement français nous abîment peu à peu et la guerre froide nous érode psychologiquement. Comme dans toutes les guerres, il y a deux hommes qui survivent. Le plus chanceux et celui qui a des nerfs d'acier. Et je suis ni l'un ni l'autre. Si mes amis clandestins s'étonnaient de me voir rire dans de pareilles situations. Je n'avais pas un secret pour garder la pèche. Par contre, je possédais un don et l'écriture me permettait d'extérioriser mes maux et mes angoisses. Écrire m'a permis de vomir mes crises noires sur des pages blanches. Chaque être humain à ses limites et pour pousser nos limites et supporter les pressions quotidiennes, chacun à ses méthodes pour évacuer le stress. Les clandestins de l’Hexagone s'adonnent à l'alcool, la drogue et à la débauche. L'ivresse est parfois une échappatoire au stress et à l'angoisse. Ça ne m'étonne pas que le gouvernement français n'ait pas interdit la consommation de l'alcool au lieu du tabac. J'ai constaté que nombreux d'ouvriers français et d'immigrés travaillaient en en pestant l'alcool. Au lieu d'affronter les politiciens, les petits fonctionnaires parisiens préféraient boire. Je les comprenais, si même je ne bois pas, alors que les hauts responsables sont dans leurs bureaux climatisés, les petits fonctionnaires travaillent sous le froid et la pluie. Le système n'interdit pas l'alcool, un petit remontant qui aide «les gars» à travailler. L'important pour le système est que le travail soit fait. Au lieu d'améliorer la situation des petits fonctionnaires et de changer le système. C'est au petit fonctionnaire de se démerder et des trouver des solutions à ses emmerdes. Je ne suis pas étonné de voir des Parisiens faire double travail et de chercher dans les ordures. Le plus étonnant aussi était de voir les éboueurs fermaient leur bouches sans se plaindre à leurs supérieurs. Les éboueurs de Paris se taisaient, car la caisse était vide. Les sociétés françaises fermaient leurs portes, tandis que d’autres délocalisations. Les Français sont déjà coincés et ils n'ont pas le choix. Même Madame A était obligée de faire deux jobs à la fois, en commençant à huit heures du matin jusqu'à dix et sept heures du soir. Madame A sortait épuisée et essorée comme la plupart des Parisiens qui descendaient du RER. Jamais j’aurais cru que les êtres humains pouvaient travailler aussi dur et à des heures tardives. En France, je découvre une nouvelle forme d'esclavage non déclarée. Vous saviez, Monsieur Bouteflika, que certains magasins parisiens travaillaient même le week-end. J'évite Monsieur de vous parler de l’État moral des employés. Déjà de nature grincheuse, travailler le dimanche rend les Parisiens agressifs. Je cite aussi l'exemple de Monsieur L, qui commençait parfois son travail à quatre heures du matin et le finissait à 17 heure du soir. Ca explique la fragilité des Français qui se suicident. Le système refuse obstinément de comprendre que les êtres humains sont des catégories. Il y a des hommes forts et d'autres plus faibles devant un travail physique qui demande beaucoup de patience. Devant la concurrence rude, la menace chinoise le système exige des hommes rentables, des pionniers qui peuvent travailler sans se plaindre. Le défaut de l'employé français est qu'il connaît ses droits et peut devenir une entrave devant les patrons. Des patrons qui préfèrent délocaliser leurs usines vers des pays pauvres. Les patrons préfèrent une main-d'œuvre étrangère, moins chère et ignorante de ses droits. Dans les pays du Tiers-Monde, les employés travaillent dans des mauvaises conditions, alors que le Français est un employé râleur. Aujourd'hui, la France me fait peur ! Je découvre que la France est arrivée à ce stade de puissance, en exigent plus d'effort du citoyen français. Surtout dans le secteur privé, l'esclavage existe encore. L'Europe s'ouvre sur le monde et contre la concurrence, les patrons sont obligés de respecter les délais et les dates de livraisons. Derrière les murs et l'enceinte des usines, les patrons exigent de leurs ouvriers de faire des heures de plus. Les chefs des entreprises poussent leurs employés à fournir un effort plus, sans prendre en considération les limites de l'être humain. J'ai vu Monsieur L se crevait pour juste quarante euros de plus. De plus, de ses heures de travail, il faisait des heures supplémentaires. Tous ces efforts, juste pour sauver les apparences du Parisien. Monsieur L travaillait comme un esclave pour conserver son petit luxe de petit parisien. Et le luxe a besoin de pognon.

Monsieur L, comme tous les Français, aimait emmener sa femme au restaurant.

Monsieur L, comme tous les Français avait un chien. Et cet animal a besoin d'entretien.

Monsieur L, comme tous les Français avait une voiture d'occasion qui tombait en panne. Et qui avait besoin de moult réparations.

Monsieur L, comme tous les Français a besoin d'aller en vacances, pour jouer les touristes. Et les vacances demandent des sous.

Je trouve anormal de travailler comme un chien, pour conserver un semblant de vie. Monsieur L a dépensé ses 40 € en achetant un chariot à sa femme. Il a fourni un effort colossal, pour un objet. Il n’y a pas d'équilibre entre l'effort physique et le prix d'achat. Comme en Algérie, l’Algérien se tue au travail durant un mois entier et, au moment de la paie, il se voit accablé de dettes. La preuve : mon père est mort malade et pauvre. Il y a une injustice dans l'échelle des paies. Pourquoi en France et en Algérie, ceux qui travaillent plus sont-ils moins payés que les autres ? Devant cette injustice, le citoyen français ou algérien se réfugie dans l'alcool. Le système blâme les jeunes des cités d'être des voyous et au lieu d'améliorer leurs conditions de vie, il les punit en les tassant dans des prisons luxueuses. Entre le béton de la prison et le bâton, le jeune citoyen n'a pas de choix. Je comprends d'une part pourquoi, les jeunes Beurs refusent de travailler. Les Français galèrent depuis des siècles et voilà qu'ils leurs annoncent que la caisse est vide. De plus, le système leur demande de travailler à nouveau plus. La jeunesse clandestine se réfugie aussi à son tour dans l'alcool et la drogue. Je ne les blâme pas s'ils pètent les plombs. La clandestinité est un harcèlement, un suicide mental. L'ami de mon ami était parti chez un docteur, qui lui a annoncé qu'une partie de son cerveau responsable des sentiments était figée. Ça ne m’étonne pas que ces êtres humains déracinés et éloignés de leurs familles deviennent des épouvantails. Il y a des clandestins qui sont coincés dans l’Hexagone depuis des années. Dèsespérés, ils sont en manque de tendresse et d'amour. Certains d'eux se réfugient chez des prostitués afin de calmer leurs pulsions sexuelles. Mais le sexe sans une bouffée d'amour ne vaut rien. L'homme n'est qu'une boule de mémoire et la mémoire s'effiloche s'est nous l'entretenons pas. Le clandestin est harcelé par tout le monde :

  • il est traqué par la police ;
  • il est harcelé par les immigrés, qui le menacent de le dénoncer aux flics ;
  • il est exploité par les soi-disant patrons ;
  • il est en manque d'affection et de tendresse ;
  • il est démoralisé par sa famille du Bled ;
  • il est inquiet pour son avenir et jalouse, les autres hommes de son âge ;
  • il est visé par un autre clandestin. Les clandestins dans l'angoisse et le stress, ressemblent à une harde de chiens enragés qui s'entretuent pour une petite pièce, comme les SDF qui se bagarrent pour une bière.

Durant le mois de février et dans le RER, j'écoutais un immigré oranais qui apprenait à sa petite fille un verset coranique. Lorsque soudainement un jeune Algérien venu de nulle part s'arrêta pour lui demander si l'enfant était de lui. L'immigré lui confirma qu'il était son père et le père de trois autres enfants. Le jeune clandestin, comme moi, envia ce jeune père. Tandis que les autres s'enracinent dans le présent et le futur, le clandestin erre dans le flou.

Monsieur Bouteflika, ces jeunes clandestins ont tout perdu. À force d'être rejetée par la société, une partie de leur personnalité sentimentale est morte. Le cœur est une fleur musculaire qui a besoin d'amour. Sinon, elle s'endurcit et meurt. Ces étrangers confrontés au danger vivent sans exister. Il existe des associations qui offrent leur aide à ces rebuts de la société, mais ce n'est pas assez. Plus sombre que l'obscurité de leur clandestinité, je n'ai pas vu. Lorsque le système réduit des êtres humains à devenir des clandestins, chacun d'eux perd son statut d'être humain et devient une bête, un ombre. Le système joue un jeu de dissimulation, en les nommant des sans-papiers. Pourtant, ces clandestins sont des êtres vivants et non des robots dénués des sentiments. La France veut enseigner la Shoah et ne se fait pas faute de l'appliquer sur d'autres êtres humains. Comment peuvent-ils parler de la souffrance des juifs et maltraiter d'autres humains ? Les clandestins subissent une violence morale et psychique. Lorsque le ministre Rama YADEinsiste à prétendre que la France est le pays des droits des hommes. Je doute vraiment qu'elle soit le pays de tous les droits. Le ministre défend l'idée parce qu'elle se trouve comme une femme de couleur dans un pays dominé par les Blancs. Chacun personne en défendant un idéal, défend en premier son intérêt et son idéal. Si la France est le pays des droits de l'homme, il doit cesser de traquer les êtres humains. La France répète le scénario des déportés en expulsant des milliers d'être humains. L'atroce histoire se répète avec la même horreur. Un homme qui a passé des années en France, ne possède strictement rien dans son pays d'origine. Comment peut-on envoyer un homme vers le chaos et parler des droits de l'homme ? Il y a des clandestins qui sont en France depuis plus de dix ans. Le système ressert le cercle autour du clandestin, en signant un traité avec les pays européens. Demain, un pays ne régularisera pas la situation d'un sans-papier sans avoir l'accord de l'ensemble des Vingt-Sept. Le pacte des loups contre des brebis égarées. J’aimerais que nos présidents arabes et africains possèdent un peu de cran et s'unissent pour interdire aux Européens de pomper nos richesses. Je suis déçu de découvrir la richesse de l'Afrique par la bouche des Européens. Le système ne veut pas le clandestin, mais veut son butin. Le système européen ne veut pas que nous travaillions dans le noir, mais il se permet de pomper notre or noir. Le système boude la femme voilée, mais vénère la danseuse orientale.

Avant d'oublier, j’aimeraiss, Monsieur le Président Bouteflika, vous faire part de ma déception et de ma grande tristesse. J'ai touché le fond, le fond de la réalité des jeunes Algériens en France. Une image avait marqué mon esprit, et c'est l'image de Monsieur M, un jeune étudiant que j'avais croisé à Paris et qui travaillait avec moi au noir, deux jours par semaine. Il étudiait à l'université de Paris, je le croisais que durant ses jours de repos et les jours fériés. Ce jeune Kabyle affamé me demandait à chaque fois de lui donner un peu de mon pain. Comme je travaillais tous les jours pour financer ma formation par correspondance au CNFDI et mon livre édité par la société des écrivains, j'apportais avec moi mon casse-croûte, une façon de faire des économies. Les premiers temps, je partageais avec Monsieur M. Mais à force de lui donner, j'avais l'impression qu'il profitait de moi. C'était pitoyable de voir deux Algériens se disputer pour des miettes de pain, alors qu'ils appartenaient à un grand pays truffé de richesses. Nous étions des Algériens riches et fauchés. Moi aussi, je recevais une paie misérable de 25 € par jour. Ce n'était pas énorme. Je l'acceptais afin de payer mon loyer.

Un jour, j'étais forcé d'exprimer à Monsieur M mon ras-le-bol, lorsqu'il m'expliqua, qu'il ne recevait pas de bourse universitaire. J'étais attristé de voir cet étudiant kabyle dans cet état, obligé de jeûner toute la journée et forcé de mettre les mêmes vêtements. Une fois, je fus surpris de voir Monsieur M souriant. Avait-t-il gagné le million ? Non, il avait juste reçu un ticket de resto de 7 €. Nous eûmes même une petite dispute, lorsqu'il refusa de le partager avec moi.

Je trouve pathétique qu'un jeune Algérien soit livré seul dans un grand pays étranger et qu'il soit délaissé par son propre pays. Jamais Monsieur le Président, je n'oublierai les visages des jeunes Algériens qui ont défilé devant moi en France. Mon Dieu ! Ces jeunes sans-papiers étaient venus par leurs propres moyens au pays des merveilles. Au lieu d'un pays moderne, ils étaient affrontés à la réalité d'un pays affaibli. De toutes les origines, ils maudissaient l'instant ou ils avaient franchi le seuil français. Un pays partagé entre la gauche et la droite. Pour la droite, Le Pen exige notre retour. D’ailleurs, ils m'ont déjà demandé de renter chez moi. Il est simple pour des gens de juger, sans prendre la peine de se mettre à nos places.

Nous ne pouvons pas rentrer chez nous, les mains vides. Il est très difficile d'affronter le regard de nos proches au Bled, qui nous ont envoyé en France pour améliorer leur situation. La France et l'Europe c'est le rêve de chaque Africain : faire comme les autres Blédards et tenter sa chance dans l’Hexagone. Nous sommes obligés d'imiter un cousin ou un voisin. Un immigré qui est revenu au pays avec une belle voiture, une belle blonde et un chien. Il est fait le beau et se vante d'être devenu un Français devant les visages faméliques de ses amis, ses voisins et ses proches. Il nourrit par ses mensonges l'imagination des jeunes du pays, profite de leur ignorance et de ce qu'ils ne voient pas. Il invente une histoire, qu'il travaille dans une banque alors qu'il est qu'un simple agent de la sécurité dans un supermarché. Bizarre, ce pays ! Tous les agents de sécurité sont des Arabes et des Africains.

J'ai été témoin du retour des immigrés à leur pays natal. Après une longue absence, ils revenaient avec plein de cadeaux. La nouvelle se répandit vite dans le quartier et à travers toute la ville. Les Blédards disaient : «Tel et tel ont eu leurs papiers !» Ils n'étaient rien ! Et mine de rien, ils sont devenus des Français.

Mon Dieu ! Je suis tombé des nues en découvrant la vraie réalité des immigrés et comment ils vivent. Ils sont rassemblés dans des quartiers pourris et des zones pauvres. La plupart des immigrés font des jobs minables et couramment deux à la fois, pour assurer l'argent des vacances. Ils respirent que durant les mois de juillet et août, lorsqu'ils reviennent au pays pour jouer les Français. En France, ils disent qu'ils sont fiers d'êtres des Algériens. Et en Algérie, ils se comportent comme des Français.

Monsieur Bouteflika, j'oublie ma misère et mon obscurité face à l'errance de nos jeunes Blédards que je croise encore à Paris. J’aimerais, Monsieur le Président, éveiller votre conscience sur la situation des Algériens piégés ici et ciblés par les adeptes de la droite ? They Don't Care About Us, par Monsieur Michael Jackson. Plus qu'une impression, c'est notre réalité de tous les jours.

Durant le mois d'avril de l'année passée, un jeune homme algérien me demanda, s'il pouvait passer avec moi la barrière et prendre le métro. Je n'étais pas contre, tant qu'il n’y avait pas des contrôleurs. Nous serrions un colis facile à expédier au Bled avec une note «paquet indésirable». Je l'ai fait passer avec mon ticket, comme Dina Vierny qui faisait passer des antifascistes vers l'autre côté de la barrière. À l’intérieur du métro, j'ai compris que ce jeune Algérien était un clandestin. Il expliquait à un vieil algérien boîteux qu'il ne possédait rien que ses vêtements portés sur son sac à dos. Déphasé et meurtri, l’Algérien se plaignait de sa mauvaise situation. Hélas, énormément d'Algériens et d'Africains ont tout perdu au pays des merveilles. À cette époque, avant les élections présidentielles, nous étions tous terrorisés par la menace de Sarkozy. Le jeune Algérien clandestin craignait de voir la droite triompher car, du coup, il serait expédié chez lui.

À Paris, j'ai appris à tendre mon oreille pour écouter les histoires de nos jeunes Algériens, alors qu'en Algérie, ils nous racontaient l'histoire de la guerre d'Algérie et que nous étions les enfants de la liberté. Vous étiez des héros et nous sommes des clandestins. Vous êtes la fierté du pays et nous sommes la honte. Mais devant ce gâchis et l'injustice dont, nous sommes victimes. Je vous demande cher Président Bouteflika à vous et à tous les historiens de notre chère Algérie :

 

Pourquoi avons-nous pris l'indépendance ?

 

 

Rien ou presque n'a changé depuis l'année 62. La jeunesse algérienne est marginalisée par le vieux système algérien. Nos aînés trop vieux refusent de renoncer au trône, par conséquent les jeunes sont sacrifiés. Nostalgique et parfois curieux, je regardais la télévision algérienne afin de mesurer le degré de l'évolution des miens. Écœuré par la mièvrerie de nos émissions, je zappais aussitôt. Les médias algériens stagnent encore au point mort. La télévision est l'instrument de l’État et les journalistes n'invitent que les amis du pouvoir. Le seul souci des experts de l'économie algérienne est de nous convaincre par ce sempiternel refrain : « L'Algérie n'a pas les moyens que possèdent les pays Occidentaux. » Pourtant, la machine de l'économie française souffre aussi, en France la caisse est vide. La seule différence entre l’Orient et l'Occident est que les Occidentaux travaillent et multiplient les tentatives pour sortir de l'engrenage, alors qu'en Afrique, nos dirigeants politiques et nos experts de l'économie ne tentent rien. Ils nous mettent des obstacles et nous découragent avec la même excuse : « Les Occidentaux sont plus forts que les Orientaux ! »

Malheureusement, nos hauts supérieurs hiérarchiques nous ont découragés en tuant en nous tout espoir de montrer nos talents. Ils nous ont condamné à vivre sous la supériorité des Occidentaux. L'école et le gouvernement algériens ont brisé l'ambition qui germait dans l'esprit de chaque jeune Algérien. Après l'indépendance, nous n'avons pas le droit de faire nos preuves. Nous sommes comme des pèlerins qui tournent en rond autour de leur trophée, l'indépendance. Nos hauts supérieurs hiérarchiques refusent de comprendre que cette indépendance est le fruit de leur combat. Mais nous, qu'est-ce que nous avons réussi ? Rien, nous vivons en fêtons leurs exploits et en écoutant leurs histoires. Je découvre affreusement que ce n'est pas les Occidentaux qui sont forts, mais les Orientaux qui sont faibles et surtout nonchalants. Autant je suis triste pour les martyrs algériens qui sont morts pour rien, autant je le suis pour les jeunes Algériens exclus par les systèmes. Certains sans-papiers désespérés souhaitent même que le nouveau Président Sarkozy nous renvoie au Bled. Notre déportation aura l'air d'une expulsion massive, d'un suicide collectif. Au moins, nous aurons une excuse pour nos parents qui nous attendront comme des héros. Nous leurs dirons que la volonté de Monsieur Sarkozy l'a emporté. Nombreux, l’impact des reproches serait partagé. Tandis que tout seul, aucun Blédard expulsé ne pourrait supporter le regard de sa famille et affronter les reproches de tous les autres. Les Blédards refusent de comprendre que l'Europe n'est pas l'Éden.

J'ai des amis blédards qui veulent monter au Nord et venir en France. Pourtant, j'ai essayé de les persuader de ne pas venir. Que la France n'est pas si différente de l'Algérie. Ici les Français affrontent nos mêmes problèmes : chômage, pouvoir d'achat, crise de logements, maladies …etc. Mais aucun d'eux ne veut me croire. Ils croient que je suis contre leur venue en France. Personne ne veut me croire ! Comme je refusais d'écouter les autres qui me mettaient en garde et me déconseillaient d'aller à l'étranger. Lorsque nous sommes loin du danger (la réalité), nous ne mesurons pas les risques. Malgré les alertes, nous refusons de croire et opiniâtres ne persistons à poursuivre notre marche. Comme les soldats américains qui croient que la guerre est comme au cinéma. En Irak, les jeunes bleus découvrent que la réalité est très différente de la fiction. Pareil qu'eux, je découvre la dure réalité de la clandestinité.

De cette façon, je ne crois pas que la délinquance juvénile est le résultat d'une violence volontaire et délibérée de la par des jeunes. Je crois surtout, que la violence à ses causes et ses facteurs. Si Monsieur Nicolas Sarkozy remet tout à «l'inné», Diam's lui répond dans sa chanson «Cause à effet». Si j'erre à Paris, l'errance n'est pas une chose innée chez moi. Mes ancêtres étaient des nomades et par instinct de survie cherchaient des meilleures conditions de vie. Et ainsi soit-il, je suis partie ailleurs chercher la source du bonheur. Mon pays en voie de développement a besoin de temps pour se moderniser et je ne peux pas l'attendre. J'ai déjà trente et six ans ! Comme Monsieur À, ce clandestin était conscient de notre temps perdu et de nos vies qui expiraient dans l'obscurité. Jaloux, il me parlait de ses frères mariés au Bled et de leurs enfants. Les clandestins rêvent d'avoir une situation normale et stable, alors qu’dans l’Hexagone nous sommes les otages d'une étrange Ère. Les politiciens parlent des injustices commises ailleurs et ferment les yeux sur les supplices que subissent les sans-papiers. Traquer les sans-papiers n'est-il pas un crime contre l'humanité ? Où peut-être les clandestins ne sont-ils pas des humains ?

  • Monsieur À, comme d'autres jeunes Blédards, beaux comme des Dieux me racontaient leurs soucis. Ils essayaient de trouver en moi un peu de consolation dans un pays moderne dominé par l'égoïsme, l'individualisme et l'amour de l'argent. Les princes du Bled ingénus et naïfs, me parlaient de leurs rêves et de leurs angoisses. Parfois, ils se confessaient à moi d'un péché commis. Au lieu de les juger, je les comprenais sans les encourager. Monsieur A me parlait des prostitués de Pigalle et de Strasbourg.
  • – Pour dix euros, me dit-il, tu soulages tes pulsions !
  • Au lieu de flétrir ce pécheur mille fois ? Je le comprenais, sans légitimer son acte. C'était un être humain qui avait des désirs sexuels et qui était sous d'énormes pressions. Il faut être une bête pour supporter ce qu'endurent les clandestins. Et parce que j'étais un croyant, je demandais aux désenchantés de croire en Dieu, de patienter et de tenir le coup. Devant notre extermination et la menace de Sarkozy qui étaient inévitables. À la façon de Roberto Benigni dans «La vie est belle», je promettais aux clandestins que notre libération était proche. J'adoucissais leur avenir, en leurs dessinant un arc-en-ciel en pleine grisaille. Et comme le trader Jérôme Kerviel, je faisais un détournement de fonds. Au lieu d'avouer aux clandestins, que nous serions emmenés vers des camps des concentrations. Je prétendais que nous serions tous régularisés et nous dévideront à nouveau des hommes libres. L'essentiel était que nous serions considérés comme des êtres humains à part entière. Qu'importe ! L'essentiel était de calmer les angoisses des malheureux même avec un mensonge blanc.

Bizarre cette vie, qui joue avec le sort des êtres humains. Du jour au lendemain nous étions devenus des sans-papiers. Tous les Blédards étaient d'accord qu'une des raisons de l'afflux des Blédards vers l'Europe, était dû à ce nouvel immigré. Il revenait au Bled, avec une belle voiture made in France et accompagné d'une belle blonde. Au lieu de raconter sa vraie réalité en France et d'avouer les difficultés qu'il affrontait. Il inventait une histoire onirique aux jeunes innocents assoiffés de liberté. L'immigré promettait au jeune Blédard de lui envoyer uncertificat d'hébergement et de l'accueillir dès son arrivée en France. Les immigrés jouent avec les sentiments et les rêves des jeunes en leurs promettant l'eldorado, alors que dès notre arrivée, ils nous tournent le dos, puisque eux-mêmes sont les otages de l'expansion du racisme. Maudits mutants ! Ils jouent avec les vies des jeunes Blédards. J'ai perdu mes illusions, après mes innombrables chocs. Parlons de mes chocs, du premier par exemple :

  • Je n'oublierai jamais qu'en l'an 2000, j'ai été mis à la porte par ma tante toulousaine. Je venais juste d'arriver d'Algérie, rempli d'espoir, d'enthousiasme et d'amour. À Toulouse, au lieu d'être accueilli les bras ouverts, j'étais renié par ma famille française.
  • La directrice de l'institut catholique toulousain qui m'avait invité à venir étudier le français chez eux me demanda de rentrer chez moi, parce que j'étais venu avec un visa de court séjour. Je n’oublierai jamais ce décembre toulousain, c'était le mois le plus froid de tous mes hivers.
  • Le mari d'une voisine m'avait hébergé durant mes huit jours passés à la ville rose. Ce Beur n'a pas hésité à prendre 1300 francs de mon argent pour payer mon billet d'avion, un aller sans retour. Je n'ai rien décidé, ils ont tout planifié à ma place. Je me suis retrouvé en Algérie vidé de tout, les Toulousains m'ont tué. J'ai vécu la même situation dès mon arrivée à Paris. J'ai contacté des voisins, des amis parisiens et personne n'a voulu m'aider. Ils m'ont tous renié et abandonné.

J'ai découvert une vérité terrifiante sur les habitants de l’Hexagone. Il y a plus d'hommes ignorants que d'hommes instruits. À force d'être malmené par eux, je constate tristement que les Français sont inconscients de l'enjeu que prend chaque africain. La directrice toulousaine n'était pas consciente de ce que chaque Africain investissait tout dans ce voyage. Elle et les autres ne mesuraient pas l'enjeu pris par chaque personne qui désirait venir en Europe. Aux yeux des Européens, nous sommes des arriérés et des sauvages, nous ne signifions rien. Ils nous prennent pour des robots téléguidés. Ils veulent que nous venions quand, ils le décident et que nous disparaissons quand, ils le désirent. Les Français sont d'une indifférence et d'une froideur qui me choque. Je me demande, s'ils n'ont pas influencé les immigrés. Personnellement, ces derniers sont des mutants à mes yeux. Des hommes et des femmes dénués de sentiments et infectés par le désir d'amasser de l'argent. En France, ils vénèrent deux choses, l'argent et le sexe. Les nouveaux et les anciens immigrés n'ont rien à voir avec les Blédards. Bien qu’ils revendiquent leurs origines, ils nous ne ressemblent pas.

De vrais mutants obligés à lésiner sur tout, de vrais radins. Les seuls rescapés de cette immigration sont une poignée de jeunes Beurs nés ici. Sinon, la plupart des immigrés qui sont en France depuis les années 60 et les nouveaux récemment régularisés sont tous contaminés par l'hypocrisie, l'égoïsme, la cupidité, l'avarice, l'avidité et la rapacité.

Les signes communs entre tous les Français sont l'individualisme et l'absence de la confiance. En France, règne une méfiance incroyable. Déjà, sur le Web, la plupart des internautes français interprétaient mal mes gestes, ils voyaient le mal partout. Ça ne m’étonne pas qu'ils interprètent mal le Coran. À force d'être heurté à la méfiance des Français, j'ai pris du recul. Aujourd'hui, je sais que le Français est capable de tout. L'immigré français est pire encore que le Français : en s'intégrant, ce dernier n’a pris que le mauvais côté de sa personnalité. Le mutant est composé d'un concentré de ses propres défauts et les défauts de son hôte. J'étais surpris et écœuré de découvrir que les immigrés travaillaient et vivaient dans des mauvaises conditions. La plupart possédaient deux jobs et ne voyaient à travers les clandestins que l'intérêt de gagner de l'argent. Il ne faut pas croire à leur sourire sournois. Les immigrés ne voulaient que profiter de nous. Ainsi :

  • l'immigré s'il vous héberge, c'est pour l'argent ;
  • l'immigré s'il vous aide, c'est parce qu'il s'aide. Il sait que, demain il aura besoin de vous. En France, l'immigré vous donne pour prendre après ;
  • jamais un immigré ne fait un geste au nom de Dieu. Au pays du capitalisme tout à un prix ;
  • les immigrés accusaient les Blédards de se marier avec eux, juste pour les papiers et qu'ils se servaient d'eux pour avoir la fameuse carte de séjours. Mais ni les Français, ni les immigrés ne parlaient des Blédards qu'ils dépossédaient et exploitaient. Tous les Blédards clandestins qui n'ont pas droit à la parole vous raconteront les maltraitances, les abus et les harcèlements sur la santé mentale et physique causés par les Français et leurs mutants. Personne n'évoque l'injustice subie par les clandestins et les Blédards. Parce que la France n'est pas le pays des droits de l'homme. La France est le pays des droits du français ;
  • le système protège le Français et même, s'il abuse de vous. Vous n'êtes pas un Français, donc vous n'existez pas et vous n'avez aucun droit. Pourtant, les politiciens insistent à faire de ce pays le pays des droits de l'homme. J'ai recueilli verbalement le récit des Blédards clandestins abusés par les Français et surtout par les immigrés. Si les soi-disant patrons européens payaient leurs employés clandestins, les grands voleurs étaient les soi-disant patrons arabes, africains et turcs. Le Français exploite jusqu'à la moelle, mais vous êtes payés, alors qu’un patron arabe, il vous exploite et vous vole ;
  • afin de donner une belle image de l'Occident et de la France, les médias français parlent de la femme afghane abusée, alors qu’à chaque fois la France est secouée par des affaires de femmes battues et tuées. Sans que j'oublie d'évoquer les femmes sans-papiers frappées et torturées par leurs maris et certains d'eux sont des beurs. Des hommes clandestins exploités par leurs conjointes françaises. Ces faits, personne ne les évoque. Car les sans-papiers ont perdu leur statut d’être humains et seuls les Français comptent aux yeux de la loi. Les sans-papiers restent vulnérables devant leurs futurs conjoints. Surtout durant la période transitoire qui se situe entre le temps de signer le contrat de mariage et recevoir sa carte de séjour. En faveur de leur contribution a transformé les clandestins à des humains et en leurs rendant la dignité, les conjoints français les harcèlent et les menacent. N'appellent-ils pas l'opération de la transition une régularisation ? Otages de la clandestinité, tous les moyens sont bons pour sortir de l'engrenage. Cette période que le système a prolongé, afin de protéger les Français des divorces précoces, cette période est très difficile pour le conjoint clandestin, qui doit supporter tous les caprices de l'autre. Le petit prétexte est valable pour que le conjoint français le menace d'annuler le mariage. Et si le mariage est annulé, le conjoint clandestin sera expulsé. Donc, durant ses cinq années, le conjoint clandestin doit supporter les harcèlements de son conjoint français. Je prends l'exemple de deux femmes clandestines :

o  la première fille du Bled était battue par son mari marocain ;

o  la deuxième a fait une fausse couche, parce qu'elle était aussi battue et son deuxième mari lui a interdit d'avoir des enfants, alors qu'ils avaient décidé de faire un enfant avant de se marier.

Je n'accuse pas tous les Français et tous les immigrés. Mais il y a des salauds qui profitent de la fragilité des misérables clandestins durant cette période de transition. Je comprends maintenant pourquoi les jeunes filles sans-papiers épousent de vieux hommes. Lorsque la ministre Rama Yade insiste à faire de la France le pays des droits de l'homme. Cela me fait rire ! Les clandestins et les SDF ne sont-ils pas des hommes ? Le statut de l'homme ne suffit plus en France, puisque des hommes meurent de froid et de faim chaque jour. Beaucoup de femmes subissent encore des injustices et beaucoup souffrent en silence. Je demande à Madame Rama Yade d'arrêter d'insister à faire de ce pays le pays des droits de l'homme. Tous les pays du monde devront être les pays des droits de l'être humain.

Monsieur le Président Bouteflika, ne prétendez pas que je dénonce ! Tous les hommes savent ce que subissent les chrysalides clandestines durant la période qui précède leur régularisation, leur éclosion. Mais la France ne se préoccupe pas des déchets humains, à ce stade les femmes clandestines ne sont pas encore des Françaises. La France ne protège que les siens, qui possèdent la nationalité française. Je ne dénonce rien, puisque tous les Français ont connaissance de ces dossiers et ferment les yeux.

J'ai croisé aussi le chemin d'un Blédard qui a été exploité et dépouillé par une Française de souche. Il était vulnérable dans cette période qui précédait la régularisation de sa situation. Il ne pouvait pas protester et à chaque excuse elle lui disait :

– Je m’en moque, je veux divorcer !

Elle était même allée à la préfecture pour annuler leur mariage. Il suffit que le conjoint change d'avis, pour voir le sans-papiers perdre son rai de lumière. Voilà pourquoi, dans cette impasse les futurs Français sont obligés de supporter les humeurs des vrais français. Il devait supporter le poids de la faveur que La Française lui faisait. Selon elle ! En le ramenant en France, elle le sauve du de son pays du Tiers-Monde et mine de rien, il était devenu un Français. Ce Marocain a tout quitté pour elle et pour la France. Bizarrement, un Français était aussi convaincu que la France coloniale a modernisé l'Algérie et que nous avons une dette en faveur des Français. La Française, nourrie par le même esprit, pensait que le Marocain devait payer et le prix était très cher. En France, la plupart des conjoints changent d'avis et refusent de se marier à la dernière minute. J'ai croisé aussi le cas d'un ami qui a été la proie d'une Beurette. Depuis, il tient une rancune sans fin, à tous ceux de son origine.

Je découvre que les Blédards n'ont rien à envier chez les Français. Nous n’avons aucune faveur envers les Français et leurs mutants. Nous étions des Blédards fortunés et ils nous ont ruinés. Être un Français n'est ni un luxe, ni un privilège. Comme tous les citoyens du Tiers-Monde, le Français est dans la merde. En Algérie, il y a des Blédards qui vivent mille fois mieux que les immigrés et les Français. J'étais étonné de voir des immigrés et des Français faire des petits boulots. « Tiens ! m’écriai-je. Je croyais, que les Français étaient instruits et riches ! » Sincèrement, je suis fasciné par leur talent de comédien. Puisqu'ils nous ont vraiment bluffés.

Monsieur le Président Bouteflika, vous seriez écœuré de voir ces quartiers parisiens truffés d'immigrés !

Mon Dieu ! Ces favelles Parisiennes sont des quartiers très sales et insalubres. Les immigres y vivent dans les bidonvilles du 18ème, du 19ème et du 20ème arrondissement. Ces quartiers délabrés sont très vieux, très sales. Une question persiste devant ces ruines. Que faisaient les Parisiens durant les années passés ? Étrangement beaucoup de quartiers en plein Paris et dans la banlieue ont échappé à la modernité. Si ma situation était régularisée, je refuserais d'habiter dans ces favelles Parisiennes

L'individualisme, l'égoïsme et l'indifférence chez les immigrés ne sont pas des défauts innés chez eux. Il faut comprendre les raisons de leurs mutations. Ce n'est pas l'homme qui descend du singe, mais c'est l'homme qui tombe vers simiesque. Il est facile de juger et de condamner, mais prenons le temps de comprendre les comportements de l'autre. Le système par manque de temps, au lieu de comprendre, il agit et agit mal. Le système a toujours besoin de solutions et même ses réponses n'arrange pas tout le monde. La plupart des immigrés adultes connaissaient la misère et venaient des pays pauvres déjà colonisés. Sans le vouloir, ils étaient propulsés dans des pays capitalistes. Des pays qui vénéraient une chose : l'argent, le pouvoir de l'argent et l'amour de l'or.

Rien ne m'étonne à présent, jusqu'à voir des immigrés exploitaient leurs frères. Je comprends pourquoi, les immigrés dans les années passées revenaient au Bled avec des produits français, c'était un vrai business. Ils vendaient même leurs vêtements qu'ils portaient durant tout le mois. Aujourd'hui, je sais qu'ils vendraient leurs âmes pour de l'argent, s'ils pouvaient. À cette époque comme la plupart des Blédards, j'étais naïf et bluffé par leur côté français. Ils savaient la valeur et le pouvoir de l'argent, alors que nous les Blédards nous étions occuper à savourer les délices de l'indépendance. Les immigrés possédaient une longueur d'avance par rapport à notre naïveté.

La plupart ont quitté leur pays natal pour fuir les régimes politiques. Les Maghrébins lèchent l'euro, parce qu'ils ont connu la misère. Durant des années les mutants radins nous saoulaient avec leur semblant de civisme. Par exemple, les immigrés marocains étaient tellement privés du luxe qu'en France, ils vénèrent le petit centime. D’ailleurs, j'ai travaillé au noir avec des immigrés marocains et j'étais surpris par leur volonté de travailler sept jours sur sept. Je ne suis pas encore étonné de voir des vieux immigrés marocains cherchaient dans les ordures. Leur mémoire a sauvegardé ses moments de misère à l'époque de leur défunt roi Mohammed V, alors que le sultan vivait comme un Dieu, son peuple crevait de faim. En France, les Marocains malgré qu'ils vivent mieux qu'au Bled. Ils n'ont pas oublié leur misère et possèdent un amour démesuré pour l'argent. Certains marocains sont même obligés de chercher leur nourriture dans les poubelles. Curieusement, voir des immigrés ramasser dans les ordures ne choque personne à Paris. En ce fléau touche les Algériens et les autres immigrés. Pourquoi ce qui me choque ne les choque-t-il plus ? Ces vieux immigrés qui pullulent à la fin des marchés pour ramasser des fruits et des légumes pourris. Dans les années 60 et dix étaient que des enfants. Ces enfants de la misère et de la pauvreté étaient habitués à glaner les miettes dans les ordures. Affamés par un colon français ou par un roi maghrébin, les vieux immigrés se ressemblent tous. Tandis que certains adultes essayent de transmettre la radinerie à leurs enfants, d'autres essayent de leurs épargner les années noires. Ne Sommes-nous pas confronté à ce besoin d'offrir une meilleure existence à nos enfants ? Encore la mémoire collective joue un rôle dans chaque société.

Les vieux immigrés ont vécu la guerre et l'après guerre. Ils vivaient déjà d'une manière précaire. Des anciens immigrés algériens me racontaient leurs dures enfances. La France les a tellement torturés et privés de nourriture, qu'ils étaient obligés de glaner des grains de blé. La même France veut me réduire à l’État d'esclavage. Mais je refuse de céder et je résiste pour conserver mon intégrité. Ce n'est pas à moi de changer, mais au système.

J'ai vécu chez une Marocaine qui, en sortant des toilettes, ne tirait pas la chasse d'eau. J'étais choqué et obligé de voir ce qu'évacuaient ses entrailles. Mon Dieu ! Je croyais que je n'allais pas sortir indemne de sa maison. Elle était écœurante et une vraie radine. En France, les immigrés se prétendent économes. Mais en réalité, ils sont d'une extrême radinerie ! Économiser de l'eau ne lui interdisait pas de tirer la chasse. La plupart de mes soi-disant patrons immigrés étaient des radins et travaillaient avec de vieux matériaux. En 2004 une grue achetée vingt-huit ans plus tôt s’était effondrée sur une petite fille, Léa. À Paris, les commerçants et les soi-disant patrons immigrés dépensaient moins dans n'importe quel métier. Leur boulot était, comme le décrivait les Français, « un travail d'Arabe». À Paris, j'ai compris le sens de cette phrase. J'étais vraiment écœuré par la manière que les immigrés arabes faisaient leur travail. Il faut juste voir les stands des marchés occupés par les Arabes et les Africains. Vous n'avez pas l'impression d'être à Paris, ce n'est pas des marchés dignes d'une belle capitale. Tout chez les soi-disant patrons immigrés est répugnant, ils gagnent beaucoup en dépensant moins. Je comprends aussi pourquoi, les Français me traitaient «de sale Arabe». Question d'hygiène, les patrons immigrés ont vraiment un gros effort à faire. Je rejoins le système qui me combat dans quelques points. L'intégration est un point crucial dans la société française. Mais l'intégration s'adresse à qui ? Elle ne s'adresse pas aux enfants qui sont nés et grandis en France. L'intégration vise une majorité d'immigrés qui n'étaient pas nés en France. Étrangement, j'ai croisé des immigrés parisiens qui ont passé des années en France et pourtant jusqu'à nos jours, ils ne respectent aucun code de conduite. Sincèrement, je ne peux blâmer ces mutants, puisque les politiciens français manquent de vivacité d'esprit. Suffit-il de parler le français, pour être un Français ? Je trouve absurde la volonté politique de résumer l'identité française dans une langue parlée. Comment peuvent-ils réduire le français a devenir un perroquet ? Le français est plus qu'une langue, il possède une histoire, un code à suivre et une ligne de conduite. Malheureusement, beaucoup d'immigrés ne respectent pas les codes, les lois et s'intègrent en zigzaguant. Au pays du capitalisme, si vous possédez un capital, vous n’avez même pas besoin de parler le français. Certains immigrés ne sentent plus le besoin de s'intégrer et de respecter les règles, juste parce qu'ils payent leurs impôts à l’État. Impossible que l’Hexagone retrouve un jour son apogée à cause du non-respect des lois. La France devant une compétitivité commerciale et politique contre l'Amérique et la Chine, cherche à remplir sa caisse vide.

Comment demanderez-vous un jeune Beur de respecter les règles, si on lui demande de s'intégrer à son propre pays, alors que des étrangers sont acceptés juste parce qu'ils arrivent avec un fond de commerce. Énormément de Chinois qui ne parlent pas un mot français vivent en paix à Paris, alors que les jeunes Beurs traqués et harcelés par la police sont traités de voyous. L’État français accuse les jeunes Beurs et Blacks d'être des jeunes violents et bruyants. En observant bien, il n’y a pas plus dangereux que les Chinois. Les Asiatiques sans bruit et à la douce, envahissent Paris. Ils sont partout à chaque coin, vous trouverez un magasin chinois. En réalité, en France l'identité française dépend du fric et du chic.

L'histoire nous enseigne que chaque victoire appartient à un grand leader. Si demain ce leader disparaît, il faut trouver un remplaçant à la hauteur de celui qui le remplace. Si un archer quitte rang, il faut le remplacer par un autre égale et habile que lui. Les Français obsédés de rester permis les premiers pays puissants, cherchaient mutuellement le bon successeur à François Hollande, à Zizou, à l'Abbé Pierre et à Johnny Halliday. Le problème réside dans ce besoin de mettre le sceptre du pouvoir entre les mains d'un seul homme. Les responsabilités sont destinées à un seul homme, un seul joueur, un seul patron et un seul roi. Si ce dernier disparaissait tout disparaît avec lui. J'ai regardé un reportage sur la chaîne ARTE, sur un ancien peuple juif. Les juifs s'interdisaient de divulguer leur secret hors les frontières de leur clamp. Lorsque ces derniers ont disparu, leur secret a disparu avec eux. L'égoïsme humain reste un obstacle. Qui succédera à qui ? Qui pourra être le vrai héritier ? Au foot les entraîneurs français devaient penser à trouver le successeur de Zizou avant que ce dernier ne prenne sa retraite. Ils auraient dû mettre un jeune stagiaire à côté du meneur du jeu, afin d’hériter de son héritage et ses secrets sportifs. Mais Zizou donnerait-il ses secrets de jeu à Benzima ? Tout homme souffre du fléau de la jalousie et de l'ego. L'ancien joueur français supporterait-il de préparer un nouveau jeune et le voir évoluer mieux que lui. Avant de transmettre, il faut savoir transmettre à qui ? Chaque patron et leader doit répondre à des critères stricts. Le peuple juif refusait de transmettre son secret par peur d'être mal utilisé. Cet étranger, ce nouveau à qui nous remettons notre secret, serait-il à la hauteur de nos attentes ? Les juifs ont choisi de garder leur secret, parce qu'il est peut-être le fond de commerce. Aujourd'hui, les grandes entreprises devenues des forteresses gardent les recettes de leurs réussites entre des murs blindés. Faut-il cloner les leaders ? Où tout juste changer de stratégie. Au lieu de miser sur un seul héritier, misons sur la masse. Tant que le secret est largement enseigné, tant que le risque d'une disparition est minime. Aujourd'hui, au lieu de compter sur Ben Zima, il faut chercher ses frères jumeaux et ses sosies de jeu. Et s'il n'existe pas ? Il existe sûrement. Il faut juste chercher cet autre successeur. La France a perdu, parce que Zizou était sur les bancs de la touche. Mais jusqu'à quand, devrons-nous marcher sous les pas d'un seul chef ? Les Français manquent d'enthousiasme et de volonté.

Je viens de décrypter la réalité. Aujourd'hui, je refuse d'être sous les commandes d'un supérieur, quel qui soit. Je veux au-dessus ma tête ni un directeur, ni un ministre, ni un Président ni un dictateur. Je ne me rebelle pas, mais les rois sur leurs trônes ignorent ma situation. Peut-être les espions leurs rapportent des nouvelles d'en bas, une façon de nous faire croire qu'ils sont au courant de tout. Un seul chef d’État ne suffit plus à gérer la vie de millions de citoyens. De plus, l’État opère par priorité. Je sais que je ne serai jamais une priorité aux yeux des politiciens. En Algérie, j'étais un minable professeur de dessin que personne ne voulait recevoir. Monsieur le directeur est occupé ! Monsieur le directeur est en réunion ! Monsieur le directeur est sorti pour une inspection ! Monsieur le directeur désire vous recevoir, vous n’avez que cinq minutes, parce que l'emploi du temps du boss est très chargé. Quoi, cinq minutes ? Comme si je n'étais pas pressé ! Comme si mon agenda était vide ! Ce problème existe aussi en France, ils opèrent par des priorités. Dans la crise du logement, le système ne loge que les couples avec enfants. Pourquoi les systèmes algérien et français ne se chargent-ils pas de construire des logements pour les grandes familles, d'autres destinés aux nouveaux couples et aux célibataires ? En France, Madame A posa une demande de logement. Youpi ! Elle a reçu un courrier d'une association, qui lui avait trouvé une petite pièce. Madame A, qui vit seule, était folle de joie. Sa joie n'a pas duré très longtemps, puisqu'elle n'était pas la seule candidate. Le système français privilégie la citoyenne fertile, rentable, riche et en bonne santé. Madame A était une femme célibataire sans enfant et endettée. Comme les Français aiment la paperasse ! Madame A leurs a envoyé tout un dossier. Un remue-ménage gratuit, puisque la malheureuse femme n'a réussi à avoir ce petit logement. Depuis, elle galère toute seule. Le système lui demande d'attendre et me demande aussi de patienter avec les handicapés, les retraités, les stériles, les malades et les SDF. C'est ce que les conseillers juridiques parisiens m'ont proposé ! Si le système fonctionne avec des lois rigides, nous les êtres humains nous sommes muables. Si les lois sont créées pour durer, les citoyens sont de pauvres mortels. Je suis étonné d'apprendre qu'en France des adultes sont jugés actuellement, alors qu'ils étaient mineurs à l'heure des faits. Précisément, je refuse d'attendre et je refuse de vieillir sur le banc des désenchantés. Je ne suis pas au-dessus de la loi, mais je suis en droit de protester. Existe-il vraiment une loi ? Monsieur Sarkozy avec ses réformes n'arrête pas de modifier les lois et les conventions. L'affaire d’Outreau en France et l'affaire de Worms en Allemagne, montrent le dysfonctionnement du système européen. J'ai examiné rapidement le rapport fait par la commission d'enquête chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice et j'étais très étonné par les bavures commises par la chaîne pénale. Si certains citoyens français ferment les yeux devant les injustices, les autres préfèrent faire leur propre justice au lieu d'entrer dans la spirale des procès, qui durent des années. Je comprends aujourd'hui pourquoi les Américains emploient des détectives privés afin de mener les enquêtes. Les citoyens ne font plus confiance dans la machine judiciaire. Ni l'acquittement définitif des innocents d'Outreau, ni les indemnités et les excuses n'effaceront les séquelles du passé. Des vies gâchées et une quiétude confisquée au nom de la justice. Peut-être la France est réputée d'être le pays de la justice, mais faut-il supporter les procédures judiciaires et résister jusqu'à la fin du procès. La justice française est malade. J'espère n'être jamais confronté à la justice française et ne jamais m'assoire sur le banc des accusés. La suppression des juges d’instruction est-elle une bonne affaire ? Je doute. Comme pour les hôpitaux. Au lieu d'attendre des longues heures, créez des centres spécialisés ! J’en ai ras-le-bol d'attendre et de voir passer devant moi les autres favoris. Quand serai-je un cas prioritaire aux yeux des administrations ?

Je veux m'intégrer à la société française, mais à condition d'être un citoyen prioritaire. Pour être le favori du roi, il faut le prouver. Et pour le prouver, il faut fournir des papiers ! Vous leurs donnez des papiers, pour qu'ils vous remettent d'autres papiers. Être un Français est devenu une affaire de race, de paperasse et de billets. Au pays des droits de l'homme, être un humain ne suffit plus. Il faut prouver au système que vous l'êtes. Les SDF sont des Français et pourtant, au lieu de leurs offrir des logements le système leurs distribue des tentes. Les Enfants de Don Quichotte ne sont pas les enfants de la France. L'identité française se perd au profit des riches. Être Français, ce n'est pas revêtir un habit particulier. Peut-être l'habit ne fait-il pas le moine, mais l'habit donne une certaine crédibilité dans notre Ère. Malheureusement, beaucoup d'immigrés enfilent l'habit sans comprendre sa valeur. Comme des croyants qui ne respectent plus l'habit de la foi. La France ressemble aussi à un temple bouddhiste et chaque adepte doit se plier à sa discipline. Mais comme dans chaque discipline, il y a des rebelles. Dans le temple, des Français de pure souche ne donnent pas de bons exemples aux nouveaux adeptes. Je suis d'accord, qu'il faut sauver l'identité française, à condition que les Français ne trahissent pas leur réputation et leur civisme. Comment demanderont-ils à un étranger de respecter leurs règles, s'ils ne les respectent pas eux-mêmes ? J'ai travaillé avec un soi-disant patron blanc qui commandait mon soi-disant patron arabe. À mes yeux, ce soi-disant patron français reflétait le beau profil de l’homme occidental. C'était un homme blanc, d'un blanc immaculé. Il était civilisé, très poli et doté d'une conduite irréprochable. À nouveau, j'étais séduit par cet homme moderne. Comme tous les Parisiens, il avait un chien de race et il allait à la chasse. J'étais tellement fasciné par le Français que j'ai renié mon patron arabe qui le volait. À la fin, j'ai découvert que l'Arabe volait le Parisien, parce que celui-ci le volait. L'incroyable est que le Français que j'admirais m'a demandé de voler son propre pays. Comment le système peut demander à un étranger de s'intégrer, si les Français ne s'intègrent que superficiellement à l'ordre ? J'ai vu des Français voler, mentir et piller. J'étais choqué, alors comment pourrais-je respecter les règles du jeu, si les Français ne les respectent pas.

Je ne condamne pas et je ne juge pas. Je peux comprendre leurs raisons. Le Français réagit à sa logique. Ce soi-disant patron parisien travaillait au noir, car il était épuisé par les impôts. Ce patron n'avait marre de travailler pour les chômeurs. Il a tout à fait raison, les uns travaillent et les autres sont payés sans rien foutre. Beaucoup de Français sont obligés de travailler avec les Arabes, puisque les jeunes Français fuient certaines activités. Les travaux forcés que je faisais au noir, aucun Français ne les ferait. En réalité, ce n'est pas avec une gaieté de cœur que certains Français me serraient la main, ils étaient obligés. À Barbès, un Français s'est fait voler sa veste dans sa voiture et me soupçonnait d'être le coupable. En France, dès que vous êtes un Arabe, ils vous suspectent d'être un voleur. Parce qu'eux, ils ne volent pas ! Cet homme désespéré de ne pas trouver son bien, m'a dit :

– Nous ne sommes pas chez nous ?

Sa petite phrase signifiait énormément de choses. Ce Français voulait me faire croire que les Français ne volent pas. L'homme blanc pleur pour une veste volée, alors que les Occidentaux nous ont volé nos vies. Ce Blanc se lamentait pour une France qui a changé, alors que les Français ont changé la carte géographique du monde. Ne sont-ils pas introduits jusqu'à nos cerveaux et changer nos façons de penser ? Drôles de français, ils sèment la zizanie et pleurent sous le pied d'un mur tagué. Cet homme qui me soupçonnait d'avoir volé sa veste, était naïf. S'il a laissé les portes de sa voiture ouvertes, pourquoi blâme-il le voleur ? Même Monsieur L s'est énervé en sachant que j'avais l'aide médicale. Le Parisien ne supportait pas que je me fasse soigner gratuitement, alors que lui payait 20 €. Et alors ? ? Lui répondais-je. Monsieur L a oublié que la France a pillé l'Algérie depuis un siècle et demi. D’ailleurs, combien de fois à Paris, mon travail était saccagé par des Parisiens blancs qui partageaient mon espace. Ils ne le faisaient pas devant moi. Je les observais en flagrant délit en train de bousiller mon travail. Pourtant, j'ai toujours aidé ces Parisiens frustrés de voir un immigré mieux qu'eux. Je refusais de répondre à leurs mesquineries et de rentrer avec eux dans des bagarres inutiles. Je ne suis pas venu en France pour répondre à la bassesse et à la vulgarité des hommes.

D'un côté, je comprenais leur réaction et répondre à leur agression était à mes yeux une régression. Je suis venu en France pour évoluer et non, pour entrer dans des vieux conflits. Les jeunes ont de la rage et de la haine.

Revenons à notre sujet de l'intégration. L'utilité de l'intégration se voit dans la différence entre le travail des Arabes et des Français. Si les Français font un travail en ordre et bien organisé, les Arabes font un travail bâclé et la main d'œuvre fait presque tout le travail. J'ai bossé avec des Arabes et sincèrement tout était fait d'une façon médiocre. Monsieur L aussi qualifiait mon boulot de « travail d'Arabe », en faisant allusion aux immigrés. Pourquoi les immigrés font un travail bâclé ? L'intérêt de ses soi-disant patrons immigrés est d'amasser de l'argent sans dépenser beaucoup et en envoyant tout leur bénéfice au Bled. Un Français a le sentiment qu'il travaille pour son pays. Il s'investit, achète des machines neuves et fait un boulot propre. L'immigré faute de reconnaissance par l’État se sent menacé par d’éventuelles expulsions. Bien que le patron immigré vive avec ses enfants ici, il est toujours sujet d'attaque. La preuve :, à chaque instant les médias ressortent le sujet de la légitimité du statut de l'immigré en France. Ils lui demandent de s'intégrer et le traquent en mettant en doute son appartenance. Le petit incident est un prétexte pour accuser l'immigré de la violence. Comme si avant la venue des immigrés la France régnait dans la paix absolue. Sans oublier le fantôme de Le Pen qui les menacent à chaque fois de les expulser. Pour s'intégrer dans une société, il faut se sentir en sécurité. Que les Français arrêtent de leurs demander de prouver leur nationalisme.

À cause de l'instabilité en France, les soi-disant patrons immigrés investissent au Bled et même si leur argent est souillée par la sueur des clandestins exploités. Les soi-disant patrons diront, qu’ils font du bien aux clandestins. Ils se justifieront en disant, qu'ils rendent un grand service aux sans-papiers… ! D’un certain côté c'est vrai, puisque personne ne veut nos embaucher. J'ai travaillé chez un soi-disant patron, et avec ma petite paie de 25 euros par jour. J'ai pu honorer mes engagements, en payant durant plus d’un an. :

  • 1500 euros à l’école CNFDI ;
  • 2400 euros à la société des écrivains.

Mais jamais, je ne renouvellerai jamais mon expérience de sans-papiers. J'étais exploité par l'école et la société et le plus grave est que je n'avais aucun droit pour réclamer mes droits. Je devais supporter les supplices sans rechigner.

Monsieur le Président Bouteflika, n'attendez pas que je témoigne contre mes ex-patrons immigrés. Je refuse d'être le témoin numéro un et d'attaquer ces sangsues. Personnellement, malgré l'humiliation et le sentiment d'être exploité jusqu'à la moelle épinière. Je ne peux attaquer aucun de mes ex-geôliers. Pour deux raisons :

  • je souffre du syndrome de Stockholm ;
  • mes ex-patrons ont pu me sauver de la rue et des foyers. Tellement de sans-papiers sont perdus entre la misère, l'alcool et la drogue. Je connais énormément de clandestins qui dépendent de ces foyers et quels horribles endroits. Des jeunes préférant dormirent dehors, plutôt que de passer une nuit avec les résidents de la rue. J'évite de traiter ces hommes d'alcooliques ou de voyous. Personne ne sait qui a mené ces marginaux à devenir des rebuts de la société. Malgré les humiliations et la misère, j'ai préféré travailler au lieu de faire la manche. Surtout Monsieur le Président évitez de prétendre, que je dénonce ces injustices, puisque tous les Français savent la situation dégradante que vivent les clandestins. Et surtout, évitez de vous servir de mon livre, pour attaquer les patrons et les sans-papiers. Je sais que les politiciens français veulent supprimer ce fléau. Mais à cause des associations humanitaires, le gouvernement hésite à combattre les irrégularités et les abus. Ils diront, voilà celui qui va nous faciliter le combat contre ces rebuts de la société. Mon livre ne serait jamais le prétexte pour ouvrir la chasse aux hommes. Je ne serai jamais le pigeon de l’État et leur argument pour exterminer des êtres humains et combattre les vautours qui nous faisaient travailler. Je n'attaquerai jamais les bourreaux qui m'ont sucé le sang. Parce que la racine du mal et de l'injustice commence de l'Algérie. Je suis un Algérien, fils du gâchis et du désastre. Si j'ai survécu à Paris, c'est grâce à ma misérable vie en Algérie. Étranger ici, je ne suis pas étranger à la disgrâce et à la pauvreté J'ai vu mon père se crever pour nous nourrir et ma grand-mère se tuait pour nous offrir l'amour maternel. Je ne suis pas l'enfant de l'indépendance, mais le fils de l'ignorance et de la décadence. J'appartiens à la jeunesse algérienne de l'après guerre, qui ignore le goût de la liberté ;
  • j'étais vraiment surpris de voir des Parisiens pauvres, puisque nous croyons que tous les Français sont riches ! Lorsque des amis français et des clandestins me racontaient leur enfance difficile et méprisable. J'ai compris la source de leur complexe, leur gène et l’impact du passé sur leur présent. L'individualisme, l'égoïsme et l'indifférence de certains Français sont dû à la froideur qui a marqué leur enfance. Par contre malgré mon enfance difficile, je n'ai aucun complexe contre mon passé miséreux. J'étais nourri d'une bouchée de «ratatouille» et je mettais des vêtements à petit prix. Aucun problème, je peux regarder mon passé et parler du froid de la misère. J'ai accepté mon destin malgré toute sa noirceur, sans renoncer à essayer d'améliorer la situation de l'homme. Incroyable de voir des hommes fuir l'horreur incrustée dans la mémoire de leur peau. La violence des hommes est liée à leur passé violent. Malheureusement, certains hommes et femmes ne parviennent pas à se défaire de leur passé et d'autres, se servent délibérément de ce prétexte pour faire souffrir. La plupart des hommes français et algériens capables de violence et d'égoïsme, ont subi des violences dans leur enfance.

J’ai connu la faim, le froid et la solitude, mais l'injustice me révolte. Je ne supporte pas l'injustice ! J'ai passé mon temps à écouter les histoires de mes amis les sans-papiers et les soi-disant patrons. Des mots et des sanglots recueillis comme des gouttes dans mon Saint-Graal. J'écoute parler les crucifiés de ce qui se passe dans les foyers et dans les casernes. Ils sont dressés les uns contre les autres. Ils étaient des rois dans leur pays et les voilà, mine de rien devenus des hors-la-loi. Ils sont tassés dans des chambres, des dortoirs durant l'hiver et l'été, ils sont mis dehors. Rien ne protège ces victimes potentielles des agressions. Les rebus de la société tournent dans un vieux cercle vicieux et rouillé. Ils sont confrontés aux rancunes entre les différentes origines : Aghans contre Arabes, des Africains contre Gitanes, Arabes contre Africains et Africains contre Africains. Chacun rend l'autre responsable de son malheur ; lorsque le haut responsable est inaccessible, les hyènes s'entretuent entre elles.

Stressés et déracinés, les crucifiés se bagarrent pour rien. Sans aucun statut, ils sont confrontés aux tentions que créent les différences ethniques. De rien, ils font toute une histoire. Monsieur le Président Bouteflika, il faut comprendre que ces clandestins sont prêts à exploser à tout instant.

Le monde est gâché par les rancunes et le racisme. Parce que Paris est le creuset de toutes les nationalités. Les clandestins, même s'ils n'apportent rien dans leurs baluchons, viennent en France avec leurs préjugés et leur haine ethnique envers l'autre. La capitale devient le champ des règlements des comptes entre des hommes de différentes ethnies. Les hommes et les femmes sont tous victimes de la clandestinité et traqués par la police. De plus, des anciens conflits, les clandestins harcelés ont un besoin fou de vider leur charge de haine et de colère. Comme ils ne peuvent pas atteindre le sommet, ils extériorisent leur violence entre eux. Vous les voyez en train de s'insulter et de se débattrent, race contre race, face à face et stress contre angoisse. Mais cette violence n'est pas un indice de sauvagerie pour ces hommes et ces femmes déracinés. Leur violence n'est qu'une réaction et un mode d'expression envers un monde violent. Lorsque je côtoyais les marchés parisiens, j'étais surpris de voir des êtres humains disputaient les ordures avec des pigeons. Bizarre ! À Paris, les pigeons sont carnivores et les renards mangent au Mac Do. La violence concerne aussi les Blancs entre eux. J'ai assisté à plusieurs fois à des bagarres entre des Blancs. Le détenteur n'était pas une différence de couleur, mais une différence de rang. Le monde est rond et la guerre, si elle n'est pas horizontale, elle est verticale. C'est le Blanc qui combat le Noir, c'est le riche qui combat le pauvre, c'est l'intellectuel qui combat l'illettré. Si ce n'est pas le roi qui combat l'esclave, c'est le jeune qui combat le vieux. Dans le métro, une dispute a déclenché entre deux jeunes et une vieille femme, tous étaient des Français blancs. Chacun doit défendre son territoire et sa mémoire. La mémoire collective repousse le jeune, le met à côté et l'accuse d'être trop jeune et moins expérimenté. La mémoire collective qui sert l'intérêt général, exige à recruter des jeunes avec expérience. Pourtant, la vieille mémoire n'hésite pas envoyer des jeunes enfants à la guerre. Le même système qui les juge d'être très jeunes pour gouverner, ils considèrent assez mûre pour aller mourir. Le jeune exclu du cercle défend son existence et combat la mémoire qui ne lui fait pas confiance. Le jeune se rebelle contre les traditions et les coutumes ancestrales. Le paradoxe est que la mémoire qui l'exclu, lui demande de la protéger de l'usure et de l'oubli. La mémoire collective veut faire du jeune un gardien de son patrimoine. Paris le dit, Paris est faite de vieux musées et de vieux châteaux hantés. Paris, fière de son passé, refuse de faire confiance aux jeunes architectes. La capitale fidèle à son septuagénaire Jean Nouvel, aux yeux d'un esthéticien a besoin de rajeunir. Ils nous parlent du château de Versailles, les Jardins du Palais Royal, Louvre et de la Bastille. Mes amis me demandent une fois d'aller visiter le Sacré-Cœur. De là, paraît-il, j’aurais une belle vue sur Paris. Dans la vieille station du métro de Châtelet, une vieille affiche publicitaire invite les touristes de monter à la tour Montparnasse pour avoir une vue de 380° sur Paris. Suis-je monté ? (Rire) Je n'ai pas besoin d'escalader la Tour comme King Kong pour comprendre que Paris est une ville plate, truffée de vieilles bâtisses restaurées. Je ne suis pas contre l'histoire, mais contre le projet de vivre l'histoire au présent. D’ailleurs, je suis contre la démolition des églises françaises et pourtant, je suis musulman.

Monsieur le Président, la Paris moderne est un mythe ! En posant le pied sur le sol parisien, je m'attendais à être projeté dans le futur. Je croyais qu'à Paris, je verrai des voitures flottantes, des scoops volants et des gratte-ciel. À part quelques portes qui s'ouvraient toutes seules, des escalators et des tapis roulants, la modernité à Paris est en phase d'hibernation. Il existe de minis immeubles en verre, mais l'architecture parisienne est en panne de hauteur. Paris d'aujourd'hui, ressemble à celle des photos au noir et en blanc vendues à 2,50 euros sur les quais de la Seine.

Paris a besoin de stylistes et non de mathématiciens. Paris a besoin de renouveler sa garde de robe. Et ce n'est pas un mathématicien qui peut la relooker. Rien qu'un architecte à la hauteur de Jean-Paul Gaultier, qui pourra donner une touche de fantaisie à Paris. Je ne suis pas un devin, mais je ne donne pas cher de la peau de Paris. Si la France fait un retour vers les maths, ça ne m'étonnera pas de voir Paris devenir une épave. Les mathématiciens sont des comptables, ils lésineront sur les dépenses. Trop cher ! Ils diront. Mais rien n'est cher pour Paris. Les mathématiciens sont des calculateurs ! Voilà pourquoi nos appartements géométriquement ressemblent à des cubes. La cité des 4000 est un asile et l’œuvre d'un mathématicien. J'ai horreur des HLM et des cités de béton. Demain, nous serrons les otages des nombres et des chiffres. Nous serons dirigés par des gens qui jouent au sudoku et nous serons sélectionnés selon notre QI. C'est vous aurez un C en maths, vous serez orienté vers une école de nuls. Comme ils l’ont fait avec moi en Algérie ! J'ai été envoyé vers une école technique. L'école technique avait une mauvaise réputation par rapport au lycée. En Algérie, si vous êtes orienté vers les lycées, vous serez respecté. Les étudiants mathématiciens et les scientifiques me regardaient avec dédain. Déjà l'erreur ! J'étais orienté sans savoir vers quelle branche, j'étais expédié. Je n'étais pas faible en maths par débilité mentale, mais à cause de ma myopie. Je constate que le désastre se perpétuera avec le nouveau gouvernement français. Les élèves français négligeront les arts et se concentreront vers les autres matières à haut coefficient. Pourtant, les civilisations anciennes se distinguaient par la magnificence de leur art et leur culture. Pouvons-nous dissocier l'art de la modernité ? La poésie est une autre raison, qui m'a attiré vers la France. Hélas, l'émerveillement s'est évanoui en me flânant dans les rues parisiennes. Je suis tout à fait d'accord avec les projets des Verts, pour réaliser des jardins. Sincèrement ce n'est pas un maire mathématicien qui fera preuve de prodigalité envers Paris.

Dieu merci, je ne suis pas le seul qui ait remarqué les vieux immeubles de Paris. Monsieur L qui m'emmenait dans la voiture d'occasion de son ami a remarqué l’État délabré des immeubles. Parce que, Monsieur le Président, chaque fois que j'ouvrais ma bouche, Monsieur L me disait : ta gueule ! Même sur les sites francophones, les internautes français me traitaient de raciste et d'ingrat. Parce que les Français ne supportent pas qu'un Africain les critique. Monsieur le Président Bouteflika ! Dois-je mentir, comme ils m'ont menti ?

De plus, j’en avais marre de voir les Français gaspiller leur argent en allant à l’extérieur de l’Hexagone. Ils voyagent jusqu'au fond de l'Afrique, pour revenir avec des photos et en faire des expositions. Juste pour montrer que la vie hors l’Hexagone et Paris est toujours sauvage et je ne suis pas étonné d'être traité de sauvage. La chaîne TV5 s'enrichit en diffusant des reportages sur des pauvres tribus africaines. Je ne sais pourquoi, ils insistent pour montrer le Masaï dans sa broussaille et le petit noir morveux pleurant de faim. L'incroyable, Monsieur le Président, est de voir l’impact de ces reportages sur l'esprit de l'Européen. Le Français est convaincu que l'Europe est riche et que l'Afrique est une terre en friche. Ils devraient diriger l'objectif de leurs appareils photos sophistiqués vers l'intérieur de l’Hexagone et s'intéresser à Paris au lieu de courir derrière les singes et les guenons.

Vous serez aussi surpris, Monsieur le Président, d'entendre les Parisiens m'appeler «chef». Bien qu'ils lisent et se documentent énormément, les Parisiens cultivent une fausse idée de l'Algérie. Ils croient que l'Algérie est un désert et que nous vivons dans des tribus. Ces soi-disant hommes modernes me prennent pour un chef de tribu africaine. C'est dingue ! Les Français croient que juste eux, ils se sont modernisés. Comme si l’Algérien que je suis avait raté son évolution. Peut-être qu’ils manquent d'honnêteté, afin d'admettre que la barbarie est en plein Paris. Quand je pense à tous ces envoyés spéciaux qui risquent leurs vies pour prendre une photo de carnage à Nairobi et filmer l'enfant soldat. Tous ces journalistes qui soi-disant défient la mort, juste pour filmer le cyclone Gustave à l’œuvre, alors que dans les rues de la plus belle ville au monde, des gens se battent pour une caisse de tomates ! Des ivrognes font la manche et me demandent une clope ou une pièce. Le 10 juin de l'année passée, en allant à l'hôpital Cochin afin de renouveler mon certificat d'aide sociale, j'ai croisé un homme qui distribuait le journal 20''. C'était un grand homme blanc, qui faisait de son mieux pour distribuer les journaux aux passants, des Parisiens trop pressés qui couraient vers les portes du métro Saint-Jacques. Les Parisiens courent toujours, c'est le prix de la modernisation. Ceux qui tenaient gentiment de lui le journal s'évaporaient rapidement. Pressés ! Les Parisiens courent toujours pour arriver à l'heure au boulot. Au pays du capitalisme, le temps c'est de l'argent. Et personne n'avait pris le temps d'admirer cet homme, qui voulait être serviable et surtout utile dans une société française qui critique, condamne et exclut les pauvres. De loin, j'observais cet homme exclu de la société des chiffres et des mathématiques distribuer le 20''. Deux heurs après, j'ai croisé cet homme à Denfert-Rochereau. L'homme vivait sur le trottoir sur la marge de la société occidentale, avec ses amis alcooliques. J'évite de les traiter de clochards ou de SDF. Pour les bons citoyens, il est facile de trancher et de traiter ces êtres humains de marginaux. Très facile pour les contribuables de les juger comme des déchets de la société. L'homme me regarda pendant un moment, comme s'il avait reconnu en moi la marque de l'exclusion. Il était avec ses amis à côté de petites tentes. Les Enfants de Don Quichotte, les enfants de la clandestinité se retrouvent dans les emmerdes et sont jugés par ceux qui payent leurs impôts. Ceux qui s'affichent comme les bons citoyens et osent sans aucune compréhension condamner les autres. Dans le monde des chiffres, le monde est trop petit pour nous tous. Donc, il faut expulser 2000 clandestins. Je suis nul en mathématiques, mais je sais observer. Juste par égoïsme, les bons contribuables veulent qu'aucun intrus ne vienne perturber leur quiétude luxueuse.

Comme par hasard, j'écoutais un Parisien se plaindre à une dame du nombre des pigeons qui avait augmenté. Même les pauvres bêtes ailées n'étaient pas épargnées. Selon lui, les responsables étaient les gens qui les nourrissaient. Il n'a pas suffi aux Français d'appauvrir l'Afrique, ils songent à exterminer les pauvres bêtes. Ils sont des calculateurs. Ils n'aiment pas les pigeons à cause de leur fiente, mais ils adorent les chiens. Il y a tellement de chiens à Paname. Pourquoi les Parisiens ne les chassent-il pas ? Tous ces chiens qui tuent des bébés et salissent les trottoirs avec leurs crottes. Les Parisiens choisissent les animaux de compagnie, pour oublier leur solitude après l'indifférence et l’oubli de leurs enfants. Les Parisiens adoptent un chien, l'ami de l'homme pour leur propre intérêt en rejetant les autres bêtes indomptables. Plusieurs fois, j'ai assisté à la condamnation des humains, sans la moindre compréhension. Ils critiquent ces ivrognes qui habitent les rues et puent en fermant les yeux sur les crottes de ses fidèles amis. Les chiens ! Le dernier luxe qui reste aux Français, d'un faste perdu. Non ! Monsieur le Président, je ne hais pas le Parisien. J’aimerais juste qu'il ne dépasse pas la limite du raisonnable.

Combien ça coûte ? Nous sommes contrôlés par la loi des chiffres. L'homme blanc veut décider, diriger et tout contrôler. L'Européen se conduit comme s'il était le seul maître du monde et le seul héros du roman. Même John McCain promet de régulariser des clandestins, s'il était élu. Les bleus croient que ce globe bleu leur appartient. Ils décident quand ils veulent. Suivant leur humeur, ils régularisent votre situation et sinon, ils vous excluent. Étrange de voir que votre vie est entre les mains d'un autre mortel. Les Français sont les juges, les jurés et les défenseurs des droits de l'homme. Les non-Européens ont juste le droit de subir leurs caprices. Nous sommes les esclaves du vilain système. Pire ! S'ils ne veulent plus de vous, ils vous licencient, alors que j'ai sacrifié ma jeunesse pour venir en France en plaquant tout pour réaliser mon rêve de styliste !

Une Parisienne me demande d'entrer chez moi. Sans aucun scrupule, la dame qui travaille à l'hôpital Cochin me demanda de rebrousser mon chemin et de renoncer à la France. Selon ses mots, il était très tôt pour rentrer chez moi, alors qu’il était déjà trop tard ! À ses yeux, je n'étais qu'un clandestin, un ombre et un cas. La Parisienne ne voyait pas en moi, l'homme qui a pris un coup de vieux. En disant aux conseillers juridiques de l’ A.P.T.M, rue de Bercy Paris 12e et les bénévoles de la Cimade, que j’étais en France depuis un an. Ils me répondirent :

– Non ! Non ! Nous ne pouvons rien pour vous !

Pour eux, un an n'était pas assez. Devant les clandestins qui étaient en France depuis une éternité, mon cas semblait être un cas désespéré. J'étais condamné à vivre dans l'ombre et l'obscurité. Les bureaucrates se moquaient que mon désir de venir en France remontait à mes 20 ans. Pour eux, ma vie était insignifiante par rapport à d'autres cas plus urgents. Je peux supporter le froid du Nord, mais je supporte mal l'indifférence des mâles.

Dans la clandestinité, les sans-papiers perdent leur statut d'être humain. J'avais l'impression de vivre un cauchemar et qu'un beau jour, je me réveillerais. Même si j'arrivais à oublier, les immigrés et les Parisiens ne manquaient pas l'occasion de me rappeler que j'étais un clandestin. J'avais l'impression de n'être rien, d'être bien peu de choses. Sans aucun scrupule, quelques immigrés nous demandaient même de rentrer chez nous. En évoquant notre situation dégradante, ils nous conseillaient de revenir au Bled pour notre intérêt. En réalité, les immigrés parisiens se moquaient de nous, afin de se sentir mieux. Ils étaient gênés que nous les voyions faire leurs petits boulots de minables. À part certains jeunes Beurs, les autres vivaient comme des esclaves. Lorsqu’un Français me demandait de rentrer chez moi, je n'étais jamais choqué. Le plus choquant était de l'entendre de la bouche d'un immigré. Aujourd'hui !(Rire) Je constate bien les postes-clefs qu'occupent les immigrés en France. Misérables immigrés !

Des charognards ! Ainsi appela un éboueur les gens qui ramassaient les ordures. Il y avait des Blancs dans la mêlée qui venaient aussi chercher des légumes et des fruits. L'Hexagone emprisonne entre ses murailles de fer et de béton de nombreux pauvres. Otages du carcan de la misère le Blanc et le Noir partagent le même carton. Dans la rue parisienne, les misérables parlent ni de religion, ni de couleur de peau. Ils ne rêvent ni de synagogue, ni de mosquée, mais d'un logis. Et leurs seuls ennemis sont le froid et la faim. Monsieur le Président, à Barbès, j'ai rencontré des miraculés. Pour la première fois, dans un froid hivernal des hommes ne faisaient pas la guerre devant l'armée du salut qui leurs distribuait un repas chaud au lieu d'une arme à feu. Était-ce un rêve ? Des hommes de différentes ethnies ne s'entretuaient pas. Faut-il, affamer les hommes pour qu'ils cohabitent en paix sans guerroyer, alors qu’ailleurs contre une poignée de grain, une tranche de pain, les guérilleros vendent des armes à feu aux enfants. Le métropolitain possède le monopole et manipule son frère le clandestin. Tout est question de rang et de ronds dans ce bas monde.

À Paris, les pompiers sont obligés de récolter des fonds en vendant des calendriers dans la rue. Sans aucun doute, ils ne le font pas de gaieté de cœur. Un pompier préfère affronter le feu, plutôt que de croiser les yeux des Français épuisés par les impôts. Le contribuable français est dans le collimateur. Il n'a pas suffi qu'il se crève pour gagner sa vie, il doit leur donner aussi. Le contribuable français doit donner pour la récolte des pièces jaunes, à l'UNICEF et à la Croix Rouge. Le contribuable français doit toujours donner au nom de l'humanité et au nom de la générosité. C'est la loi des parasites et le mal s'enrichit aux dépens du misérable.

Un jour, un de ces pompiers à force de ne rien vendre, repéra de loin sa proie idéale, une vieille femme. Monsieur le Président ! Il était obligé de vendre ses trucs. Vous pensez à ses supérieurs à qui il devait rendre des comptes. Nous sommes dans une société ou chacun doit être rentable. J'avais déjà vu cette scène. L'histoire de ce pompier ressemblait à celle de la petite fille pauvre qui devait vendre ses allumettes sous la neige. Le pompier, les yeux enflammés, inclina l'échine, adoucit le ton et baratina la vieille dame. Obstinément, il tendit sa main pour lui vendre son objet. La dame désemparée ne tenta qu'un geste et tira sa main de sa poche. Dans sa poignée, la femme tenait une pêche ou un abricot. Un fruit, c'était tout ce qu'elle possédait et rien d'autre !

La scène m'avait vraiment traumatisé. Vous avez d'un côté des employés obligés de récolter de l'argent avec toutes les ruses possibles et à l'opposé des citoyens fauchés. Les Français en bavent ! La précarité au pays des droits de l'homme est un crime. Je ne sais pas pourquoi je n'arrive pas à m'habituer à la pauvreté du Blanc. Qui à la fois laide et agressive, injustifiable et écœurante. Je peux accepter de voir des pauvres en Inde. Mais l'image des Parisiens qui ramassent dans les ordures, m'agresse. J'ai cru que le capitalisme avait triomphé devant le communisme. Si le capitalisme a contribué à la chute de la Russie ? Qui est le vrai gagnant. Sûrement pas le petit Français. Aujourd'hui, ce dernier crève encore pour sauver ses apparences. Les rayons des supermarchés sont chargés de produits, mais personne ne peut acheter. Lorsque au Leader Price et à ED, les produits moins chers disparaissaient en premier des rayons. Je déduisais que le pauvre Parisien a passé avant moi en m'obligeant de prendre les autres produits chers. Du coup ! Pour acheter moins cher, je partais avant le Parisien.

Lorsque les Parisiens commencent à râler, bouchez vos oreilles Monsieur le Président Bouteflika. Ils se plaignent toujours que la vie est chère. Pourtant, ils sont toujours en train d'acheter et de faire leur shopping. Vous ne me croyez pas, aller à la FNAC ! C'est là, que les Parisiens dépensent leur fric. Les Parisiens sont-ils des vrais faux pauvres ? Ils sont les otages d'une mauvaise habitude. Paris est fait de tout ! Elle est faite de fous, de farfelus et de malades imaginaires. Aux marchés parisiens des Français blancs viennent quotidiennement remplir leur couffin avec des ordures. Spécialement, l'un d'eux cherchait des pièces jaunes tombées des caisses des commerçants. Bizarre ! Ce Français blanc était programmé, il arrivait toujours avant la fin du marché. Il tournait en rond, les yeux collés au sol comme la petite souris réglée aux heures du repas. Monsieur le Président, c'est toujours choquant de voir des Parisiens blancs ramasser dans les ordures. Dans la mêlée vous trouverez des pauvres, des malades, des SDF, des retraités et des immigrés. Ces parasites humains subsistaient des ordures à la fin du marché.

L'homme à ses coutumes et souvent nous tombons otages de nos mauvaises habitudes. Comme des drogués, il est difficile de nous libérer d'une habitude. La France est aussi touchée par un autre fléau, la radinerie. Le site priceminister.com ne lésine pas en utilisant le slogan «Devenez radin». L'affiche est très visible dans les transports communs de la métropole.

L'homme corps et âme est une boule de mémoire. À force de suivre un mode de vie, nous nous entraînons à devenir ce que nous sommes. Je prends l'exemple de cet homme blanc. Un gars gentil qui tournait en rond dans la place du marché avec des yeux collés au sol. Il tournait dans un cercle enfermé, comme un prisonnier dans sa cellule. Il ramassait des fruits qu'il partageait avec moi. J'acceptais volontiers de manger pour ne pas le froisser. Et parfois, je jetais ses offrandes pourries. Non, Monsieur le Président ! Je n'étais pas écœuré. Je refusais juste de tomber dans le panneau, de rentrer dans ce jeu, être la victime de ce fléau et de ce cercle vicieux. J'avais peur de ma mémoire charnelle. Je devais rester éveillé, car le système veut me berner et me réduire à l'esclavage. Je trouvais inadmissible qu'un être humain vive des ordures dans un pays moderne. Et ça ne choque personne ! Normal, la France tient à son patrimoine aristocratique, à ses misérables et à ses Gitanes. Encore les journalistes profitent-ils des malheurs des pauvres citoyens. Ce soir, France 2 diffuse une émission intitulée En mal de toi aux portes de la rue. Les citoyens sont dans la merde et eux, ils en profitent pour réaliser des films et des reportages ! L'objectif du journaliste est d'éclairer l'opinion publique sur les injustices. Comme si nous n'étions pas au courant que le monde tourne mal ! D’ailleurs, la diffusion de l'émission n'a rien changé du quotidien du Français. Le journaliste joue le jeu, de l'homme surpris. Lorsque son invitée, une étudiante lui raconta, qu'elle se prostituait pour financer ses chers études. Monsieur Fogiel avec des yeux écarquillés, jouait à l'homme choqué par la gravité de la vérité. Ça m'étonnait que l'animateur ne fût pas au courant de l'existence de ce fléau à l'université. La prostitution n'était-elle pas le plus vieux métier au monde ? Dans le dernier film Des femmes de l'ombre, l'auteur fidèle à la culture française n'a pas oublié d'introduire une prostituée juive dans l'histoire. La prostitution est dans les mœurs des films français et occidentaux. Monsieur Fogiel invita son ami le politicien autour d'une table ronde, pour faire le tour de la question. Le politicien se défendait, clamait son innocence et tenait à son ignorance. La plupart des politiciens nient les faits et arrivent toujours à trouver d'autres coupables pour purger les peines à leur place. Le grand privilège du pouvoir est que les politiciens passent à travers les mailles du filet de la justice. Je soulage Messieurs les politiciens, je suis le seul fêlé dans ce bas monde. Je suis le coupable qui a creusé le trou d'ozone et détruit la faune. Le système fonctionne très bien et je suis l'anomalie. Je suis le figurant, la poupée de cire dans leur grande épopée. Je suis devenus un cas et ma vie est devenue un cahier de mémoire rempli de ratures. Tandis que les Terriens meurent, les journalistes, les politiciens et les réalisateurs multiplient les tables rondes.

La guerre selon untel et untel ! Y a-t-il une différence entre la guerre en Irak et la guerre en Palestine ? Entre la guerre d'Irak selon De Palma, ou la guerre selon Charlie Wilson ? Chaque auteur profite des malheurs des autres, pour donner sa vision et sa philosophie. Hollywood excelle dans l'art des effets spécieux et veut donner une idée très proche de la réalité. En voyant les films de guerres aujourd'hui, nous avons l'impression de participer aux combats. Les réalisateurs des films seront recomposés à travers les festivals de cinéma. La guerre est une œuvre destructive ! Pourquoi philosopher et débattre ? Tous les films, les reportages et les photos anti-guerre, n'ont pas réussi à évoluer les mentalités. Les auteurs se bousculent pour décrire minutieusement les horreurs sur le menu de leurs œuvres littéraires. Chaque réalisateur et chaque acteur choisi une guerre pour rapporter des images choquantes réalistes. Choquantes ! Nous sommes déjà choqués ! Comment ces photographes peuvent-ils nos choquer ? Arrêtez, Messieurs, de profiter des malheurs des Terriens. Nous sommes dans une nouvelle Ère, l'Ère de l'Internet. Il faut juste surfer pour regarder des vidéos choquantes. Actuellement le monde a rétréci et chacun connaît ce que se passe autour de lui. Nous sommes tous au courant, il faut juste interroger Google pour savoir. Tandis que des hommes récolent des balles, les acteurs américains récoltent la Palme d'or à Cannes. Arrêtez de filmer ! Et donnez nous des solutions.

Pour fuir le chaos, je regardais le grand journal directement depuis Cannes. Un peu de glamour et de paillettes dans ce monde de brutes. Comme toujours, les vrais stars étaient les Américains Sharon Stone et Madonna. Sur une autre chaîne, PPDA interviewait, depuis le JT, Madonna qui était à Cannes pour défendre son film sur les enfants séropositifs. Curieusement, durant toute l'interview, la star américaine faisait des grimaces. Elle tentait de se retenir de rire en répandant aux questions de PPDA qui l'interrogeait sur son engagement envers les enfants malades. L'incident confirma mon doute sur l'engagement des stars. Madonna comme d'autres artistes, se moque de la misère des enfants noirs. L'essentiel pour les célébrités est d'être sous les projecteurs des photographes. Les riches aiment faire des galas de charité pour les pauvres. Sinon, je suis curieux de savoir la raison du rire de la Madone. Son reportage n'est pas un film d'humour, elle aurait pu montrer un peu sérieux et du respect vis-à-vis ces victimes.

J'écris mon histoire et l'horreur des clandestins. Je ne dénonce pas et je ne cherche pas à donner une description minutieuse de nos souffrances. Il n'a rien à décrire, car tout à été dit depuis la nuit du temps.

Au lieu de diagnostiquer, il est temps d'agir et de réagir. Le plus beau trophée que peut avoir un homme est de sauver non pas le monde, mais au moins le maximum de vies humaines. Je refuse d'écrire en exploitant les malheurs des Français et de réaliser une œuvre caricaturale sur leur misérable quotidiens. Je ne dénonce rien, puisque tout a été déjà dit grâce aux émissions Envoyés spécial et les Infiltrés. Même Claire Chazal connaît l'existence des glaneurs parisiens. Certains d'eux se justifiaient en me disant, qu'ils ramassaient des oignons ou des carottes pour leurs lapins. J'ignorais que les lapins parisiens mangeaient aussi des oranges et de la viande. Je ne dénonce pas un phénomène étrange. Je me demande surtout pourquoi ramassent-ils ? Lorsque le prix des produits alimentaires est accessible à tout le monde. La plupart des glaneurs sont des vieux. Des retraités peut-être ? Alors pourquoi travailler et cotiser toute sa vie, si à la fin vous devez chercher votre nourriture dans les ordures ?

Certes, la vie n'est pas moins cher qu'ailleurs. En Algérie, le coût des fruits et des légumes est trop élevé pour la majorité des Blédards. Là-bas, je peux comprendre pourquoi les Algériens ramassent dans les ordures. Mais la France est la cinquième puissance au monde. Lorsque je regardais les Parisiens dépenaillés et pauvres. Je me demandais où résidait le secret de leur puissance ? Cette soi-disant condescendance qui nous faisait de l'ombre. Où ? Dans l'éclat de leur sourire ? Dans l'excès de leur Narcissisme ? Dans leur morphologie longiligne, ou dans leur pâleur féline ? Où dans la potion magique des Gaulois ?

Monsieur le Président, j'ai observé les Parisiens ! Et alors ? Ils sont normaux. Quelques-uns uns sans gêne ramassent un journal dans la poubelle des stations de métros. Pour le lire ? Oui, Monsieur. Alors pourquoi me traitent-ils de sale Arabe ? Je me rappelle bien cette Parisienne qui cherchait dans un tas d'ordures. Avec un sursaut léger, elle me chuchote : j'ai trouvé mon bonheur ! J'étais curieux de voir l'objet de sa joie. Qu'a-t-elle trouvé dans les ordures ? Une pépite d'or ? Non, Monsieur le Président. Hélas, l'Eldorado a disparu depuis que la caisse est vide. La dame a trouvé trois oranges pourries. D'un air joyeux, elle m'expliqua qu'elle ferait du jus avec en enlevant les parties abîmées. Suis-je en France ? Où me suis-je trompé de pays ? J'ai du mal à croire que j'ai tout quitté pour ce territoire français. Le malheur est que ce Parisien ne mesure pas la grandeur de mes sacrifices. J'ai tout fichu en l'air pour rejoindre la sphère de la civilisation moderne. J'étais très choqué et très déçu de voir le Français, mon idole, en train de chercher sa nourriture dans les ordures. Le plus surprenant, est que les Parisiens ramassent sans aucune gêne. Certains sont même bien habillés, très bien coiffés et n'hésitent pas à ramasser des fruits pourris. Comme cet homme avec sa raquette de tennis à la main. Il se pencha sur un tas d'oranges. « Il y a des trucs sympas à ramasser ! » me marmonna-t-il. Gêné devant moi, l'homme moderne hésita à mettre la main dans le tas. Le plus étonnant est que ce Parisien habitait un quartier riche qui complexait même les misérables Beurs.

Honnêtement, j'étais écœuré de voir des Français chercher dans les ordures. Ils nous ont bluffés avec leur fausse suprématie. Tu aimes dénigrer les Français ! Jamais, Monsieur le Président. J'ai toujours évité de répondre à Monsieur L, qui n'hésitait pas à me traiter de sauvage et d'arriéré sous prétexte qu'il était un homme moderne et civilisé. Je désire juste mettre les pendules à l'heure et gommer le faut mythe. Des internautes français m'ont déjà traité d'arrogant et accusé de porter du mépris envers les Français. Je ne suis pas haineux ! Je suis tout simplement en colère contre eux. La plupart des Français ignorent que je suis un clandestin. Ils sont incapables de mesurer l'ampleur des dégâts qu'ils m'ont causés.

Les Français ont séduit les Africains avec leur faux-semblant de supériorité occidentale. Au lieu de rester chez eux et de travailler, les Africains étaient séduits par l'aisance et la facilité de vie du français. Les Blédards étaient très naïfs en croyant que le Français menait une vie de pacha. En France, ! Il y a une rage plus forte que la haine et la rancœur, qui ronge les cœurs. J'ai sacrifié ma vie et celle de ma famille à cause de mon rêve de vouloir ressembler aux Français. Au lieu de trouver des Dieux, je découvre des hommes normaux. Ils m'ont séduit avec leur civisme et leur apparence trompeuse. Si le Parisien bourgeois avec sa raquette de tennis me croise, il n'hésitera pas à me regarder avec dédain. L'insupportable est d'être tiraillé et culpabilisé par lui. Le Parisien m'accuse de m'être introduit dans son pays. En oubliant qu'au passé, il a bâti sa condescendance sur le dos de mes aînés. Actuellement, Monsieur avec un semblant de conscience, organise des fêtes de charité pour blanchir son argent. Le monde ne tourne pas en rond, je découvre petit à petit les magouilles de l'homme blanc. Tu es un anti-blanc ! Non, Monsieur le Président. Je ne suis pas un raciste, puisque les commerçants algériens utilisent les mêmes magouilles. En Algérie aussi les Blédards commencent à devenir des matérialistes. Les riches honnêtes se comptent sur le bout des doigts. Je m'attarde sur les défauts des Blancs, pour répondre au système. Ce système qui ose nous traiter d'intrus et fait de nos expulsions une priorité. Le système oublie que nous sommes en Europe à cause d'eux et surtout à cause des immigrés. Quel Français ou quel immigré aura l'audace de reconnaître son rôle ? L'un et l'autre savent mentir et ils mentent assez bien. Le Français insiste à me faire croire qu'il m'a civilisé et le métèque se comporte comme un des leurs. Comme si aucune civilisation n'existait avant l'an 1830 ! Je ne cherche pas à prendre du galon. Le fils de l'Orient ne sort pas du néant.

Le plus bizarre est de voir des Français en bonne santé faire la manche. Des malabars blancs qui entrent dans le métro racontent leur vie, se prétendant obligés de tendre la main par manque de travail. Le boulot existe en France, ils refusent seulement les travaux forcés. Ils veulent tous un travail moins pénible. Ces mendiants habitués à cette vie sont devenus les esclaves de ce mode de vie. Le plus flagrant en France est de voir deux mondes opposés, deux niveaux de vies qui existent en parallèle. Vous avez des riches et des pauvres ! Vous avez des pionniers qui font plusieurs travaux et d'autres qui sont accros au RMI. Vous avez une rive gauche et une rive droite ! Vous avez des jeunes et des vieux ! Vous avez Paris et la banlieue ! J'ignore si les RMIstes sont des nonchalants ou des intelligents ? Ils aiment toucher de l'argent en travaillant aussi au noir. Parfois, je les comprends. Toucher le SMIC ne sert à rien, tout est devenu très cher. Parfois, ils se demandent s'ils travaillent à leur compte ou pour l’État. Avec tous ces impôts à payer, il ne leur reste rien à la fin du mois. Comme le rôdeur du marché aux yeux collés au sol. Une fois, il venait vers moi mécontent, se plaignant des commerçants immigrés.

– Je les ai aidés à emballer leurs marchandises et ils ne m'ont rien donné ! s'exclama-t-il.

Je trouvais pathétique et incroyable que ce Français, ce banlieusard, cet homme blanc vive de cette façon. Il pouvait travailler comme les commerçants immigrés. Étrange, de voir des Français blancs mendier auprès des immigrés. J'avais toujours du mal à accepter qu'un blanc vienne me demander une pièce, à moi l'intrus ! Étrange, curieux et bizarre ! Monsieur le Président, ils n'étaient pas gênés de me prendre l'économie de toute une vie. Pourtant, ce Français ! Il possède ces fameux papiers qui ouvrent tous les horizons. Alors comment a-t-il basculé vers le côté obscur ? Et encore, je n'arrive pas à oublier l'image de cette dame qui m'a demandé une pièce d'un euro. La réussite est-elle une question de rang, d'origine ou de papiers ? En France, elle est surtout une question de billets bleus. Pourquoi depuis longtemps les Anglais font-ils de l'ombre aux Français ? Ces derniers sont-ils faibles ? Ou les Anglais sont-ils plus forts ? Moi qui ai tout perdu pour avoir ces papiers, je regrette ceux du Français. Le voir ainsi à la traîne ! Si seulement ses papiers étaient miens ! J'exaucerai tous mes rêves et tous mes caprices clandestins. Hélas, sans ces fameux papiers, je ne vaux rien.

En observant les SDF, les chômeurs, les mendiants et les toxicomanes, je comprends que le vrai pouvoir est celui du cerveau. Ces hommes sont tombés en proie à l'habitude. Peut-être une fois n'est-elle pas coutume ? Mais si nous sommes tentés une fois, nous devenons accros à cette première fois. D’ailleurs, j'ai failli à mon tour devenir la proie de cette spirale infernale. En travaillant dans la clandestinité, je travaillais comme un fou en baissant la tête. J'étais accro au travail et ça faisait la joie de mon soi-disant patron. Ce n'est pas lui qui m'a réveillé : il était heureux de me voir travailler comme un bourricot. C'est une personne de l’extérieur de la spirale, qui m'a éperonné en me demandant ce que je faisais de ma vie. Je lui répondis: « Je travaille, je gagne de l'argent ! » – « Mais quand vas-tu te marier ? » Une vérité très dure à entendre, qui m'a secoué. Enfin, j'ai sorti ma tête de l'eau et j'ai fait le bilan de ma vie et ce n'était pas joyeux. En réaction, j'ai pris une semaine de vacances en inventant une fausse excuse à mon soi-disant patron. Depuis deux ans, j'écris ce livre. J'écris pour ne pas succomber, pour ne pas oublier et pour ne pas devenir l'otage de ma situation. Éperonné mentalement ! Je reste éveillé pour ne pas m'endormir à nouveau. J'ai croisé beaucoup de Blédards qui vivent depuis des années dans la clandestinité entre les foyers, les associations, les mosquées et la rue. Ils se sont habitués à cette situation étrange et ça ne les dérange pas. Ni la menace Sarkozy, ni la clandestinité ne leur font peur. Pourtant, vivre ainsi est un crime contre soi-même et personne n'a pas le droit de vivre dans l'ombre. Il faut briser le silence et faire la différence. J'écris contre l'oubli et l'indifférence. Je refuse de me transformer en un mutant ou devenir l'esclave du système.

Je pense aux SDF, aux prisonniers, aux toxicomanes et aux mendiants. Il faut un élément extérieur, pour sortir ces otages de l'engrenage. Tout seul aucun homme ne peut sortir de la rue. Il faut une personne de l'extérieur pour leur ôter les œillères et les faire sortir de la misère. Il faut une assistance psychique au premier temps au SDF pour le faire sortir de la rue. Le SDF a pour référence la rue, ses amis sont des clochards et il vit de charité. Comment réinsérer un homme dans la société, surtout une société qui juge ? Comment libérer un prisonnier de son passé, s'il se heurte à la mémoire collective ? Comment s'intégrer, si la société vous rappelle que vous n’êtes qu'un immigré ? Avant d’humaniser la prison, il faut humaniser la rue et la société. En France, les intérêts et les mémoires se heurtent. Tous seuls ces otages et ces marginaux n'arriveront pas à changer de vie. Il leur faut un coach pour les encourager à s'intégrer la société.

Où est l'erreur ? Il n’y a pas d'erreur. Jean-Marie Le Pen désire voir une France blanche. Mais la race blanche n'est pas une race supérieure aux autres. Ce rôdeur pâle du jour et d'autres Parisiens, qui ramassent les ordures, sont les maillons faibles. La France ne s'est pas construite d'elle-même. Comme les civilisations antiques, l'Amérique s'est servi des esclaves pour se construire, puis des autres pays alliés pour faire échouer l'Irak. Ils parlent toujours de puissance, mais dans leurs rangs des étrangers ont combattu avec eux. Le film Indigènes prouve que la douce France ne s'en est pas sortie toute seule. Aujourd'hui, ce sont les immigrés qui font le sale boulot. À Paris, les employés arabes, honteux de leur travail, baissent les yeux devant moi et les Africains sont devenus des maîtres-chiens. Les Français disent que les immigrés occupent des postes clés (Rire).

La France est-elle une République ou une monarchie ? L’histoire de la France est-elle une affaire de famille ou de peuple, puisque Marine Le Pen a succédé à son père, est-ce l’amour de la France qui animent les Le Pen ? Ou leur amour pour le pouvoir ?

Si je m'arrête à ces lignes, je ferai une grande injustice à certains Français. Je serai un vrai «ingrat». Ainsi, les Français me traitaient chaque fois que je les critiquais. Je ne suis pas un ingrat et nullement un raciste. La preuve : de mon amour pour la France est le lot de sacrifices accomplis pour venir ici. Douteux, les Français désirent-ils un exemple de mes sacrifices ? À 35 ans, je suis toujours un célibataire. En Algérie, je refusais de me lier aux brunettes qui traversèrent le champ de mes bras. Je refusais parce que j'étais lié à la France, alors que mon corps était en Algérie, tout mon esprit durant plus de douze années était piégé dans l’Hexagone. Par amour de la France, j'ai renié mon pays et je ne me suis investi dans un aucun projet sentimental ou autre. J'ai dû supporter durant des années les moqueries de mes amis, qui me prenaient pour un rêveur. Dès mon arrivée à Paris, je n'ai pas hésiter à appeler mes amis Blédards. J'espérais les saluer, au nom des bons souvenirs ? Je n'avais qu'un désir, Monsieur le Président : me venger au nom de leur haute trahison. J'étais tellement affecté et détruit par l'infidélité de mon meilleur ami et des autres copains. Je savais ce que signifiait Paris pour les Blédards. Et je ne résistais à l'envie de profiter de l'occasion pour piquer leurs cœurs. J'ai tout planifié ! Je les ai appelés, lorsqu'ils étaient tous réunis durant un séminaire. J'insistais à leurs faire comprendre qu'un éditeur canadien avait publié mon livre L'Égérie et le Djinn. Je suis à Paris ! J'ai réussi mon pari ! J'étais fou de joie en les écoutant balbutier et en entendant craqueler leurs glaises. J'ai profité de leur ignorance pour attiser leur jalousie et les rendre envieux. Tu es soulagé ? Non, Monsieur le Président Bouteflika ! J'étais déphasé en raccrochant le téléphone. Pourquoi ? J'étais l'arroseur bronzé arrosé. J'étais brisé, lorsque j'ai appris que chaque ami avait eu un enfant. Comme dans un conte de fée, ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ! Ils avaient tous un foyer, une stabilité et de l'amour. Ils étaient avec leurs proches. En revanche, la France m'a tout pris, sans rien me donner en retour. Je me suis privé de tous les plaisirs et de toutes les fêtes. Après tout ce que j'ai fait, les Français osent me demander de rentrer chez moi. Comment pourrais-je affronter le regard des miens, avec les mains vides ? T'as ton livre ! Mes respects, mon Président, que vaut un livre devant le sourire et le babil d'un enfant créé de ma chair ? C'était un choc violent de voir tous les hommes de mon âge mariés et devenus de jeunes pères. En rencontrant les auteurs français de l'édition mille-poètes à Carcassonne, j’étais confronté à une vérité. Tous les auteurs français de mon âge étaient accompagnés de leurs femmes et avaient plus d'un enfant. Face à leur bonheur, je me voyais un homme célibataire, solitaire et très seul. J'avais compris que j'avais gâché ma vie en suivant un mirage. Je me suis isolé des écrivains à l'auberge de Carcassonne, tellement le choc était dur. Je croyais que l'homme occidental privilégiait sa carrière avant sa famille. Je l'ai suivi en reniant notre mode de vie que je trouvais très archaïque. J'étais très séduit par la mentalité occidentale. À Carcassonne, j'ai découvert que les Occidentaux se marient très tôt. Au moins, ils font des enfants très jeunes. Certains vivent en concubinage, d'autres sont des parents célibataires. Pourquoi n'ai-je pas écouté ma religion ? L'Islam invite les jeunes à se marier très jeunes. À Carcassonne, je suis tombé des nues en voyant que tous les auteurs avaient des grands enfants. Moi qui n'ai pas arrêté de trimballer mon baluchon, je me suis écroulé en sachant que j'étais passé à côté de la vie. Encore une fois, les Français m'ont menti. Lorsque j'étais en Algérie, la plupart des internautes français se présentaient comme des hommes et des femmes célibataires, malgré leur âge avancé. J’en déduisais qu'ils mettaient en avant leur carrière. Mais ça ne les empêchait pas d'avoir des enfants hors ou d'un premier mariage. Leurs enfants existaient sans que je le sache. Il fallait que je vienne en France, pour découvrir la réalité.

Je crois que ni la droite, ni la gauche, ni les présidents des pays du Tiers-Monde ne mesurent pas le coût des sacrifices des clandestins. Comme tous les forces politiques qui se moquent des sorts des êtres humains. Nous avons perdu notre statut d'êtres humains, et nous sommes devenus des sans-papiers, des X mans. Bien que la France nous ait empoisonné l'existence, il faut aussi blâmer nos pays d'origines. Il ne faut pas blâmer le passé, le présent est aussi coupable de notre situation. Personne ne peut nier que la France a fait de longues progressions par rapport aux pays arabes. Il y a des immigrés qui exercent des fonctions importantes dans le gouvernement français comme Rachida Dati, Fadela Amara et Rama Yade. Peut-être verra-t-on un fils d'immigré à la tête de la 5ème République pour faciliter l'ascension des migrants vers plus de dignité ? Il est clair que la France ne peut régler tous les problèmes du monde. Il est temps pour les présidents du Tiers-Monde de faire preuve d’un peu de bonne volonté. Les mœurs évoluent en France, alors que les mentalités stagnent en Afrique. J'étais choqué d'entendre un ministre africain des affaires étrangères de dire aux journalistes que la France doit régulariser les sans-papiers. Excusez-moi, Messieurs les présidents, certains politiciens africains sont des ignares. Ces dirigeants croient que la France possède la baguette magique.

Monsieur le Président Bouteflika, rassurez-moi : les Africains se réveilleront-ils un jour ? La France ne pourra résoudre ce problème humanitaire sans l'aide des états africains. L'ensemble des Africains de tout rang croit que les Français supérieurs peuvent tout faire, alors qu'eux, les arriérés, sont incapables de changer le monde. Comment voulez-vous que je me taise, lorsque je me sens comme une balle que chacun se renvoie ? Les Africains, intimidés par le mythe de la grande France, ne veulent rien faire, juste laisser faire. Allez, les Africains, réveillez-vous ! Autant les Français ne sont pas des génies, autant nous ne sommes pas des abrutis. Debout à côté du Français, je n’ai pas l'impression d'être un quadrumane. Sinon, j’aimeraiss l'écouter, «agir en primitif» et poser ma griffe sur son corps chétif. Le marquer à jamais, pour me démarquer.

Mais pourquoi la plupart des personnalités françaises issues de l'immigration sont-elles des femmes ? Certes, il y a Roger Karoutchi qui est né au Maroc. Mais il est juif ! Les juifs s'intègrent facilement dans la société française et dans d’autres. Il n’y a qu'à regarder la télévision et le cinéma français. Les juifs s'incrustent facilement dans les sociétés. Ils se portent bien en France ; je peux citer Simone Signoret, qui à ma surprise est la grand-mère de Benjamin Castaldi. Comme le monde est petit ! J'ai peur de me sentir de trop. Comment en tant qu'Arabe, musulman et fils de parents pauvres, pourrais-je franchir les portes de la cité interdite ? J'ai combattu pour sauver chaque fragment de mon rêve animé par ma volonté. Tout jeune, je refusais d'entendre ceux qui voulaient me dissuader de renoncer à partir à l'étranger. Aujourd'hui, je refuse d'écouter ceux qui me demandent de rentrer chez moi. Non ! Je ne partirai pas sans régler mes comptes avec Messieurs les Français. Je veux répéter mes regrets, comme ils osaient sans scrupules me répéter les leurs. Mes rêves n'ont pu voir le jour à cause des regrets de Monsieur le consul de France, qui refusait mes demandes de visa. Je n'ai jamais compris la raison de ses refus, alors que mes dossiers étaient complets. J'ai perdu mon temps en essayant de fournir des papiers. Avec la France, le fléau de la paperasse commence en Algérie. À chaque demande, je devais préparer un dossier. En revanche, je recevais à chaque tentative les regrets de Monsieur le consul. Aujourd'hui, je comprends pourquoi Monsieur le consul français en Algérie, m'interdisait l'accès à la cité interdite. Les visas pour l'espace Schengen étaient vendus au marché noir. Ah ! Ce « non » ! Cet impitoyable « non » qu'il me crachait au visage sans essayer de comprendre mes raisons ! De plus, Monsieur le représentant de la France sur le territoire algérien formulait ses regrets très poliment. Les Français vous brisent sans vous vexer. Les banquiers vous ruinent avec finesse et délicatesse. Moi aussi, je regrette, je ne peux pas quitter la France si facilement. Et j’en ai marre des conseillées juridiques et des politiciens qui me crachent leurs regrets.

– Nous avons le regret de ne donner aucune suite à votre demande…

– Nous avons le regret de vous demander de quitter le sol français !

Je m'accroche et si même clandestin, je ne fais pas le poids. Pour qui nous prennent-ils ? Les Français ne sont pas conscients de tout le gâchis qu'ils nous causent. L'année 2007 s'annonçait trop grise, j'évite de dire « noire ». Le noir reste otage de l'abîme et qui a pu dire que je serai un jour du côté obscur. Moi qui avais toujours respecté les règles et marché dans le droit chemin… ! Depuis mon jeune âge, j'étais attentif aux professeurs, faisant attention à mes devoirs. J'avais une peur bleue de la verge des professeurs. J'avais toujours fait de mon mieux afin d'avoir une bonne conduite et de ne pas dévier. Malgré les tentations de la vie, je refusais toujours de zigzaguer. Lorsque à mon tour, j'étais devenu un professeur de dessin, j'essayais de faire de mon mieux, afin d'être un exemple pour mes élèves. Et Dieu merci, j'ai réussi ce challenge sans me vanter d'être un parfait messager. Aujourd'hui, je découvre que seuls les honnêtes gens se font coincer. Combien d'innocents sont tués par les dictateurs, sans que ces derniers soient condamnés ! Mon vieux s'était crevé pour rien ! Clandestin, je n'ai plus envie de rester un saint. J'ai envie de libérer mes démons et d'être un monstre. Enfin, un monstre sacré. La plupart des soi-disant patrons français font travailler au noir et nous payent en espèces. Ils évitent les impôts et les chèques. Ces patrons votent pour la droite et sont respectés par le système. En réalité, ils se moquent du système. J'étais surpris de découvrir que tous les Français étaient au courant. Un commerce noir était toléré, car l'essentiel était de ne pas se faire chopper. En France, tout le monde chante Back Is Black !

Je n’arrive pas à croire que je suis passé du côté obscur et que je dois me cacher à la vue des policiers. Au début de mon arrivée au mois d'avril, en voulant prendre le bus, j'ai vu des hommes en uniforme. Terrifié, j'ai demandé à un jeune accompagné de son petit frère s'ils étaient des policiers. Le petit me répondit que c'était des agents de la RATP. Les deux frères commencèrent à me regarder d’un air soupçonneux. Sûrement, ils m'avaient pris pour un hors-la-loi. Mon teint suscite énormément de soupçons en France. Avec ma tête d'Arabe, j'avais l'air du suspect idéal. Sincèrement, je ne comprenais pas à quoi le système m'avait réduit. Si les politiciens faisaient bien leur travail, je ne serais pas ici. Avec cette crise mondiale, qui saura me comprendre et qui aura le temps de m'écouter ? Monsieur Sarkozy me prend pour un cas parmi d'autres cas. Je ressemble à un prisonnier qui devient une matricule. En devenant un nombre, j'ai l'impression d'avoir perdu mon statut d'être humain. Je suis une chauve-souris qui vit et travaille dans le noir. J'aurais aimé avoir les pouvoirs de Batman et combattre les méchants. Parce que je n'ai rien d'un hors-la-loi !

Qu'ils ne rient pas ! Je n'ai jamais voulu devenir un sans-papiers. J'étais loin d'imaginer qu'une telle situation pouvait exister. Et je me demande toujours pourquoi les Français rechignent à régler cette situation inhumaine. J'ai toujours voulu entrer dans le monde de la haute couture, j'étais tellement animé par mon désir d'être un styliste de mode et de vivre en France ! Les choses auraient été simples, si je n'étais pas né de l'autre côté du mur. Beaucoup de gens m'ont mis en garde contre les risques de l'immigration. Je n'ai écouté personne, tellement j'étais obsédé par le besoin de réaliser mon rêve. Par manque d'expérience, par manque de liberté et par amour de la mode française, je n'ai pas pesé le pour et le contre. Qu'ils ne se prennent pas pour des sages ! La situation des sans-papiers est vraiment une situation invivable et intolérable. J'ai vu comment les Français regardaient avec dédain les sans-abri, derrière les vitres de leurs voitures. Bien au chaud, ils se croient au-dessus de tout et en sécurité parce qu'ils ont un toit. Mais personne n'est vraiment en sûreté. La prochaine fois, ils seront peut-être la nouvelle cible ! La vie est tellement imprévisible. Il faut lire les journaux, pour voir ces gens qui, du jour en lendemain, pètent les plombs. Sans prévenir, ils se trouvent licenciés et expulsés de leurs maisons. Sans aucun avenir, ils se retrouveront seul sur le ring et face à leur destin, face à leur adversaire comme dans un jeu vidéo. Un adversaire, qu’ils ne connaissent pas, mais qui devient leur ennemi intime… C'est à peu près le sort du clandestin, qui se trouve livré à lui-même sans aucun allié.

J'observais comment les Parisiens se moquaient des touristes, des Arabes, des Noirs et des homos. Les Parisiens se croient toujours meilleurs que les autres. Je ne leur demande pas d'arrêter de juger, mais de chercher à comprendre. Nos souffrons tous d'un problème d'incompréhension. Tous nos conflits trouvent vie dans notre incompréhension envers les uns et les autres. En Algérie, depuis les vitres de ma réclusion, je regardais avec dédain les Français. Les Occidentaux étaient nos ennemis et la phase coloniale a contribué à nourrir nos haines. Si nous sommes dressés les uns contre les autres, c'est à cause de notre histoire commune très sanglante. Comment parler du futur sans évoquer le passé ? Bizarre ! Mi-enfant et mi-homme, je souffre du poids de la mémoire et mi-homme, je veux sauver mes souvenirs. Durant mes trois ans de clandestinité, j'ai vu des hommes souffrir et pleurer. Je suis le témoin du clandestin sans destin, qui, d'un soupir, me parle de son avenir. Je suis le messager, porteur des mauvaises nouvelles. Des hommes souffrent dans le gouffre d'une dure réalité. Tandis que des hommes jouissent de la vie, les clandestins sont privés de la moindre affection. Je n'arrive toujours pas à croire que le système peut faire souffrir des hommes d'une telle façon.

Depuis l'ombre de ma clandestinité, je vous écris, Monsieur le Président Bouteflika. Comment je me suis embarqué dans cette histoire ? Tout a un début et même les plus prudents de nous tombent parfois dans le zigzag. Et la loi, paraît-il, ne pardonne pas les délits. Je constate que la loi des hommes est loin d'être parfaite. Pourquoi les rois et les chefs d’État bénéficient-ils d'immunité ? J’aimerais aussi bénéficier de cette faveur. Il y a tellement d'abus de pouvoir et d'inégalité. Par exemple, le droit du veto est une vraie bourde. En quel honneur les législateurs n’attribuent-ils des titres et des privilèges qu'à certain pays ? Je ne crois ni aux juges ni aux lois qui se muent et se modifient. Je n'attaque pas la loi, ni les règles dictées qui dessinent la conduite de chaque citoyen. Je suis conscient qu'une société sans des lois et sans un ordre rétabli deviendra une jungle. Mais une loi qui se modifie à travers les temps et les réformes pour des raisons d’évolution des mœurs n'est-elle pas la justification d’une injustice ? Beaucoup de gens condamnés dans le passé à des lourdes peines sont moins chanceux que ceux de notre temps. Le rapport de l'affaire d’Outreau qualifie le dysfonctionnement de la justice de ratage sans précédent. Ça m'étonne que la justice n'ait pas commis d’erreurs auparavant. J'ai toujours eu horreur des hommes en uniformes, des juges et les généraux aux longs bras. Je ne suis pas contre ces agents de l'ordre, mais contre le fait qu'il est difficile de les critiquer. Ils se sentent au-dessus de tous, juste parce que Monsieur a des étoiles sur son épaule et que l'autre porte un galon. Je trouve insensé que nous ne puissions pas discuter un ordre. Il faut immédiatement y remédier par des réformes. Si en France la justice reconnaît ses torts en faisant des reformes, ailleurs, il est difficile de changer les mœurs. Les juges se prennent pour des dieux et les généraux pour des dictateurs. Je m'inquiète pour mes frères ! Si, au pays des droits de l'homme, la justice déraille, dans quel état est la justice du Tiers-Monde ? Le monde ne changera pas, si les pays pauvres ne contribuent pas au développement et restent à la traîne. Il est temps que les mentalités évoluent et que chaque homme portant un uniforme comprenne qu'il n'est pas la loi. Il la représente et ça s’arrête là ! Je pense à ce professeur français qui a été interpellé comme un gangster, juste parce que le père du gosse qu’il avait giflé était un gendarme. L'habit ne fait pas le moine et beaucoup d'hommes en uniforme se prennent pour des tyrans.

Une fois, j'étais convoqué au tribunal algérien. Le silence macabre régnant dans la salle fut subitement brisé par la voix criarde du juge. Il mettait en garde un accusé qui voulait se défendre et lui demanda de fermer sa gueule. Sinon, ce dernier se retrouverait derrière les barreaux. C'était très bizarre de voir sa vie basculer à cause d'un homme. Mais que faisais-tu au tribunal ? Surtout pas de jugements précipités, Monsieur le Président, je vais satisfaire votre curiosité. Je suis un Verseau et j'ai tendance à aider les autres. À cette époque, je voulais sauver le mariage de mon frère que sa copine voulait gâcher. Tous les moyens dissuasifs n'ont pas réussi avec elle. Son ex-copine voulait nous empoisonner la vie et la violence n'était que la dernière alternative. Lors du dernier accrochage avec son amie, j'ai été obligé de la gifler. Elle voulait détruire le mariage de mon frère et j'ai risqué ma vie pour sauver l'honneur de ma famille, déjà fragilisée par les malheurs et l'humiliation. L'insupportable à mes yeux était de voir les voisins se moquer de nous. Je ne suis ni agressif, ni violent ! J'ai réagi contre mon gré. Après la mésaventure, je me suis juré de ne plus jamais jouer à Superman. Parce que personne ne peut vous sauver, lorsque vous avez la tête dans un nœud coulant.

Au lieu d'être une impulsion, la violence est parfois le fruit d'une manipulation. Les voisins m'avaient tous blâmé, sans prendre en considération que j'avais parlé avec cette garce plusieurs fois. Ceux qui m'ont blâmé d'avoir mal réagi étaient ceux qui m'avaient poussé à bout. Aujourd'hui, je me méfie des Arabes qui savent manipuler en restant en retrait et me poussent vers la première ligne. D’ailleurs, je me suis retrouvé tout seul devant le juge algérien. Ce jour ! Seul Dieu m'avait sauvé la vie. Je ne regrette pas mon geste. De ce mariage, j'ai eu un joli petit-neveu. C’est pour lui que j'écris ce livre. J'espère qu'il sera épargné et ne vivra pas l'injustice que nous vivions. Pour les nouvelles générations du Levant, je brise mon serment. En écrivant mon livre, je risque à nouveau ma peau. Je sais que cette fois, je n’en sortirai pas indemne. Je joue dans la cour des grands, des géants qui n'hésiteront pas à écraser ceux qui les gênent. Je ne suis pas un héros, mais mon côté Verseau me pousse à aller vers les autres. Je ne suis pas incorrigible, je n'arrive pas à échapper à ma nature et à mon éducation. Je sais que je suis entouré d’hommes détruits par l'individualisme, l'égoïsme et l'hypocrisie. En Algérie, j'étais fidèle à mon ami intime. Neuf ans d'amitié, pour comprendre que ce cher ami ne pensait qu'à lui. En France, le même scénario se répète. Je pense aux autres, sans qu'ils pensent à moi. Tu n'es pas obligé ! Je sais, Monsieur le Président, mais qui peut aller contre sa nature. Sincèrement, je ne calcule pas mes relations et mes actions. Je vais suivant mon instinct et mes principes. Sans me vanter et sans me flatter, il m'arrivait même de nouer des liens avec le diable. Mon grand défaut est mon besoin de regarder derrière moi. C'est ce que ne font pas la plupart de mes amis. Lorsque nous finissions tard notre travail clandestin, notre soi-disant patron retenait toujours un employé sans-papiers. Choqué, je partais avec mes amis en leur disant :

– Vous avez vu, le patron a retenu ce nouveau clandestin.

– Laisse-le, me répondaient-ils. Qu'il se démerde tout seul !

En réalité, ils disaient :

– Laisse-le, s'enculer tout seul !

Chacun pour soi, personne ne pense à l'autre et personne ne regarde derrière soi. Parfois, je comprends l'égoïsme des hommes. Ils ne se soucient pas des autres, parce qu'ils n'ont pas le choix. Si les clandestins fuient sans regarder derrière eux, c'est parce qu'ils sont obligés de fuir. Parfois, je me disais que je devais m'entraîner à ne plus regarder derrière moi et à ne plus penser aux autres. Monsieur le Président, comment pourrais-je renier ma nature ?

Dans la foulée, je garde aussi le souvenir de ma visite médicale. Le service militaire est une connerie de plus, inventée par les hommes. Arrivé à Oran, je suivais la longue file de jeunes Algériens de mon âge, des milliers dans l’attente. Là-bas, vous n'aviez même pas le droit de respirer. Anciens appelés, sergents et autres militaires nous lapidaient d'insultes et d'injures. Pourquoi, dans les casernes, les hommes militaires sont-ils grossiers et vulgaires ? Le fin mot se résumait à des gros mots et les ordres se donnaient à coups de pied. L'incroyable est que ces hommes représentaient la défense nationale et l'honneur de l’État. L'armée ne peut-elle pas faire d'un adolescent un homme sans lui apprendre des injures et des insultes ? En Algérie et ailleurs pour s'imposer, il faut être insultant. Le respect a perdu son essence, depuis que l'homme croit les choses ne s'apprennent qu'avec la force. L'armée se comporte d'une façon contradictoire en imposant l’ordre et la discipline aux soldats avec des mots crus. Les armées américaine, française et algérienne apprennent au soldat à cirer ses godasses, à bien boutonner sa veste et à bien ranger son lit. Comme s’ils allaient l'envoyer dans une colonie de vacances, alors que, sur le terrain, ce soldat n'aura même pas le temps de se gratter la tête. L'armée ne crée pas des déserteurs, mais des handicapés. À quoi bon d'exiger de lui de cirer ses bottes, puisqu'il reviendra avec un peu de chance amputé d'une jambe ? Ce sont les mêmes grossièretés que j'ai connues en l'année 92, lorsque, j'ai habité la cité université d'Oran Es-senia. À 20 ans, j'étais déjà étonné de la mauvaise conduite des étudiants algériens. Nous n'étions pas des élèves, mais de grands étudiants. Des adultes sans aucun indice de maturité, sans aucun comportement saint. Étonné, je m'interrogeais :

– C'est ça les étudiants, et l'avenir du pays ! ?

Je pouvais comprendre le comportement de ces jeunes et que l'université présentait un internat ouvert aux étudiants des quatre coins du Bled. Chacun venait avec ses qualités, ses défauts et surtout avec son taux d'agressivité. L'université offre un nouvel horizon, pour des enfants qui viennent du sud, de la campagne et des coins isolés. Durant la première année, j'étais très surpris en trouvant ma chambre dans un vieux bloc. Je voyais des robinets, des portes, des fenêtres, des matelas et des lits qui se déplaçaient en traversant les couloirs obscurs. Avant le commencement de l'année scolaire, les anciens étudiants pillaient et saccageaient les chambres vides et les toilettes. Ils enlevaient les objets neufs pour les placer dans leurs chambres. Les nouveaux étudiants trouvaient leurs chambres ravagées. Je n'évoque pas l’état dégradant des restaurants de l'université, moins propres que les chiottes. Mon Dieu ! Nous mangions des plats de pommes de terre incrustés de points noirs. Les points sombres n'étaient pas du caviar, mais des insectes que nous écrasions pour les avaler. Un peu de protéine dans nos estomacs valait mieux que la viande de zèbre qu'ils nous servaient. Même avec une tronçonneuse, nous ne pouvions pas la couper. Nous n'avions pas le droit de vomir, c'était ça ou de crever de faim. Dire qu'à l'école, ils nous disaient toujours que nous étions l'espoir et la fierté de l'Algérie ! Voyant la qualité du repas, je doutais que les politiciens se préoccupent de notre sort et de notre avenir. Je comprends pourquoi les jeunes Arabes sont des nains. Pourquoi nous échouons au bac. Ils nous ne nourrissent pas suffisamment. Seuls les enfants des riches et des généraux algériens sont bien gavés.

Je me souviens aussi du jour où notre directeur d'école nous a appelés à son bureau. Il voulait nous faire lire le Journal Officiel. Il était désolé de voir que l’État destinait un budget important à la défense et aux enfants des anciens combattants. Nous les jeunes Algériens, le ministre des finances nous a rayés de sa carte budgétaire. Nous sommes des harkis, les fils des Blédards qui n'ont pas participé à la guerre d’Algérie. Ils donnent toujours aux enfants des moudjahidine et rien pour la recherche scientifique. Résultat, tous les jeunes Algériens veulent devenir des soldats et s'engagent dans l'armée. Pour protéger quoi ? Il n’y a rien en Algérie, ni usine ni trésor. Toutes les usines ont fait faillite, ils les ont toutes dévalisées. Les soldats sont les gardiens du bien des riches et du mythe de l'ennemi caché derrière le buisson.

Comment l'Algérie peut-elle sortir de sa crise, si toutes les richesses sont distribuées à une minorité ? La majorité de mon peuple ne vit plus. Le jeune Algérien subsiste, se débrouille et farfouille dans la misère, sans trouver une issue à ses emmerdes. J'ai croisé beaucoup d'étudiants universitaires diplômés en Algérie. Devant la crise économique bien ficelée, les cracks étaient obligés de faire de petits boulots. L'un d'eux était un ami, un ingénieur en biologie. Il était contraint de travailler comme professeur de biologie dans mon petit collège. Bien que moins diplômé que lui, je ne supportais pas de travailler dans une école. L'ingénieur voulait même faire un stage afin d'être admis en tant que professeur de collège. J'étais irrité de le voir gâcher sa vie et en colère de le voir sacrifier son diplôme et ses années d'études pour faire un autre job. Je n'ai jamais accepté de travailler dans le service public et d'être obligé de supporter le secteur éducatif. J'ai toujours combattu pour mes idées et mes rêves. La différence entre moi et mes amis, c’est qu’ils ont cédé à la situation du pays. Moi, je refusais de gâcher mes années d'études. Je refusais de rester toute ma vie ce minable professeur de dessin, méconnu de l’État et qui ne lui reconnaissait aucun rôle dans le développement du pays. Pourquoi était-ce aux hauts dirigeants algériens de décider de ma crédibilité ? Ils m'ont exclu de l'histoire et me considèrent comme un maillon faible. Comment aurai-je pu rester dans ce pays ? Sans aucune reconnaissance du ministre de l'Intérieur, qui traitait l'enseignement de secteur stérile. J'ai quitté mon pays parce que je ne voulais pas ressembler aux zombies algériens. Je voulais m'enfuir avec mon cerveau tant qu'il était fertile. Je n'ai pas accepté d'être exclu à cause d’un coefficient. Je refusais d'être contrôlé par des ignares sanglés dans leurs costards. Le développement d'un pays commence à l'école et l'ouverture, par la valorisation de l'enseignant. Choqué, je découvre que le professeur français galère aussi. Si vous fermez une école, vous condamnez toute une génération à l'ignorance. En Algérie, le professeur doit se prosterner devant des policiers illettrés et de hauts cadres. En Algérie, j'ai toujours combattu pour mes idées, je refusais de m'engager dans l'armée et de rentrer dans le rang. Sans le savoir, je préparais mon escapade. L’État algérien, au lieu de financer les universités et la recherche, gonflait le budget de l'armée. Au lieu d'inaugurer des usines, il ouvre des casernes et des écoles militaires. Je ne suis pas un déserteur, je suis un rimeur qui un code d'honneur à suivre. J'aime être libre et penser librement. Durant la crise algérienne qui se perpétue, mes amis diplômés m'invitaient à les suivre pour m'engager dans l'armée. Je refusais de signer ce contrat et de me retrouver en première ligne. Je ne peux blâmer la jeunesse algérienne, seul ce secteur de la défense recrute. La jeunesse algérienne marche dans un fossé creusé par le système et l'histoire. J'étais pour l'énième fois étonné de voir la jeunesse française s'engager dans l'armée pour les mêmes raisons. Certains jeunes, influencés par les feuilletons américains, s'engageaient dans la filière des chercheurs scientifiques. Les jeunes hommes ne veulent plus ressembler à Rambo, mais à Horatio Caine, héros de la série télévisée Les Experts : Miami.

J'ai eu des inspecteurs qui avaient grimpé les échelons, grâce à leur ancienneté. En Algérie, nous avions des directeurs traditionnels comme les imams. Ils nous prêchaient l'histoire, alors que nous voulions nous investir dans le futur afin d'explorer l'espace. Bizarrement, même entre Algériens, nous avons l'impression de ne pas parler le même langage. Question d'âge ou d'ego ? En Algérie, ils ne donnent rien aux jeunes, mais ils s’en inspirent. Les vieux sont incapables de suivre la technologie. Au lieu de donner aux professeurs, ils leur prennent. Je me rappelle bien nos inspecteurs qui nous demandaient de travailler à leur place durant les séminaires. Ces hauts supérieurs ne nous apprenaient rien. Au lieu de nous donner des informations, ils nous exploitaient et demandaient à leurs lécheurs de professeurs de décrypter le nouveau programme et de réaliser des exposés. En revanche, ces mignons étaient dispensés de travailler et bien récompensés. À chaque visite, les inspecteurs leur attribuaient de bonnes notes. Comme je n'étais ni un lécheur de bottes ni un hypocrite, j'avais toujours des problèmes avec mes supérieurs. Je n’ai jamais pu supporter l'injustice et la tricherie. L'Algérie va mal car elle est infestée de hauts supérieurs malhonnêtes. J'étais un fonctionnaire têtu et un opiniâtre souvent mal noté en refusant de céder au chantage. Je n'ai jamais supporté l'enseignement et de recevoir le lavage de cerveau. Nos supérieurs nous demandaient de signer des feuilles de présence et, aux yeux de l’État et de la direction de l'éducation nationale de ma ville, ces inspecteurs avaient bien fait leur travail. Sur les registres datés et archivés, nos supérieures hiérarchiques notaient qu'ils étaient réunis avec les professeurs et que le nouveau programme était décrypté. Les récits mensongers des séminaires algériens étaient écrits noir sur blanc. Aujourd'hui, je m'interroge sur la fiabilité de l'histoire des hommes. L'histoire était-elle écrite comme elle s'est déroulée vraiment, puisque de mon vivant, je me heurte à des récits qui ne correspondent pas à la réalité. L'histoire des séminaires gravés sur les registres administratifs ne s’écrivait pas comme je l'avais vécue. Personne ne contrôle et personne ne vérifie la validité de l'histoire en Algérie. Le nombre des martyrs est-il exact ? Qui a défini ce chiffre ? Au lieu de céder, j'ai décidé d'aller en France pour étudier. En premier, j'étais allé à Toulouse vers l'université le Mirail. J'ai fait les démarches, j’ai suivi les procédures qui étaient des bavures. J'ai aussi contacté l'institut catholique pour approfondir mon français. Génial ! Ils m'avaient accepté. Mon Dieu ! Moi l'Arabe, j'étais accepté parmi les catholiques. En 2001, c’était l'année de mon indépendance, j'avais enfin obtenu un visa touristique pour entrer à la cité interdite. Quand j’arrivai à Toulouse, la directrice de l'institut qui me recevait m'annonça qu'elle ne pouvait pas m'accepter et que je devais retourner à la case départ. Elle m'appela deux fois, à son bureau. Les deux fois, je me traînai avec l'espoir d'être accepté. La Toulousaine m'a tué deux fois en me demandant de revenir en Algérie et de reformuler une nouvelle demande de visa de long séjour. Imaginez-vous mon état d’esprit ! J'étais meurtri, vidé et détruit. Je venais en France en quittant mon pays, mes zèbres, mes chameaux, mes lions, mes hyènes et mes houris, pour entendre cette phrase : « Vous devez retourner chez vous ! » Je constate que les Français n'ont pas conscience des sacrifices qu’a accompli chaque Blédard pour venir en France. Je crois qu’ils ne mesurent même pas l’ampleur de notre enjeu.

Contrairement au système américain, le système français n'a pas besoin d'une arme pour vous tuer, puisqu'il le fait verbalement. Il s'est investi dans une nouvelle forme de barbarie froide. Sans bruit, sans violence et sans faire sortir l'artillerie lourde, le Français détruit sa cible de l’intérieur et sans laisser des traces visibles. Il est très simple pour lui de vous demander de venir, puis de partir d'où êtes-vous venu. Je me suis investi corps et âme dans mon rêve de venir d'étudier en France et de faire carrière dans le monde de la mode. Le Français vous tue et, avec une politesse hypocrite, vous demande d'accepter ses sincères salutations. Depuis des années, le système français qui m'a vidé de ma substance et de ma patience me tiraille avec ses faux regrets. Aujourd'hui, à mon tour de lui rendre la monnaie de son indifférence. À mon tour d’être désolé ! Non, je ne partirai pas sans régler mes comptes avec lui. Mille regrets, Monsieur, je suis dans l'incapacité de faire marche arrière et le compte à rebours a déjà commencé.

Dès ma venue en France, je me suis engagé mentalement et financièrement. Comme les deux Égyptiens qui ont dépensé 6000 € chacun pour acheter leurs visas ! Venir de l'Égypte jusqu'en France, pour découvrir quoi ? Un pays dans une situation alarmante. Paris ressemble à une ville des années 70. Que feront ces hommes, les victimes des vendeurs du sommeil ? Ils leur ont fait croire qu'ils trouveraient du travail, dès leur débarquement en France. Quel sans-papiers peut retourner dans son pays après avoir dépensé une si grosse somme ? En Algérie, nous appelons l'immigration El heda : un mot de l'argot algérien, qui vient du verbe Heda et qui signifie « détruire ». Détruire le mur et les frontières qui nous séparent de l'Europe. Les Européens ne sont pas conscients que El hada signifie « la liberté » pour les Blédards. Chaque Blédard a sa raison et la plupart fuient la misère. En Algérie, les jeunes Algériens fuient l'indifférence de l’État. À Paris, à part moi, tous les Terriens étaient convaincus que l'Algérie était un pays riche. Certes, l'Algérie est riche, mais cette richesse est destinée aux fils des riches, des généraux et des moudjahidine. La plupart des jeunes Algériens sont confrontés à la vie chère. Fragiles, nous ne pouvions combattre les généraux et l’armée. Lâches, nous avons choisi de fuir, de venir en France et de disputer au Français son morceau de pain. Au nom de l'histoire commune, nous accusons le Français d'être le responsable de notre malheur. Dernièrement, je travaillais avec un clandestin maghrébin, alors que nous travaillions au noir, un passant parisien est venu prendre quelque chose sans nous demander l'autorisation. Le Maghrébin s'était déchaîné devant ce Français. Comment toujours, je devais intervenir en demandant à ce Maghrébin pourquoi il agressait ce Français. Il me répondit : « As-tu oublié ce qu'ils nous ont fait ? » Comme j’en avais marre d'entendre ce prétexte, j'ai aussitôt répondu :

– Si tu peux reprocher ton malheur au Français, blâme aussi ton gouvernement. Ne dis-tu pas que vos chefs arabes vous volent ?

Parfois, je suis en colère de voir des Blédards et des immigrés s’en prendre aux Français. Au nom de l'histoire, ils le rendent responsable de leur misère. Ils s'attaquent à la mauvaise personne. Ce n'est pas ce pauvre Français qui nous a appauvris. Ce dernier est confronté aux mêmes problèmes que nous. Quand allons-nous nous libérer de ce passé et de cette mémoire qui nous empoisonne ? Je défends surtout l'intérêt du Français simple et non celui du système français. Durant mon séjour clandestin, j'ai connu beaucoup de Parisiens. La plupart étaient de simples figurants dans l'histoire. Des Parisiens que je voyais gagner honnêtement et durement leur vie. Malheureusement, ils étaient la cible de la colère des immigrés. Les politiciens sont protégés, mais ce simple Français ne possède aucune immunité, alors que les politiciens français attisent la haine de la meute, le Français d'en bas se heurte le premier à la violence de la rue.

Au début, je ne comprenais pas pourquoi les immigrés agressaient les Parisiens, qui n'étaient pas des racistes. Après trois ans passés à Paris, j'ai compris l'intérêt de cette violence. Les immigrés connaissaient mieux que moi les Parisiens. J'étais présent lorsque les Parisiens se réjouissaient de l'élection de Monsieur Sarkozy. Ils souhaitaient que le nouveau Président nettoie au karcher la France de tous les immigrés et les clandestins. Aujourd'hui, je légitime les agressions de l’Africain contre les Français. Les Parisiens sourient devant toi et complotent derrière ton dos. Sans oublier le soutien de leur gouvernement aux régimes politiques qui nous gouvernent. Les politiciens qui nous demandent de quitter le territoire français soutiennent nos dictateurs. La France est omniprésente sur le territoire africain. Ici, ils nous traitent de clandestins et en Afrique, ils agissent comme des souverains.

Il faut juste se promener dans les supermarchés de l'homme blanc, pour voir tous ces produits exotiques que même nous, les Africains, ne mangions pas. J'étais toujours étonné, lorsqu'ils me disaient que ce produit venait de mon pays. Le Français vit de mes richesses et me traite de pauvre sauvage. Ce qui me met en colère est la courte mémoire du Français et du Parisien. À plusieurs reprises, j'ai été trahi par certains Parisiens que j'avais aidés. Si certains d'entre eux me considéraient toujours comme un étranger, d'autres n'hésitaient pas à me demander de rentrer chez moi.

Le rêve de chaque Blédard et d'aller là-bas, de l'autre côté. En Europe riche et prospère s'installe une nouvelle Ère pour tous les chômeurs. Jadis, je passais mon temps à rêvasser et à bayer aux corneilles. Durant toute ma jeunesse, je m'imaginais marcher sur les podiums parisiens. Ici, je peux manger des glaces à la vanille, une saveur exotique importée de mon continent. Le monde est fait de deux en un. Le présent est dans l'histoire, l'histoire hante notre présent. La France est plantée en Afrique, et l'Afrique est incrustée en France. Si l'histoire se répète, en sommes-nous au présent ou au passé ? J'ai l'impression que rien n’a changé depuis que la balance de la Justice s'est brisée et que Noé a monté le loup et la brebis dans son arche. Après le crash, le mal est indissociable du bien. Le blanc n'est rien sans le brun. Paraît-il, au pays du tyran la loi ne protège pas la personne dupe. Entre le bon et le tyran, je suis la brute. Et au pays de l'égalité, je lutte pour garder mes idées brutes et non ma brutalité.

Quelques Français coléreux et frustrés par leur bas niveau de vie n’hésitaient pas à me demander de prendre ma valise en carton et de rentrer chez moi. Certains refusent de me soigner, tels deux médecins à Denfert-Rochereau. Le premier a refusé de m’examiner alors que j’étais très souffrant. Il s'excusait de ne pas pouvoir comprendre mon certificat d'aide médicale. Pourtant, le papier était rédigé en français. Le deuxième m'a reçu d'une façon très froide. Le médecin parisien, un pied-noir ou un juif, m'a jugé par rapport à mon apparence, à mon teint et à ma situation. Le plus choquant est qu'ils exposent des extraits du code de déontologie médicale sur le quai de la station du métro Pasteur. Médecins et fonctionnaires nous rendent responsables de leurs emmerdes. Les deux docteurs voulaient m'examiner contre de l'argent. Pourtant, les médecins travaillent sous serment ! Les serments ne leur suffisent plus, ils veulent du pognon. Cette fois, je refuse de comprendre l'indifférence des docteurs parisiens. Leur façon froide de m'accueillir m'a fait plus de mal que de bien.

Je peux toujours comprendre qu'un Français refuse la venue de nouveaux immigrés. Mais le plus insupportable est de voir des immigrés qui grimacent et grincent les dents en voyant une harde de petites Gitanes. « Ceux-là vont faire déborder le vase ! » s'exclama un Maghrébin à l’adresse d’un autre. Les immigrés sont dérangés par la présence des Roms, qui viennent de plus en plus nombreux. Et alors, les immigrés ! La France n'est pas le pays de vos parents. Le plus drôle est d'entendre des immigrés pères et fils critiquer les sans-papiers. Le 8 mai de l'année passée, j'écoutais la discussion entre une jeune Maghrébine et une autre femme plus âgée. Elles discutaient en premier de coiffure, de teinture et puis, la brunette disait à l'autre en évoquant le Président Sarkozy :

– Il n'est pas raciste... t'as écouté son discours …il va nettoyer la France des Algériens clandestins.

Sa voisine lui répondit :

– Donc, toi aussi, il va t'expulser !

La Maghrébine irritée ne tarda pas à riposter :

– Non, non ! Il ne peut rien me faire contre moi...je suis une Française !

Depuis la prise du pouvoir de Monsieur Sarkozy, chaque immigré pense à sa petite personne, chacun pour soi et tous pointent leur doigt vers le sans-papiers. Après son élection, il paraît que le nouveau Président débutera par les plus vulnérables. Une guerre contre nous sera une guerre triomphale. Nous n’avons aucun statut, aucune immunité et aucun système ne pourra nous défendre. Nous avions tous peur, malgré les consolations de nos soi-disant patrons. Ils ne pensaient qu'à leur intérêt. Nous ne représentons pour les Français et les immigrés qu'un moyen de gagner de l'argent. C'est étrange d'avoir la corde autour du cou et de se sentir ciblé !

À Paris, le temps passait très vite, alors que les Parisiens profitaient de chaque instant et de chaque week-end. Au seuil du deuxième tour des élections présidentielles, les sans-papiers ont cessé de vivre. La menace Sarkozy était proche de nous. Comment les clandestins pouvaient-ils vivre avec un avenir aussi incertain ? Nous étions menacés par Monsieur Sarkozy qui venait d'être élu Président de la République française. Le jour de son accession au pouvoir, tous les clandestins se considéraient comme déjà morts. Nous étions désespérés, traumatisés et, à nos yeux, Monsieur Sarkozy nous réservait le même sort que Hitler réservait aux juifs. Les clandestins étaient des cadavres ambulants, alors que j'assistais au sacre de Monsieur Sarkozy, je vivais ma propre condamnation. Les jours qui ont suivi l'élection de Monsieur Sarkozy m'ont fait sentir l'horreur qu’ont vécue les juifs. Je n’avais pas l'impression d'être un humain, mais une bête traquée et menacée par l'extinction. J'espère ne jamais revivre ce sentiment de peur et de vulnérabilité, seul au monde et contre le monde.

Durant le premier mois de mon arrivée à Paris et avec un peu d'espoir, je me suis rendu à l’université Paris 8 afin de déposer mon dossier d'inscription aux Beaux-Arts. Je garde deux souvenirs de cette université : en premier, celui de la saleté et de la couleur violette des murs. Je n'avais pas l'impression d'être dans un établissement d'enseignement supérieur français. Je ressentais le même dégoût envers nos universités délabrées. Que le système français ne prétende pas que je n'ai pas essayé ! Depuis mon jeune âge, j'ai tout tenté. Au lieu de gagner, j'ai perdu mon temps dans les écoles françaises. Si les écoles françaises acceptaient mon inscription, Monsieur le consul refusait ma demande de visa long séjour. Chaque Blédard croit que la France signifie l'assiduité, la rigueur et l'égalité des chances. Si le consulat français refusait nos demandes de visa, c'était pour une raison logique ! Parce que la France, à nos yeux, représentait le modèle du pays juste. Aucun Blédard ne pouvait douter et critiquer le verdict français. Chaque regret était une décision juste à nos yeux. En venant en France, je découvre l'envers du décor. J'étais choqué par le nombre des pannes et des bavures judiciaires. En France, j'ai compris conscience du dysfonctionnement de l'administration française. Je devine que les consulats français n'étudiaient jamais nos dossiers. Ils répondaient avec des regrets à nos demandes de visa. Les Français m'ont fait perdre mon temps et ma vie, sans nous avouer que nous étions indésirables en France. Même Paris ! La belle capitale n'est qu’un chantier en pleine construction. Je ne sais pourquoi, j'ai l'impression que Toulouse, la ville rose, est plus françaice que Paris ! Paris parait salle et mal entretenue.

Je crois que ma situation de sans-papiers me rend mélancolique. Je vois le gris et le mal partout. Non, sincèrement, Paris ne ressemble à rien. Je ne désespère pas parce que je suis un clandestin, mais parce que je suis devenu un vieux. Dans l'absence d'un mirage, je sombre dans le cirage. Je ne vois que du gris, comme la réponse de la Beurette de Paris 8. Elle était catégorique : jamais je ne serais admis dans leur université.

Mon histoire est celle d'un simple mortel. J’aimerais en inventer une qui ne ressemble pas aux autres déjà écrites. Mais j'ai l'intime conviction que nos histoires ne sont qu'une succession de faits, qui se répètent avec la même similitude. Seuls, les noms, les lieux et le temps changent. La guerre selon untel et untel est la même. Je ne vois pas la différence de tuer avec une hache, avec une flèche ou avec un Messie. Le gâchis est le même et chaque homicide est un crime. L'homme réagit comme un arrogant, insignifiant et éphémère. Même si les Français se moquent du mot «Passager». La vérité confirme que personne n'est vraiment éternel.

Je me souviens très bien de cet instant où j'ai appris que nous allons tous mourir un jour. Une dure vérité que, jusqu'à aujourd’hui, je n'arrive pas à accepter. Demain, je ne serai plus présent. Quand je croise tous ces vieux touristes à Paris, je me demande comment sera ma fin ? J'espère qu'elle sera meilleure que celle des vieux immigrés avec qui j'ai passé deux mois au foyer dePierrefite. Le couloir d'un des blocs ressemblait au couloir de la mort, j'avais l'impression de vivre avec des fantômes. Ces immigrés qui n'arrêtaient pas de se vanter au Bled, vivaient dans foyers malpropres. Ces vieux menteurs vivaient dans la misère et la précarité, alors qu’au Bled, ils donnaient toute une autre version sur leur vie en France. Bravo ! Ces immigrés nous ont berné toutes ces années. Après avoir découvert la vraie réalité des immigrés, je n'avais qu'une envie : fuir la banlieue et les blocs infestés par les cafards.

Je comprends les jeunes qui se moquent de leurs vieux, comme eux j'étais rebelle et je ne me préoccupais pas de la mort. Je me moquais de savoir comment mon père gagnait sa vie et je ne me soucie point de comprendre que mon père était fauché. Il était obligé de me donner mon argent de poche. En écoutant la chanson Mon vieux de Daniel Guichard, j'ai compris que ma vie ressemblait à mille autres histoires. Je me voyais dans les paroles de Guichard et c'était l'histoire des enfants de tous les honnêtes gens français et algériens. Pour les conseillers sociaux et les avocats, l'histoire de ma vie ne possède aucune originalité, je suis un cas parmi d'autres cas. Sauf qu'à mes yeux, mon histoire possède un trait de distinction. Je refuse de me soumettre et d'attendre sur le banc. Tout simplement, il s'agit de ma vie. Du déjà vu ou pas, ne changera rien. Dire que l'homme répète banalement ce stupide adage : « Je pense donc, j'existe ! » Les pays des chiffres et des mathématiques ne se préoccupent plus de ceux qui ne pensent plus. Les SDF, les toxicomanes, les séropositifs et les clandestins n'existent plus. Il faut que le système respecte les êtres humains, même s’ils ne pensent plus. Le système doit protéger le handicapé avant le savant.

À cause de la place que la France s’est faite dans le passé et de par le monde, je croyais que les Français menaient une vie de rêve. Que chaque Français était habillé par Christian Dioret Paco Rabanne. Tous nos livres scolaires confirmaient que les Occidentaux étaient des riches. La belle réputation de la France était soutenue par la réussite du capitalisme et l'échec du communisme. En Afrique et dans les pays du Tiers-Monde, nous avions une idée précise sur les Occidentaux. Toutes les informations et les nouvelles reflétaient à nos yeux l'image de l’Occidental riche, intelligent et très instruit. Toute l'Afrique était convaincue par la réputation de l'Europe puissante. En venant à Paris, je découvre le revers de la carte postale… !

Je découvre aussi la réalité du Parisien pauvre et de la supercherie. Je remets un blâme à tous les dirigeants Occidentaux, qui ne veulent pas renoncer à exporter une belle image d'une Europe riche et puissante. Ils tiennent à la réputation de leurs grands-pères et veulent nous faire croire qu'ils sont encore fortunés. Un blâme franc, car ce que je vois en France ne ressemble pas au faste qu'ils exposent. Je ne suis pas le seul Blédard algérien qui soit déçu par la France et Paris paraît ne tenir qu'à un vieux mythe. J'ai passé deux ans dans la capitale et je suis vraiment médusé de voir des Occidentaux chercher leur nourriture dans les ordures. Des misérables qui vivent dans la pauvreté ! Je les observe baissant la main pour ramasser des fruits ou des légumes pourris. Où est ce riche Occidental ? Où est cet homme moderne ? À Neuilly peut-être ?

La richesse est une des raisons qui attirent les miséreux des pays pauvres vers ces pays et vers la France. Mais le capitalisme a ses défauts, ses failles et ses faiblesses. Je blâme le système : son silence et sa honte ont avoué qu'il y a plus de misérables en France qu'ailleurs. Des roturiers de la classe inférieure. De l’intérieur de l’Hexagone, j'éprouve une vraie difficulté à croire que je suis en France. Sans aucun doute, j'ai l'impression d'être arnaqué par les Français. Il y a une grande différence entre ce qu'ils nous faisaient croire et la réalité de ce pays. Je ne suis pas le seul sans-papiers qui découvre la triste réalité des Parisiens. Nous avons l'impression d'être dans une ville fantôme. Les Parisiens habillés au noir ressemblent à des ombres. Paris a perdu ses charmes. À Belleville et à Barbès, il y a plus d'étrangers que de Blancs, sans que nous nous sentions vraiment chez nous.

L'île de France est l'île de la tentation pour tous les hommes et les femmes de toutes les nations. J'ai du mal à accepter ce changement et cette foule diverse. J'ai vécu toute ma vie avec les Arabes et je ne connaissais que les Algériens. Aujourd'hui, je côtoie des hommes de toutes les origines. Il faut du temps pour se familiariser avec ce petit monde. La preuve : les jeunes issus de l'immigration ne trouvent aucun mal à vivre ensemble. Ils sont habitués à se fréquenter, alors que j'ai dû mal à m'assimiler dans l'ensemble. Je me sens vraiment comme un vieux jeu devant ce métissage. Il est de mon devoir d'accepter le mixage ethnique.

Dans mon enfance, j'étais toujours fasciné par l'histoire et la mythologie égyptienne et grecque. En Algérie, je me réfugiais dans la chambre de mon cousin pour explorer son dictionnaire illustré Le Trésor. Ce dictionnaire était riche des vieux récits et des biographies des hommes célèbres. Tous les grands personnages de l'histoire y étaient : Picasso, Napoléon, Jules César, Cléopâtre, Néfertiti et d’autres. De plus, chacun d'eux, possédait sa propre biographie. J'ai toujours voulu devenir l’un d’eux et ressembler à Jean-Paul Gaultier et à Pierre Cardin. Ces grands hommes m'ont incité depuis mes 20 ans à rentrer dans les écoles françaises de la mode. Malheureusement, toutes mes tentatives se sont heurtées à des formations très chères pour un Africain.

J'ai perdu l'envie d'espérer, devant mes fausses tentatives de devenir styliste, devant mes chocs et mes frustrations. Jusqu'à aujourd'hui, je n'arrive pas à affronter le mauvais bilan de ma vie. Je trône sur une montagne d'échecs. Pour couronner le tout, je me trouve aujourd'hui dans une situation la plus étrange au monde. Coincé, je ne peux ni avancer ni reculer. Déjà vieux, je refuse de gâcher le précieux temps qu'il me reste à vivre dans le noir. Je dis aux mathématiciens et aux comptables français qu'en rêvant et en venant en France, j'ai perdu tous mes budgets. Malheureusement, ma caisse est aussi vide que celle de l’État. J'ai travaillé durant presque deux ans au bénéfice de la société des écrivains et de l'école du CNFDI. Même en Algérie, je gaspillais mon argent en finançant mes demandes de visa, parce qu'une telle demande exige des papiers, des photocopies à fournir et des frais. Les comptables, l’œil méfiant, diront qu'une demande de visa ne coûte pas énormément d'argent. Certes, ces Messieurs ignorent qu'après chaque regret reçu, je devenais mélancolique. Que faisais-je pour noyer mon chagrin ? Je retirais mon argent pour le dépenser. Et à nouveau, je me retrouvais fauché et obligé d'économiser pour renouveler ma demande de visa. Je refuse d'être exploité à nouveau : je n’en ai ni l'âge, ni la force mentale. Avec mes angoisses insupportables et insoutenables, j'arrive à peine à écrire mon livre. Je refuse d'encaisser un nouvel échec que je ne supporterai pas. Les Français ont fait de ma vie un bouquet d'échecs épineux. J'ai tout perdu, mes rêves, mes illusions et ma jeunesse, ce qui était le prix le plus cher à payer. Ne soyez pas vexés de me voir utiliser ce «Je». Depuis toujours, c'était les politiciens et les bureaucrates algériens et français qui parlaient en m'étouffant et en me bouffant le crâne. Hier, je n'avais pas le droit à la parole. Je devais juste subir et obéir aux ordres. Aujourd'hui, j'ai envie d'être sur le devant la scène et de prendre la parole à mon tour. Sans aucun doute, je légitime mon besoin d'exprimer mes opinions. Ce «Je» exprime mon besoin de quitter mon mutisme imposé depuis des années. Je veux parler de moi parce qu'on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. Je ne compterai jamais sur ceux qui ont fait de moi un exclu et un paria.

En venant en France et à Paris, je me suis demandé : que ferai-je ? J'ai tout perdu en découvrant le revers de la médaille. Dois-je porter l'habit du deuil ? Où dois-je avertir les Français qu'il y aura des représailles ? Paris, la plus belle ville au monde, est un mythe et la France, la cinquième grande puissance, est une légende. Que feriez-vous si vous perdiez vos illusions en découvrant que vous êtes devenu un vieux jeune fauché et sans avenir ? De ma part, je sais que je ne serai jamais un grand couturier. Faut-il partir et s'avouer vaincu devant le Français ? Lui qui m’a tout pris et surtout devant son indifférence et son obstination à nier, qu'il m'a confisqué mon argent, mon rêve et ma jeunesse ? Non ! Je ne lui ferai pas ce cadeau. Autant que porte le vent, je ne supporte plus son sourire insidieux et je refuse d'être le con dans cette histoire. Le système français a fermé toutes les portes devant moi, alors que j'ai passé mon temps à apprendre le français. Aujourd'hui, c'est ma volonté contre la sienne et ma rage contre sa hargne.

Déraciné et sans aucun objectif, je flânais dans les rues de Paris. Je ne savais quoi faire de mon temps libre. En remarquant la fascination des Occidentaux pour Darwin à étudier les espèces vivantes et en découvrant que le vrai passe temps des Français était d'observer, photographier et de filmer l’Africain sauvage dans sa savane, je me disais : et pourquoi ne profiterai-je pas de mon séjour en France, pour étudier le seul animal que Darwin et les Français ont oublié d’examiner ? Qui ? Le Français. Ce bipède blanc. Il existe des études françaises sur lui et sur sa vie. Mais ce n’est pas suffisant. Les Français ont toujours tendance à donner une belle image d’eux-mêmes. Il faut un regard extérieur qui pourra tracer un portrait proche de sa personnalité ambiguë. Le Français est tellement occupé à critiquer les gens des autres races, qu'il a oublié sa petite personne. Et durant mes années de clandestinité, je ne faisais que de l’observer, afin de comprendre sa façon de fonctionner et de décrypter sa façon de penser.

Le Parisien ! Lorsque j'observe cet homme, je me demande comment ce maigriot a pu soumettre mes ancêtres durant plus d'un siècle. Parfois, je doute même que Napoléon ait existé un jour et je pence que le tableau qui immortalise son sacre n’est qu'un faux ! Lorsque j'observe ce maigriot si obsédé par son apparence, je doute même de l’existence de la guerre d'Algérie. Je me dis peut-être que nos aînés ont inventé cette histoire ? Pour pouvoir exploiter la mémoire collective et profiter des privilèges qu’ils s’attribuent au nom de leur héroïsme. Les jeunes Algériens ne sont-ils pas exclus par les moudjahidin ? Les Parisiens se moquent beaucoup des Arabes et de leur travail bâclé. Au début, j’en ignorais la raison. Jusqu’au jour, où j’ai vu travailler les immigrés arabes. Les Français n’ont pas menti. Je bossais à Paris avec trois immigrés d'origine maghrébine et un Parisien. Humblement, j'ai pu faire la différence entre le travail de l'intrus et l'élu. Les Français doivent leur célébrité à la belle réputation de leur rigueur dans le travail. En observant comment le Parisien travaillait, j'ai compris son point fort. Et pourquoi les projets européens réussissent, tandis que les nôtres échouent. Pourquoi j'étais obligé de venir en France et d'être traité de pauvre arriéré, alors, que je suis l'héritier d'un immense continent. Il y a les nuls, les enfoirés, les inconnus, les grosses têtes et les frustrés. J'ai passé plus d'un an avec ces hommes verts.

Monsieur le Président Sarkozy prend trop à la légère le problème des sans-papiers. Le problème des clandestins a des ailes et des racines. Le Président de la 5ème République veut régler la question en coupant les ailes des sans-papiers. Mais ne suis-je pas en France parce qu'il y a des raisons directes et indirectes ? Aujourd'hui, je n'étudie pas l'histoire à travers les cours d'histoire. Je me rappelle bien des professeurs qui nous parlaient des guerres en traçant leurs causes directes et indirectes. Ingénu, je ne m'imaginais être impliqué dans une d'entre elles. Je croyais qu'après les guerres, venait la paix. Je croyais que l'histoire, c'était du passé. Or, l'histoire, je la vais au présent. Pour désamorcer le phénomène de l'immigration, il faut régler le problème depuis les pays au flux migratoire très élevé.

Pour vaincre l'homme blanc, il faut briser son mythe. Depuis les bancs de l'école algérienne, ils nous disaient que jamais nous pourrions égaler les Occidentaux, ces hommes blancs si forts et si puissants. Les enfants de Jésus étaient conditionnés pour réussir, alors que les Algériens étaient des paresseux. Dès lors que Youri Gagarine a posé son pied sur la Lune, il était impossible de faire mieux. Déjà l'idée sur nos deux camps avait tué chez nous l'envie d'anticiper et de progresser. Les Arabes eux-mêmes répétaient des slogans qui décourageaient les nouvelles générations. Certains professeurs, que Dieu leur pardonne, nous décourageaient en louant les grands exploits des Occidentaux. Si les plages espagnoles et italiennes reçoivent de plus en plus d'Africains assoiffés d'Europe, c'est parce que mentalement les négus sont affaiblis. Les Occidentaux nous ont vaincus psychologiquement et déjà, l’Africain se sent inférieur à l'Européen. Il ne faut pas négliger la contribution de l'Européen à exporter le mythe de la supériorité de la race blanche. L’Européen profite de ce mythe, puisque le plus idiot des Occidentaux est traité comme un roi chez nous. En observant les Occidentaux, je ne trouve pas le challenge très grand. L'écart entre les Arabes et les Occidentaux n'est pas si effrayant. Le respect, la rigueur, l'assiduité et le civisme du Français ne sont pas des acquis innés chez lui. Monsieur le Français a construit son mythe au fur et à mesure. Monsieur L dénigre le Noir, l'Arabe et le Yougoslave en se vantant d'être un Français. Mais Monsieur L oubliait que dans un passé pas lointain, ces ancêtres étaient des bouchers et une bande de tyrans. Monsieur L me considérait comme un sauvage parce qu'il possédait une belle ligne de conduite. Je n'étais jamais choqué par son insolence. Je n’avais rien à lui prouver et je ne considérais pas les Français comme une race supérieure. Tout simplement, ils ont acquis des qualités à travers leur longue expérience. Je n'avais pas un sentiment d'infériorité par rapport à Monsieur L. Même lorsqu'il ne manquait pas une seule occasion de m'insulter et de me traiter de voleur et d'idiot. Parfois, il rigolait et d'autres fois, il me rendait en colère. Le Parisien évitait d'évoquer notre passé commun et d'avouer le rôle du Français qui a construit son mythe et sa belle réputation en entretenant mes aïeux dans le chaos. Le Français a une longueur d'avance par rapport à notre ignorance, qu'il a planifiée.

L'impressionnant est de découvrir le besoin sous-jacent du Français de l’Africain. N'est-il pas curieux de voir les Africains fêter l'abolition de l'esclavage aux côtés des Français ? En célébrant l'esclavage, l’Africain offre une opportunité au Français de lui rappeler qu'il était un jour son maître. D'une façon très insidieuse, le Français maintient l’Africain sous son aile.

Pour triompher des autres, il faut gagner la guerre contre soi même. Les chefs de guerre nous parlent du Djihad. Mais avant de devenir des kamikazes, nous devrions soigner nos défauts et nos faiblesses. Les Africains noirs, déjà intimidés par les Occidentaux, marchent dans leur ombre blanche. Le jour où le Noir ne croira plus à l'esclavage, il sera libre. En réalité, l’Africain noir libre se piège lui-même en allant vers n'importe quel Parisien pour le culpabiliser. Cet affront se répète chaque fois à Paris. J'étais chaque fois étonné de voir l’Africain noir essayant de se voir à travers le Blanc. Je peux jurer que si l’Africain noir n'existait pas, le Français l'aurait inventé. Entre eux, il existe un lien ancestral. À Paris, les Noirs ne savent plus vivre sans évoquer l'esclavage et sans donner l'excuse au dernier des Parisiens de se sentir au-dessus d'eux. Le passé a causé d'énormes dégâts dans la personnalité de l’Africain. À Paris, il suffit de parler anglais pour voir tous les regards des Parisiens se tourner vers les touristes. Même si ces Américains et ces Anglais sont des idiots, ils seront mieux traités que des intellectuels du Tiers-Monde. Je n'ai jamais compris pourquoi les Parisiens dévorent des yeux les touristes anglo-saxons ? Sont-ils fascinés ou intimidés par eux ? En sachant que le français est une langue morte par rapport à la
langue anglaise, la réputation de certaines nationalités joue en faveur de certains citoyens. Je serai mieux traité si j'étais Américain. La France a donné beaucoup de valeurs à des immigrés qui auparavant ne valaient rien. Le mythe de la cinquième puissance au monde a donné des ailes à des Arabes et à des Africains. En Algérie, il faut juste dire que vous êtes un immigré en baragouinant un peu de français pour que les Blédards vous regardent avec respect et fascination.

Énormément de Blédards en Algérie passaient inaperçus, ils étaient comme invisibles à l'œil nu. Mais en devenant des immigrés français, ils sont devenus des gens importants. Nous avons le bel exemple des deux chanteurs du Rai Cheb Khaled et Cheb Mami. Au Bled, ces deux artistes ne possédaient aucune notoriété, ils étaient détrônés par le défunt chanteur Cheb Hasni. En Algérie, Cheb Khaled et Cheb Mami ne valaient rien et le Raï était critiqué par les Algériens. Mais après l'assassinat du chanteur Hasni, les deux chanteurs s'étaient installés en France. Et depuis, le regard des Africains, des médias et des politiciens a changé envers eux. Whaou ! Maintenant, Khaled et Mami chantent en France, ils sont devenus des stars internationales. Ils sont devenus les héros de l'Algérie, les ambassadeurs et les amis de l’État. Je crois même qu'ils ont chanté à l’Olympia, la salle mythique. Et nous disons merci à qui ? À la France bien sûr et à son mythe. Je ne critique pas nos deux chanteurs, puisque je suis le fan de Cheb Mami. Un chanteur qui possède un goût subtil et sait choisir ses paroles à l'opposé de Khaled qui reste dans ses reprises. Sinon, Cheb Khaled possède un bel organe vocal et un sens raffiné pour le choix de ses musiques. Je désire gommer l'auréole sur la tête de chaque immigré qui aveugle les Blédards, en croyant que tout ce qui nous parvient de la France a de l'importance. L'immigré n'était rien et voilà qu'aujourd'hui, il est le gardien de ses rêves de ses nuits. Voilà pourquoi le Français le plus ordinaire et le plus simple sera accueilli comme un roi en Afrique.

Monsieur le Président Bouteflika, il est temps que les Blédards changent leur vision sur les Français et les mutants. Ils doivent comprendre que les immigrés en France vivent dans la misère et ne possèdent rien de plus que nous. Il faut arrêter de les regarder avec fascination, parce que les Africains ne sont pas inférieurs aux Français. Le sentiment d'infériorité nous bloque et nous emmure dans une soumission aveugle et une éternelle dépendance. Il est temps pour l’Africain d'arrêter de jouer les prolongations. En multipliant ses voyages vers les pays d'Afrique, Monsieur Sarkozy insiste constamment pour jouer le big brother. Les Français nous donnent l'impression d'être des handicapés. Même durant une émission télévisée, les handicapés français, pour surpasser leur handicap, ont choisi leKilimandjaro. Pourquoi les Français ne mesurent-ils pas leur force contre des obstacles européens ? Au lieu d'aller en Afrique, mesurez donc vos forces ici contre le Mont blanc. Les Français affirment que ce sont les Africains qui ont toujours besoin d'eux. Mais qui a souffert de la suppression du rallye Paris Dakar ? Sûrement pas nous, les Africains : nous ne sommes pas habitués aux motos, nous avons nos chameaux. Comme toujours, sans avouer qu’ils ont besoin de nous, les Français recensent les bienfaits qu'apporte le rallye aux Africains. Soi-disant qu’eux-mêmes n’y participent que pour la forme. Sincèrement, les Français sont-ils généreux en pensant à nous ? Ils nous ont créé un nouveau rallye« Africa race». Les Africains se moquent des rallyes, puisque seuls les riches y participent. Encore que les Français dans le besoin inventent une nouvelle distraction. Les Français s'enracinent en Afrique et nous demande de quitter leur pays. Cette même France veut renforcer la défense des pays africains. Mais la France veut protéger l'Afrique contre qui ? Qui est le véritable ennemi de l'Afrique ?

L’Africain s'épanouira en aérant ses idées et en cessant de répercuter les mauvaises idées sur lui. Parce que l'Afrique est riche par son passé et ses richesses, la France s'immisce jusqu'à la moelle de nos affaires intérieures et nous demande ce que nous faisons chez elle. Suis-je coupable de ma situation irrégulière ? Le monde n'est-il pas aussi coupable de ce dysfonctionnement ? Monsieur Sarkozy ne joue pas franc-jeu, puisque la clandestinité apparaît comme des effets secondaires dans un long mauvais traitement des conflits. Monsieur le Président Bouteflika, il faut ouvrir les yeux et réveiller les dormeurs. Le monde est un jeu et un risque à prendre. Le risque, les politiciens l'ont pris aux dépens de la naïveté des citoyens. Quand je vois n'importe quel Français tendre sa main pour un ticket de resto, alors que l'argent circule entre les hommes politiques, je ne suis pas étonné de voir des particuliers contourner les impôts et d'autres détourner des fonds publics. Le politicien n'est pas un prophète, il est un aussi homme tenté par les privilèges du pouvoir.

Blédards ! Blédards ! Détrompez-vous. Car les immigrés vivent en France dans des réserves comme les Indiens. J'étais étonné de voir à Paris le rassemblement des Arabes, des Africains, des Portugais, des Indiens et des Roms dans des cités, alors que les Français blancs vivent loin d'eux dans des beaux quartiers. Le mur de Berlin façon Paris existe toujours dans les mœurs et les mentalités. Vous avez l'impression d'être en Amérique, où les Peaux-Rouges sont enfermés dans des réserves et les Noirs dans des ghettos. Suis-je choqué ? Non, en Algérie et dans ma ville, ce phénomène existe aussi. Vous avez les quartiers chics calmes et propres des bourgeois et vous avez nos quartiers. Je vivais aussi dans une cité HLM bourrée de pauvres gens et de pauvres misérables. Je suis surtout en colère contre les immigrés qui, chaque été, se vantaient d'être des Français. Ces immigrés !(Rire) Ces comédiens amateurs savaient très bien mentir. J'étais étonné de découvrir que les politiciens français stigmatisent ces cités à cause de la hausse de la présence des étrangers. Par contre, les riches qui amassent leur fortune sur le dos des pauvres sont toujours bien considérés par l’État.

Au pays du capitalisme, le petit citoyen doit se débattre pour gagner sa vie : ni l’État, ni l'histoire ne sont reconnaissants envers ses efforts. Le pire pour le pauvre, c'est le manque du respect de ses fils. Ils lui en veulent de s'échiner et de se crever à l'usine pour quelques sous. Si les jeunes des zones défavorisées ne veulent pas travailler, ils ont raison, Monsieur le Président Bouteflika. Comme eux, je refusais de faire comme mon père, qui s'était tué au travail. Il était mort en se privant de tout, juste pour que nous puissions avoir le minimum de luxe. Aujourd'hui, personne ne veut mourir pour rien et aucun enfant ne désire crever comme son vieux.

En France, vous travaillez toute votre vie et à la fin, ils vous mettent à la porte sous prétexte que vous êtes déjà vieux. Pire ! Ils vous licencient alors que vous ne savez rien faire que ce métier, auquel vous avez donné toute votre vie. Monsieur Bouteflika, il faut juste voir comment les hauts responsables ont remercié PPDA. Je comprends tout à fait pourquoi les Beurs refusent de travailler pour les leurs. L’État vous épuise d'impôts et de taxes, et vous vous retrouvez avec une retraite de misère, obligé de chercher votre subsistance dans les ordures. Le pire aussi ! Quand les hauts responsables vous annoncent que la caisse est vide… et que vous devez contribuer comme votre père à la remplir ! Les Français mentent aux immigrés et les Beurs nous ont menti.

Les immigrés (anciens et nouveaux Beurs) se servent aussi de l'ignorance des Blédards. En Algérie, nous avons une vision onirique sur la France et sur les immigrés. Durant tout le mois d'été, ils nous parlaient de leur vie de rêve, en mentant sur leur vraie façon de vivre et de travailler. Dès que les immigrés posaient les pieds sur le sol du Bled, ils nous jouaient leur rôle de citoyens français. Ignorant comme tous les Blédards, j'étais vraiment bluffé. Les immigrés refusaient de nous dévoiler leur vraie façon de vivre et leur bas niveau de vie. Sincèrement, je félicite le talent de ces baladins qui avaient un seul mois pour nous jouer la comédie. Les vantards immigrés sont parmi les coupables qui attisent la fiction du Blédard. Croyez-moi, Monsieur le Président, je suis choqué par le quotidien et le mode de vie des mutants. Ils travaillent sans relâche, en bavent toute l'année et plus que nous. Chaque immigré exerce au moins deux jobs, un déclaré à l’État et un autre au noir. Je n'arrive pas à croire mes yeux en les découvrant dans leur vraie réalité. Plus radins que ces baladins vous ne trouveriez jamais. Ils trimbalent les mêmes vêtements de Tati et attendent les soldes. Les seuls vêtements neufs qu'ils achètent sont pour retourner au Bled. Sinon, côté vestimentaire, les immigrés n'ont pas évolué. Ils ne se gâtent que durant le rituel de l'été indien pour bluffer les Blédards. Je ne déteste pas les immigrés, mais j’aimeraiss qu'ils arrêtent de mentir. Dernièrement, ma famille m'a annoncé qu'un voisin, un nouveau soi-disant Français, a fait descendre une belle voiture. Cet immigré a contribué à attiser mon envie de venir en France. Et comme tous les immigrés africains, il mentait sur sa vie merdique en France. Durant tout l'été, il se pavanait dans mon quartier en dessinant une réalité rose à des jeunes Blédards assoiffés de liberté.

Est-ce que les immigrés ont évolué ? Monsieur le Président Bouteflika, vous me faites rire. Les immigrés n'ont pas évolué d'un cran. Et comment évolueraient-ils ? La plupart d'entre eux ainsi que mes soi-disant patrons ne bossent et ne pensent qu'à acheter un beau carrosse. Une belle voiture qu'ils expédieront au Bled. Dès que les immigrés reviennent en France, ils enlèvent leurs beaux habits et les rangent. Le mois de vacances fini, ils enfilent leurs vieux vêtements, rebroussent leurs manchettes et retrouvent leur vie de banlieusards. La plupart des immigrés ne sont pas venus pour évoluer, mais pour amasser de l'argent. Après avoir obtenu les fameux papiers, pourquoi l'immigré chercherait-il à évoluer ? D’ailleurs, les Européens demandent une main-d'œuvre et non des cerveaux. Les Européens les aiment ainsi, bêtes et arriérés. Les Français considèrent l'immigré intellectuel comme un danger. C'est la raison pour laquelle des jeunes diplômés ne trouvent plus de travail. Les Français cherchent un ouvrier et non un concurrent. La preuve :, ils lui demandent de s'intégrer, alors qu'il était né en France. Le problème est qu’à force d'ouvrir ses frontières aux histrions, l’état de la France s'est dégradé, en particulier Paris et ses marchés. Qui travaille dans ces marchés ? Sûrement pas la crème des immigrés. La plupart viennent des pays pauvres. Il faut juste voir l’état dégradant de ces marchés parisiens, pour que vous soyez écœurés. Les commerçants étrangers et leurs employés ne répondent à aucun comportement saint. Ils ne respectent ni l'heure de la clôture des marchés, ni la propreté. À l'opposé des commerçants français, il faut chasser les commerçants étrangers pour qu'ils laissent le champ libre aux éboueurs. Les marchés sont fréquentés par une masse de clients de toutes origines qui ne montrent à leur tour aucun comportement civilisé. Les femmes écrasent vos pieds avec leurs lourds chariots et les hommes vous bousculent. Contrairement aux Parisiens, les immigrés ne possèdent pas un code de conduite. Parfois, je justifie le besoin de l’État de les rappeler à l'ordre et à l'intégration. Ils se comportent comme s'ils étaient encore au Bled. Ils n'emploient les formes de politesse qu’en présence des Parisiens. Sinon Monsieur Bouteflika ! Les immigrés sont toujours en train de se bagarrer entre eux. Ces derniers sont venus en France avec leur cafard, leur désordre et leur ancienne rancune. Une rancune liée aux vieux conflits tribaux et communautaires que les présidents africains n'ont pas réglée. Pourquoi à Paris l'Arabe se dispute avec l’Africain ? Pourquoi l’Algérien se bagarre-t-il avec le Marocain ? Parce que de votre vivant, Monsieur Bouteflika, vous n'avez pas réglé les problèmes qui existent entre le Maroc et l'Algérie. La mauvaise relation entre les deux pays se matérialise à travers la haine sous-jacente qu’éprouve l’Algérien pour le Marocain, et réciproquement. Est-ce que le roi Mohamed VI et vous-même avez conscience de l’impact des conflits politiques sur l'entente des immigrés maghrébins entre eux ? Je ne vais pas jouer les médiateurs, mais trouvez-vous un terrain d'entente. Je ne vais pas donner des leçons à des grands hommes. Tous les problèmes africains se reflètent sur la relation entre les immigrés de France. Vous n'êtes pas obligés de vous aimer, mais pensez à moi. À cause de Mohamed VI, des Marocains ne m'aiment pas.

Les immigrés sont que de pauvres comédiens qui sont obligés de jouer le rôle des riches. Ils ont honte de se dévoiler et d'ailleurs, ils baissent les yeux lorsqu'ils me croisent. Les immigrés me donnent envie de vomir, lorsque que je les débusque de leur tanière. Tu es très
sévère avec les immigrés ? Je suis désolé, Monsieur le Président, de réagir ainsi. Les mutants ont joué un rôle important en nous influençant. Au Bled, ils nous invitent à venir chez eux en France. Et quand nous débarquons, ils nous ignorent et inventent de faux prétextes pour ne pas nous rencontrer. Parce qu'en réalité en France, ils ne sont pas vraiment chez eux. À Paris, bizarrement, les immigrés sont devenus tous amnésiques, alors qu’au Bled ils se souvenaient de toutes les adresses et n'oubliaient aucune invitation à dîner. Monsieur le Président, nous sommes en mai et les immigrés se préparent à leur rituel estival. Je connais beaucoup d'immigrés qui ont déjà acheté des voitures. Je les ai vus trimer et lésiner toute l'année pour économiser un peu d'euros. En août prochain, ils s'envoleront à nouveau pour jouer le même rôle aux jeunes Blédards. Je refuse que de nouveaux Algériens innocents se fassent piéger par les immigrés. Bas les masques ! Les mutants ne valent rien en France.

Suis-je sévère ? Peut-être les immigrés sont-ils aussi des victimes ? En Orient, les Blédards étaient habitués par peur de la honte de cacher leurs défauts. Avec les immigrés, le mot tabou a pris une nouvelle dimension. Le silence de la femme orientale doit sa réputation à cette obligation de se taire. Nos aînés nous ont appris à garder le silence et à refouler nos désirs. Entre l’interdit et la crainte du ridicule, il fallait que nous étouffions nos cris et que nous ignorions nos souhaits. En Orient, ils nous apprenaient à dissimuler nos problèmes du quotidien. Je me rappelle mon père, lorsqu'un proche venait chez nous. Fauché, mon père se débrouillait toujours pour acheter un demi-kilo de viande. Un morceau de chair, qu'il payait lorsqu'il recevrait sa misérable paie. Chaque invité devait être bien accueilli chez nous, sinon c'était la honte. Nous devions sauver la face et éviter les mauvaises langues. Jeunes, nous étions étonnés de voir nos aînés mentir sur notre situation financière, alors que Dieu nous invitait à dire la vérité toute la vérité, même la plus amère. Dans la confusion entre la religion et la tradition, nous étions obligés d'imiter nos aînés et de taire nos misères. J'ai remarqué que les vieux immigrés ressemblent à nos aînés du Bled, qui s’autorisent à mentir et nous interdisent de le faire. En France, les mêmes immigrés qui distribuaient les cartes d'invitation aux Blédards, sans la moindre politesse, leurs disaient clairement d'éviter de venir chez eux. Certains immigrés ont le scrupule de prétendre qu'ils sont des Algériens, alors que les vrais Algériens, malgré leur pauvreté, ne sont pas des radins. Qu'Allah nous préserve de la mutation !

Nos aînés nous avaient conditionnés à cacher nos malheurs et à étouffer nos cris. L'immigré élevé dans cet esprit est dans l'obligation de mentir sur son bas niveau de vie. S'il est persécuté et stigmatisé en France, au Bled, l'immigré respire à travers les regards des Blédards. Pourquoi le commerçant immigré ne respecte-t-il pas les règles des marchés parisiens ? La Mairie de Paris a sa part de responsabilité. Aujourd'hui, les hauts supérieurs parisiens sont préoccupés de remplir la caisse vide. Nous ignorons qui l'a vidée. En réalité, la caisse n'était jamais vide. Au pays du capitalisme, les hauts comptables ne donnent guère d'importance à l'intégration des patrons étrangers, tant qu'ils sont rentables. Hélas ! Monsieur Delanoë, semble plus occupé par le sort du PS que de l'aspect extérieur de Paris. Il a fallu qu'un Arabe vienne blâmer les hauts comptables Parisiens sur la politique qu'ils mènent. L'identité de Paris et du Français est en jeu. À force de donner de l'importance à l'argent, les valeurs morales et le civisme se perdent. Le mercantilisme du système français tue Paris. Je ne suis pas étonné de voir un éboueur parisien s'incliner devant un mercanti égyptien. Le contraste est flagrant : l'éboueur parisien est riche par son civisme et son attitude zen, alors que le commerçant égyptien n'a rien perdu de sa morgue. Au pays du capitalisme, les mathématiciens n'exigent aucun critère de civisme vis-à-vis des nantis pour s'intégrer à la société moderne. Ils exigent juste du pauvre, même s'il est un intellectuel, de parler français et de citer par cœur tous les noms des rois de France. À Paris, il y a des nantis étrangers qui parlent moins bien le français et pourtant, ils ont obtenu leurs papiers !

Il est temps aussi que le carnage s'arrête. Les nouveaux immigrés que leur situation a été récemment régularisée perpétuent la comédie. Et je pense à la pauvre jeunesse algérienne, que ces nouveaux immigrés influenceront. Vous, les Blédards, comprenez une fois pour toutes qu'il n’y a plus de mythe. Arrêtez de croire que les immigrés vivent mieux que vous. Ici, ils bavent, ils se font chier pour gagner un euro de plus. Ne les écoutez plus, lorsqu'ils descendront chaque été avec une nouvelle voiture. Cette voiture, ils l'ont achetée à crédit ou ils ont trimé toute une année du matin jusqu'au soir pour l'avoir. Les immigrés mangent chez Coluche et s'habillent chez Tati. En France, ils roulent dans des voitures d'occasion.

Sincèrement, je ne sens pas la différence entre Mostaganem et Paris. À quoi sert de venir en France, si nous trouvons des Arabes et des Africains ? Nous avons tous fui les vieilles mentalités ternes des Arabes. La même aversion que j'avais envers les Algériens, d'autres sans-papiers l'avaient envers certains des leurs. Après trente ans passés avec les Algériens, j’en avais assez. J'étais même dégoûté des Français qui, pour sympathiser avec moi, devaient me parler de leur voyage au Bled, de Zizou et des effluves orientaux incrustés dans leurs gènes et leur sang. Renies-tu tes origines algériennes ? Monsieur le Président, vous n'allez pas en Chine pour rencontrer des Français. Vous aller en Chine pour connaître les Chinois, leur culture et leur civilisation. Je ne suis pas raciste ! Je suis saturé. J'ai envie de connaître des gens de nationalités différentes. J'ai passé trois ans en France ! Et durant cette période, je n'ai été entouré que d’Arabes. Je suis fatigué de ne plus les voir changer. Actuellement, je désire aérer mon esprit et découvrir de nouvelles mœurs. J'aime le saumon fumé. Je ne suis pas venu en France, pour manger du couscous et du poivron vert. J'avais un ami égyptien qui ne supportait plus d'entendre parler de la fève. Mon ventre non plus ne supportait plus le riz, le poivron vert et le fenouil. En Algérie, notre nourriture quotidienne n'était pas aussi riche et diverse qu'ici en France. Par exemple, durant tout l'hiver, notre nourriture se limitait à des plats à base de petit pois, de lentilles ou de haricots blancs. Nous mangions successivement ces quatre plats durant plus d'une saison. Parfois, nous gâtions notre estomac avec des tajines et rarement du poisson. Du printemps jusqu'à l'été, nous nous empiffrions de poivrons verts, d’aubergines et de pâtes. Sinon, voilà à peu près ce que mange un Algérien durant toute une année. Le pauvre menu de l’Algérien se compose d'une succession des mêmes tajines. Si la gastronomie algérienne était riche et diverse, la hausse du prix des fruits et des légumes se reflétait sur notre panier. Tous les marchands ne vendaient que les mêmes produits et nous étions obligés d'acheter ce qui se trouvait sur les stands. Le prix du poisson restait inaccessible pour la généralité des Algériens. En France, le choix alimentaire du citoyen français est beaucoup plus large. Je suis arrivé comme autant d’Arabes avec un dégoût de tout ce qui pouvait me rappeler les Arabes. La plupart des clandestins arabes ont souffert de l'esprit restreint du Blédard qui tournait en rond. Le Blédard, le rescapé des guerres a oublié son appétit pour les voyages, la littérature et les arts. Les colons occidentaux, en provoquant cette rupture, l'ont enterré vivant dans l'ignorance. Les jeunes Blédards souffrent encore des mentalités stagnantes de leurs vieux et de leurs aïeux. Aujourd'hui, la vie s’estime d'après le nombre d’aventures et d’expériences que vous avez vécues. Malheureusement, je n'ai pas l'impression d'avoir vécu mille vies dans une seule. J'étais et je suis avec les Arabes. Je ne sens ni évolution ni changement. Pire ! À Paris, j'ai découvert de nouveaux ennemis dont j'ignorais l'existence. Pourtant, je n'ai qu'une envie : multiplier mes rencontres pour devenir un caméléon et changer de peau.

Je connais très bien les Arabes, ils ne supportent pas mes critiques. Mais si nous n’acceptions pas d'affronter nos défauts, nous ne pourrions jamais améliorer notre situation. À force d'être caricaturés par les Occidentaux, les Arabes ne supportent plus qu'un autre Arabe les critique à nouveau. Les Arabes épuisés par les guerres n'ont plus la patience d'être de nouveau attaqués. Raz le Bol des interdits ! Il faut renier nos tabous, si nous voulons aller jusqu'au bout. Nous sommes les gardiens d'une fierté dorée, qu'il faut ranger. L’Orient a besoin d'un pionnier et non d'un homme fier. L'Arabe est trop sensible, trop sentimental et très nostalgique au passé. Si vous demandez à un Arabe contemporain de vous parler des ses futurs projets, il vous parle de l'histoire de ses aînés. Comme tous nos aïeux, ce docteur algérien ne pouvait s'empêcher de me parler avec fierté de la guerre d'Algérie. Bien qu'en Algérie, on parle la même langue, le message des nouvelles générations algériennes n'arrive pas au sommet. Tandis que les jeunes rêvent d'explorer l'espace, nos vieux vivent dans le passé. Nous devons reconnaître nos torts, si nous voulons avancer et triompher. L'Arabe n'est pas le meilleur, mais il peut devenir l'un des meilleurs. Aucun Algérien n'a quitté son Bled, fuyant la faim et la soif. Personnellement, j'étais venu pour étudier le stylisme et le modélisme. D’ailleurs, je suis toujours jaloux de Jean-Paul Gaultier et de Christian Dior. J’en avais marre que les Algériens me parlent que de la guerre d'Algérie. Malheureusement, nos aînés, trop fiers, nous empêchent de faire nos preuves. Ont-ils peur que notre triomphe fasse de l'ombre à leur réussite ? D'accord, ils ont réussi leur exploit : grâce à eux nous sommes libres. Et après ? Nous allons faire comme les Français, parler juste de la Shoah et de De Gaulle. Il n’y a pas un coin dans Paris où l'histoire de l'holocauste n'a pas été gravée sur les murs. Personnellement, je refuse de vivre comme le Parisien dans une grotte avec une histoire rupestre. Moi, je veux avancer et atteindre la lumière à la fin du tunnel. Excusez-moi, chers gardiens de l'histoire ! Icare ou pas Icare, je veux voler avec mes propres ailes, alors que le poids de la mémoire me retient au sol, chaque jeune désire prendre son vol. Je ne cours pas contre la mémoire, mais contre le temps. Je n'ai pas le temps d'entendre toutes vos histoires, qui se ressemblent. Et malgré moi, j'ai besoin de diversité. À Paris, j'ai travaillé avec beaucoup d'Algériens. Et les défauts des Algériens sont la jalousie et la fierté ; alors que je ne suis qu'un clandestin, j'étais confronté à la jalousie des Algériens. En Algérie et en France, un Algérien ne veut pas qu'un Algérien comme lui réussisse dans sa vie. En réalité, la jalousie, c'est le problème de tous les Arabes. De plus, Monsieur Bouteflika, il y a la fierté de l’Algérien, qui lui fait défaut. Pourquoi les Algériens sont-ils fiers ? Je ne sais pas. Même ce docteur, cet internaute me parle de la fierté algérienne. Qu'ont-ils réalisé ? Les Algériens sont fiers parce qu'ils ont combattu les Français et gagné la guerre. Mais d'autres peuples ont aussi fait la guerre et ce n'est pas un prétexte pour vivre dans le passé. Ces fiers Algériens ont oublié que c'est à la grâce de Dieu qu'ils ont gagné. Après l'indépendance, les Algériens, qu'ont-ils inventé ? Rien, puisque mes deux frères Blédards sont toujours pauvres et que je devais les aider financièrement. Sommes-nous libérés pour mourir dans la pauvreté et la précarité ? Les jeunes Algériens tuent le temps à ne rien faire et beaucoup sont des chômeurs. J’aimerais que l’Algérien oublie sa fierté et songe à l'avenir. Entre-nous, Monsieur Bouteflika l'indépendance algérienne est aussi un don du ciel. Avons-nous remercié Dieu ? Non, les historiens inaugurent des musées en mémoire des hommes, alors que la mémoire collective a oublié le rôle de Dieu dans notre libération. Les moudjahidin algériens ramènent tout à leur courage : « Nous ! C'est grâce à nous que vous êtes libres ! » nous répètent-ils. Sans aucun scrupule, les martyrs vivants oublient que sans sa miséricorde, jamais nous serions libres. Chacun exhibe avec fierté ses médailles et ses blessures de guerre. Malheureusement, les Algériens sont devenus comme les Français : des idolâtres.

En me promenant dans les grandes surfaces et les marchés parisiens, je distingue une nette différence et je conclus qu'en Algérie nous ne vivions pas. Je regarde ébahi ces richesses, sans pouvoir nommer chacun des produits étalés sur les rayons. D'où les Français ont-ils importé ces divers fruits et légumes ? Je l'ignore. Mais je sais que mon peuple était depuis longtemps privé des délices de la Terre. Pourtant, jadis, mes ancêtres avaient un bon palais et leur table orientale ne manquait pas des fruits venus des quatre coins du monde. À Paris, je ressemblais au marin Sinbad que son bateau a échoué sur l'île de la tentation. Nommer quoi et décrire quoi ? À Paris, chaque fruit possède des couleurs et des formes étranges. Tous les fruits exotiques atterrissent sur la table du Parisien, alors que le Blédard que j'étais le seul fruit qu'il connaissait était l'orange. En voyant tous ces fruits et ces légumes, je n'avais qu'une envie : renier mes origines et brandir le drapeau français en criant à haute voix :

– Vive la République française !

Quel traître ! Excusez-moi Monsieur Bouteflika mais au moins les Français sont gâtés par la diversité des produits alimentaires. C'est la raison qui empêche les immigrés de renoncer à la France. Il faut bien manger et en plus les Français ne se battent-ils pas pour améliorer leur pouvoir d'achat ? Ces deux dernières années, ils ne parlaient que du pouvoir d'achat.

Je n'ose même pas évoquer les autres produits vendus dans les autres rayons des supermarchés. Mon Dieu ! Il y a tellement de choix que j'adore me promener dans le Monoprix et passer toute une matinée dans les grands espaces du Carrefour, alors qu’il suffisait d'un tour de regard pour faire le tour de nos supermarchés algériens. La diversité existe aussi dans ton pays ! Je sais, Monsieur Bouteflika. Malheureusement en Algérie, la diversité exotique est inaccessible à la plupart des Algériens. Au Bled, au rayon fromagerie, seul cet homme, ce soi-disant riche plus distingué que les autres, un haut fonctionnaire algérien aux allures de faux nabab s'autorise à acheter des produits importés, des marques très chères pour la généralité des pauvres. Et avec panache, il demande au vendeur :

– Pèse moi la moitié de celui-ci...et trois morceaux de l'autre.. !

Les autres Algériens fauchés qui l'entourent comme un cercle de badauds, lèchent les liasses de billets qu'il sort de ses poches. C'est une des raisons qui m'a fait quitter l'Algérie : ce faux-semblant que prenait le haut fonctionnaire algérien, en achetant n'importe quoi. Je ne supportais pas de voir l’Algérien se transformer en un consommateur se vantant aux dépens des pauvres malheureux. Le bourgeois algérien répète le même rituel chez le boucher :

– Donne-moi deux kilos de viande et pèse-moi ce foie ! s'exclame-t-il devant le regard affamé des misérables. Des pauvres mal fagotés, que vous reconnaîtrez aussitôt. Ils restent, en lorgnant la viande des agneaux accrochés et les billets du nabab. Tant de billets qui pourraient nourrir toute une tribu !

J’en avais marre de voir la même scène et ces Arabes qui, grâce à leur portefeuille rempli, se croyaient importants. Contrairement aux autres clandestins, je n'étais pas venu en France pour acheter une voiture. Ma fugue exprime mon ambition et non ma rébellion. Je refuse de me transformer en un animal de consommation. Je peux comprendre que les Algériens privés du luxe se tournent vers les objets commerciaux. En Algérie, les gens vous respectent parce que vous possédez une voiture. Mais une voiture est une voiture, quel que soit son prix et son modèle. Malheureusement, les Algériens ont été réduits à devenir des consommateurs et le couffin chargé montre l'aisance de la personne. Tandis que les pauvres se tapissent dans l'ombre de la misère, le riche porte sa richesse dans son seul regard. Il suffit que l'idiot soit un riche, pour que tout le monde s'incline devant lui. Malheureusement, le riche profite toujours de ses relations et de sa réputation.

 

                                                                                                          Ecrit en 2009

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